Les Flyers de l’ARC (Aviation royale canadienne) sont une équipe amateur masculine de hockey, composée principalement d’aviateurs, constituée dans l’urgence pour représenter le Canada aux Jeux olympiques d’hiver de 1948. Après des défaites essuyées lors de matchs hors compétition au Canada, les médias estiment que cette équipe constitue « une honte » pour le pays. Plusieurs changements apportés dans la liste des joueurs permettent cependant d’améliorer l’équipe, qui finalement remporte la médaille d’or aux Jeux olympiques d’hiver de Saint‑Moritz, en Suisse.
Contexte
Les premiers Jeux olympiques modernes ont lieu en 1896, les sports d’hiver y étant intégrés à compter de 1908. Aux Jeux olympiques de 1920, la première médaille d’or en hockey est remportée, pour le Canada, par les Falcons de Winnipeg. Les premiers Jeux olympiques d’hiver, indépendants des Jeux d’été, sont organisés en 1924. Ils doivent avoir lieu tous les quatre ans, mais sont annulés en 1940 et 1944, en raison de la Deuxième Guerre mondiale, avant de reprendre en 1948. (Voir Le Canada aux Jeux olympiques d’hiver.)
À cette époque, l’équipe de hockey choisie pour représenter le Canada aux Jeux olympiques est celle qui a remporté la Coupe Allan décernée, depuis 1909, à la meilleure équipe de hockey amateur masculin senior du Canada. En 1947, les Royals de Montréal gagnent le trophée, avant que l’on ne découvre que plusieurs membres de l’équipe avaient été rémunérés pour jouer et n’étaient donc pas des athlètes amateurs. Jusqu’en 1984, les règles olympiques stipulent que tous les athlètes olympiques doivent impérativement être amateurs. Les Royals ne peuvent donc pas représenter le Canada aux Jeux olympiques d’hiver à venir et il semble, à ce moment‑là, qu’aucune autre équipe ne le fera. (Voir Équipes olympiques canadiennes de hockey.)
Deux jours avant la date limite fixée par la Fédération internationale de hockey sur glace pour que le Canada indique s’il enverra une équipe participer à la compétition olympique, le médecin militaire et chef d’escadron de l’ARC, le Dr A. Gardner « Sandy » Watson, réussit à convaincre l’Association canadienne de hockey amateur qu’il est en mesure de former une équipe composée d’aviateurs. Le 15 octobre 1947, le président de l’Association, Al Pickard, annonce que l’équipe de l’ARC du Dr Watson représentera le Canada aux Jeux olympiques qui se tiendront à Saint‑Moritz, au Suisse, du 30 janvier au 8 février 1948. (Voir Le Canada aux Jeux olympiques d’hiver de 1948.)
Préparation pour les Jeux
Le docteur Watson recrute l’ancien joueur de la Ligue américaine de hockey, le sergent Frank Boucher, comme entraîneur de l’équipe, tous les deux communiquant ensuite avec les bases de l’ARC, d’un océan à l’autre, pour rechercher des joueurs. Le 13 décembre, moins de sept semaines avant le début des Jeux olympiques, l’équipe de l’ARC, surnommée les Flyers, dispute son premier match hors compétition, qu’elle perd sur la marque de 7 à 0 contre le club de hockey de l’Université McGill. Quelques jours plus tard, les Flyers affrontent l’équipe de Army d’Ottawa, composée de soldats de l’Armée canadienne, avec, à la clé, une nouvelle défaite 6 à 2.
Les médias critiquent sévèrement cette équipe de l’ARC, suggérant son retrait des Jeux olympiques pour éviter une « honte nationale ». Dans un article daté du 18 décembre 1947, l’Evening Citizen d’Ottawa écrit : « La décision de retenir comme représentante du Canada pour le tournoi de hockey des Jeux olympiques une faible équipe de l’ARC, partageant la dernière place de la Ligue de la ville d’Ottawa, sera reçue avec consternation partout au Canada. »
Jeux olympiques d’hiver de 1948
Des changements sont apportés à la composition de l’équipe quelques semaines à peine avant qu’elle n’embarque de New York à bord du transatlantique Queen Elizabeth. Six aviateurs sont remplacés par de nouveaux joueurs, provenant de la réserve de l’ARC, de la Ligue de la ville d’Ottawa et de l’Université de Montréal. Le remplacement du gardien de but de l’équipe, à la suite de son échec à l’examen physique obligatoire, par un employé de la Toronto Transit Commission, le gardien de but amateur Murray Dowey, s’avère particulièrement inspiré, puisque ce dernier se montrera quasiment imbattable.
