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Cindy Blackstock

Cindy Blackstock, O.C., travailleuse sociale, autrice, professeure, militante (née en 1964 à Burns Lake, en Colombie-Britannique). Cindy Blackstock est une militante pour les droits des enfants autochtones reconnue à l’échelle nationale et internationale. En 1998, elle a cofondé la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Canada. De 2007 à 2016, elle a été à la tête de l’affaire opposant cet organisme au gouvernement fédéral. Durant cette période, la Société de soutien a cherché à prouver que les services de protection de l’enfance offerts aux enfants et aux familles des Premières Nations dans les réserves sont à la fois discriminatoires et insuffisants. Cindy Blackstock et la Société de soutien travaillent encore aujourd’hui à l’amélioration des services à l’enfance et à la famille offerts aux Autochtones partout au Canada.

Portrait de Cindy Blackstock

Jeunesse et éducation

Cindy Blackstock naît d’une mère non autochtone et d’un père membre de la Première Nation Gitksan, dont elle fait également partie. Son père travaillant dans les services forestiers, elle et les membres de sa famille sont appelés à déménager fréquemment.

Enfant, Cindy Blackstock n’est pas étrangère à la douleur causée par le racisme envers les Autochtones. Elle apprend rapidement que les stéréotypes définissent souvent la manière dont les enfants autochtones se perçoivent et envisagent leur avenir. Elle se promet ainsi de se forger un avenir positif, comptant sur l’éducation pour atteindre son objectif. (Voir aussi Ségrégation raciale des peuples autochtones au Canada.)

À la fin de ses études secondaires, Cindy Blackstock obtient un baccalauréat en arts de l’Université de la Colombie-Britannique. Elle obtient plus tard une maîtrise en gestion de l’Université McGill et une autre en jurisprudence à l’Université Loyola de Chicago, se spécialisant dans les lois et politiques liées à l’enfance. Elle est également titulaire d’un doctorat en travail social de l’Université de Toronto.

Après ses études, Cindy Blackstock décroche un emploi en protection de l’enfance. Au cours de sa carrière, elle apprend que les problèmes vécus par un bon nombre d’enfants autochtones découlent de la dépendance, des traumatismes, et de la pauvreté. Elle découvre également que la réglementation gouvernementale en place empêche souvent l’égalité d’accès aux services sociaux pour les familles dans les réserves.

Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations

En 1999, Cindy Blackstock cofonde la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations, dont elle devient directrice générale. L’organisme national à but non lucratif, souvent appelé simplement Société de soutien, a pour objectif de faire de la recherche, de militer auprès des gouvernements des provinces et du Canada, et d’offrir du soutien aux organismes offrant des services aux enfants, aux familles, et aux communautés autochtones.

En 2007, la Société de soutien et l’Assemblée des Premières Nations intentent une poursuite contre le gouvernement fédéral auprès de la Commission canadienne des droits de la personne, soutenant que les politiques et les pratiques de financement fédérales font subir aux enfants autochtones de la discrimination raciale. Trente jours après le dépôt de la plainte, le gouvernement retire son appui financier à la Société de soutien.

Pour sa poursuite, la Société de soutien s’appuie entre autres sur le principe de Jordan, ainsi nommé d’après Jordan River Anderson, un enfant de la Nation crie de Norway House, au Manitoba, qui avait besoin de soins médicaux spéciaux pour survivre. Pendant trois ans, les gouvernements du Canada et du Manitoba se sont disputés pour déterminer qui était responsable de payer les soins à domicile de l’enfant. Lorsque le jeune Jordan Anderson a finalement perdu la vie en 2005, à cinq ans, les gouvernements n’avaient toujours pas pris de décision. Dans le cadre de la poursuite qui s’est ensuivie, la cour a mis en place le principe de Jordan, qui stipule que les besoins des enfants doivent passer en premier, et que les décisions financières intergouvernementales doivent être réglées par la suite.