Le tournoi olympique de hockey, opposant, outre la malheureuse équipe du Canada, huit équipes, se déroule sous forme de matchs organisés au sein d’une poule unique, tous joués sur une patinoire extérieure, l’équipe tchécoslovaque étant la grande favorite de la compétition. À l’occasion de chacun de leurs matchs, les Canadiens doivent faire face à des arbitres qui semblent prendre des décisions systématiquement orientées contre eux, lors de plusieurs parties, des spectateurs lançant même des boules de neige sur les joueurs des Flyers.
Pour son premier match, le Canada bat la Suède 3‑1. Les Flyers entament alors une série de victoires décisives, battant le Royaume‑Uni 3‑0, la Pologne 15‑0, l’Italie 21‑1 et les États‑Unis 12‑3. Le match entre le Canada et la Tchécoslovaquie donne lieu à un âpre combat qui se termine sur une marque nulle et vierge, avant que les Canadiens ne prennent le meilleur sur les Autrichiens par 12 à 0. Lors du dernier match, le 8 février, le Canada l’emporte sur la Suisse sur la marque de 3 à 0.
À la fin du tournoi, la Tchécoslovaquie et le Canada ont chacun à leur actif sept victoires et un match nul. C’est toutefois le Canada qui est déclaré vainqueur, les Flyers affichant une différence de buts plus élevée. L’équipe au sujet de laquelle la très grande majorité de la population canadienne avait abandonné tout espoir remporte finalement la médaille d’or aux Jeux olympiques d’hiver de 1948.
Wally Halder, un défenseur de 22 ans, qui, en huit matchs, adresse 6 passes décisives et inscrit un incroyable total de 21 buts, termine meilleur pointeur des Flyers. La performance du gardien de but Murray Dowey, qui n’a concédé que cinq buts en huit matchs, tout en obtenant un nombre impressionnant de cinq blanchissages, est également largement applaudie. Outre ces deux-là, la liste des Flyers de l’ARC est également composée des joueurs suivants : Hubert Brooks, Frank Dunster, Roy Forbes, Andrew Gilpin, Orval Gravelle, Patrick (Patsy) Guzzo, Thomas (Ted) Hibberd, Ross King, Andre Laperriere, Louis Lecompte, Julius (Pete) Leichnitz, George Mara, Albert (Ab) Renaud, Reginald Schroeter et Irving Taylor.
Après les Jeux olympiques
Pendant des semaines après la fin des Jeux olympiques, les Flyers disputent des matchs d’exhibition pour amasser des fonds, afin de payer leurs dépenses. À son retour au Canada, le 7 avril 1948, l’équipe est accueillie à la gare Union d’Ottawa par une foule enthousiaste, des photographes des médias et des dignitaires, le gouverneur général, le vicomte Alexander, rendant hommage aux Flyers, deux jours plus tard, lors d’une cérémonie organisée au mess des officiers de l’ARC, à Ottawa.
Les Flyers disputent un dernier match‑bénéfice, à Ottawa, le 10 avril 1948, au cours duquel ils sont opposés à une équipe d’étoiles composée de joueurs de la Ligue nationale de hockey et de la Ligue de hockey senior du Québec. Plus de 5 000 partisans sont présents lorsque le ministre de la Défense, Brian Brooke Claxton, laisse tomber la rondelle pour le coup d’envoi protocolaire. Les Flyers perdent le match 6‑3, mais Hubert Brooks, alors membre de cette équipe, se rappellera plus tard, en ces termes, de cette partie de gala : « À ce stade, peu de gens s’intéressaient véritablement à la marque, nous étions tout simplement heureux que tout ça soit terminé. » Les profits de la soirée sont versés à l’appel canadien pour le Fonds des enfants.
Commémoration
Pendant des années, les Flyers semblent être tombés dans l’oubli. Cependant, en 1971, ils sont honorés par une intronisation au Temple de la renommée des sports des Forces armées canadiennes, à Edmonton. Une exposition permanente au Musée national de la Force aérienne du Canada à la BFC Trenton commémore également leurs exploits. En 2007, l’auteur Pat MacAdam raconte l’histoire improbable de cette équipe dans un livre intitulé Gold Medal “Misfits” : How the Unwanted Canadian Hockey Team Scored Olympic Glory. En avril 2008, les Flyers de l’ARC sont intronisés au Temple de la renommée olympique du Canada, à Calgary.