Aujourd’hui, l’ours en peluche est pour la Société de soutien un symbole de la lutte de Jordan et de celle de tous les autres enfants autochtones qui cherchent la sécurité et l’espoir. La mascotte de l’organisme porte le nom de Spirit Bear (qui signifie esprit de l’ours). À plusieurs moments clés pendant sa longue lutte avec le gouvernement fédéral, Cindy Blackstock se présente avec Spirit Bear lors d’audiences au Tribunal canadien des droits de la personne ou sur la colline du Parlement, avec un grand nombre d’enfants tenant aussi entre leurs mains des oursons en peluche. Elle explique alors : « Par nature, la loi n’est pas juste. Des injustices comme les pensionnats autochtones étaient légales à leur époque. La vraie justice existe seulement lorsque la loi se teinte d’amour et de compassion, et c’est ce que véhiculent les enfants et leurs oursons. »

Le 26 janvier 2016, le Tribunal canadien des droits de la personne rend sa décision en faveur de la Société de soutien, énonçant que le sous-financement chronique du gouvernement fédéral pour les services à l’enfance autochtones est un acte discriminatoire. Le tribunal ordonne au gouvernement de modifier son financement pour garantir une offre de services équitable, et de prouver qu’il applique le principe de Jordan dans toutes les situations. Il exige également que les personnes ayant subi un préjudice reçoivent un dédommagement. Cependant, le gouvernement tarde à mettre en place les mesures imposées. Cindy Blackstock affirme d’ailleurs que la discrimination n’a pas cessé malgré la décision du tribunal.

Le 4 juillet 2022, dans le cadre du plus grand règlement de l’histoire du Canada, le gouvernement fédéral signe une entente de compensation de 20 milliards de dollars. Cependant, le Tribunal canadien des droits de la personne rejette cette entente de compensation, invoquant des craintes concernant le fait que certains demandeurs ne seraient pas admissibles à une indemnisation. En octobre 2023, un juge fédéral approuve un accord de compensation de 23,34 milliards de dollars. En plus de cet accord, le gouvernement fédéral alloue 20 milliards de dollars pour des réformes des services de protection à l’enfance et des services familiaux sur les réserves afin d’éliminer la discrimination.

Autres projets et militantisme

Cindy Blackstock participe à la création d’un film de 2016 intitulé We Can’t Make the Same Mistake Twice, qui porte sur son rôle dans l’affaire juridique de la Société de soutien contre le Canada. Elle écrit également des livres pour enfants, comme Spirit Bear : Honouring Memories, Planting Dreams (trad. Spirit Bear : Rendre hommage aux souvenirs, semer des rêves); Spirit Bear: Echoes Of The Past: Based On A True Story (trad. Spirit Bear : échos du passé : basé sur une histoire vraie); Spirit Bear and Children Make History: Based on a True Story (trad. Spirit Bear et les enfants passent à l’histoire : basé sur une histoire vraie); et Spirit Bear : Fishing for Knowledge, Catching Dreams: Based on a True Story (trad. Spirit Bear : pêcher le savoir, attraper des rêves : basé sur une histoire vraie). Cindy Blackstock rédige également la préface du livre Confronting Medical Colonialism Against Indigenous Children in Canada (trad. Plus aucun enfant autochtone arraché : Pour en finir avec le colonialisme médical canadien) de Samir Shaheen-Hussain, qui examine le racisme systémique envers les Autochtones dans le système de santé canadien. Au cours de sa carrière, l’auteure compose également plus de 75 articles sur la protection de l’enfance et les droits de la personne chez les Autochtones.

En plus de ses projets en protection de l’enfance, Cindy Blackstock milite pour les droits des Autochtones dans leur ensemble. Elle aborde différents sujets touchant les populations autochtones, comme les pensionnats autochtones, les traumatismes intergénérationnels, les contrecoups de la rafle des années soixante, le racisme au Canada, la justice, la réconciliation, ainsi que les droits des femmes, des enfants et des familles autochtones.

Aujourd’hui, Cindy Blackstock est professeure à la faculté de travail social de l’Université McGill, à Montréal. Elle a participé à la Commission de l’Organisation panaméricaine de la Santé sur l’équité et les inégalités en santé, et elle a mené des consultations auprès de l’ONU. Conférencière populaire, Cindy Blackstock parle surtout de la protection de l’enfance chez les Autochtones et de l’importance d’une véritable réconciliation.

Prix et distinctions

Le travail de Cindy Blackstock a été reconnu par de nombreux prix et doctorats universitaires honorifiques. En 2021, le magazine Maclean’s nomme la militante et autrice parmi les 50 personnalités canadiennes les plus influentes de l’année. Cindy Blackstock devient officière de l’Ordre du Canada en 2019.