Article

Johnson, Edward

Edward (Patrick) Johnson. Ténor, administrateur, mécène (Guelph, Ont., 22 août 1878, naturalisé américain 1922 - 20 avril 1959). LL.D. (Western Ontario) 1929, D.Mus. h.c. (Toronto) 1934, D.èsL. h.c. (Union College, N.Y.) 1943.

Johnson, Edward

Edward (Patrick) Johnson. Ténor, administrateur, mécène (Guelph, Ont., 22 août 1878, naturalisé américain 1922 - 20 avril 1959). LL.D. (Western Ontario) 1929, D.Mus. h.c. (Toronto) 1934, D.èsL. h.c. (Union College, N.Y.) 1943. Fils de James Johnson et de Margaret Jane Brown, il commence dès son enfance à chanter dans la chorale d'une église locale. À 20 ans, il est soliste à l'église Chalmers de Guelph et remplit déjà plusieurs engagements comme amateur, dont un concert à Stratford en 1897 avec la contralto Edith Miller qui l'encourage à entreprendre une carrière professionnelle. Il se rend peu après à New York où il étudie avec une certaine Mme von Feilitsch tout en acceptant des engagements sans conséquence dans des églises, à des soirées du YMCA, etc. Au tournant du siècle, il devient un jeune « artiste de soutien » assez demandé et, à ce titre, partage des programmes avec des célébrités telles que Lillian Nordica, Louise Homer, Vladimir de Pachmann et Ernestine Schumann-Heink. Ces engagements prennent place, pour la plupart, dans les États du nord-est des États-Unis et comportent d'occasionnelles visites au Canada, notamment lorsqu'il est soliste dans Hiawatha de Coleridge-Taylor (Montréal, 27 janvier 1904) et dans le Psaume 13 de Liszt (16 février 1905, avec le Choeur Mendelssohn de Toronto). Il se produit pour la première fois à Carnegie Hall en 1904.

En 1907, Johnson accepte un peu malgré lui de chanter le premier rôle de A Waltz Dream d'Oscar Straus lors de la création nord-américaine de l'oeuvre. Après des représentations à Philadelphie et Baltimore, l'opérette prend l'affiche du Broadway Theatre de New York le 27 janvier 1908 pour y demeurer durant 14 semaines. Le jeune ténor se retrouve ainsi vedette du jour au lendemain, mais surtout, en possession de moyens financiers suffisants pour aller se perfectionner à l'étranger. Il s'embarque donc pour Paris en 1908 et commence à travailler avec Richard Barthélemy. C'est dans cette ville qu'il rencontre Beatrice d'Arneiro, fille du vicomte portugais José d'Arneiro, qu'il épouse à Londres le 2 août 1909. Tous deux s'établissent à Florence où il poursuit ses études avec Vincenzo Lombardi et où naît leur unique enfant, Fiorenza, le 21 décembre 1910.

Chanteur d'opéra

Le 10 janvier 1912, Johnson fait ses débuts à l'opéra dans le rôle titre d' Andrea Chénier au Teatro Verdi de Padoue. Il change son nom en celui d'Edoardo Di Giovanni (l'orthographe et les majuscules sont conformes à la volonté de Johnson, mais contraires à d'autres références). Il connaît ses premiers grands succès sous ce nom, notamment lors d'une saison à Rome (1912-1913) au Teatro Costanzi dans des opéras tels qu'Isabeau de Mascagni et La Fanciulla del West de Puccini. À la Scala de Milan, il triomphe le 9 janvier 1914 dans le rôle-titre de Parsifal lors de la première représentation en Italie de cette oeuvre. Pendant les cinq années suivantes, il se fait entendre sur les plus prestigieuses scènes lyriques italiennes ainsi qu'au Teatro Colón de Buenos Aires (1916) et au Teatro Real de Madrid (1917).

À l'exception de Don Carlo et d'Aïda, il évite le répertoire habituel du 19e siècle, persuadé que sa voix robuste et son tempérament ardent conviennent mieux à l'école vériste, dont quelques-uns des principaux représentants - Alfano, Montemezzi et Pizzetti - l'invitent à participer à plusieurs créations mondiales à cette époque. La période « Edoardo Di Giovanni » de la carrière de Johnson prend fin avec le décès de sa femme, le 24 mai 1919.

Le 20 novembre suivant, il fait ses débuts nord-américains à l'opéra chantant Loris dans Fedora de Giordano, au Chicago Opera. Membre de cette compagnie pendant trois saisons, il y chante son répertoire habituel ainsi que le rôle-titre de Lohengrin et dans des oeuvres rares, telle Aphrodite d'Erlanger, aux côtés de Mary Garden. C'est dans le rôle d'Avito dans l'Amore dei tre Re de Montemezzi qu'il débute au Metropolitan Opera (16 novembre 1922). Pendant 13 saisons consécutives, il est l'un des artistes les plus admirés de la troupe. Sans être doué d'une voix exceptionnelle, il sait néanmoins l'utiliser avec une adresse qui, jointe à un instinct sûr, lui permet de personnifier de nombreux rôles romantiques, particulièrement Pelléas, qu'il chante pour la première fois lors de la création au Metropolitan de Pelléas et Mélisande de Debussy, le 21 mars 1925 (et en dernier lieu lorsqu'il fait ses adieux à cette scène, le 20 mars 1935), Canio (I Pagliacci), Roméo (Roméo et Juliette) et Don José (Carmen). Il participe aussi à la création de deux opéras de Deems Taylor : The King's Henchman (17 février 1927) et Peter Ibbetson (7 février 1931).

Administrateur d'opéra de 1935 à 1950

En mai 1935, Johnson succède à Herbert Witherspoon comme directeur général du Metropolitan. Les 15 années de son mandat sont jalonnées de problèmes encore jamais vus, comme les exigences grandissantes des syndicats, les impôts toujours croissants et la Deuxième Guerre mondiale. Les succès et les échecs de son administration sont amplement relatés dans la monumentale histoire du Metropolitan d'Irving Kolodin. Cependant, aucune évaluation, si sommaire soit-elle, ne saurait passer sous silence le fait que c'est lui qui enrichit la troupe d'artistes aussi appréciés que Pierrette Alarie, Licia Albanese, Jussi Björling, Raoul Jobin, Robert Merrill, Zinka Milanov, Jan Peerce, Bidú Sayão, Eleanor Steber, Giuseppe di Stefano, Risë Stevens, Richard Tucker, Leonard Warren et Ljuba Welitsch, Grâce à Johnson, les abonnés du Metropolitan ont l'occasion d'entendre pour la première fois des chefs-d'oeuvre tels qu'Alceste de Gluck, L'Enlèvement au sérail de Mozart, Peter Grimes de Britten et Khovanschina de Moussorgsky.

Retour au Canada

Après sa retraite du Metropolitan (1950), Johnson revient au Canada. Même s'il acquiert la citoyenneté américaine en 1922, ses liens avec le Canada demeurent étroits, comme en témoigne sa nomination au poste de président du conseil d'administration du Conservatoire royal de musique de Toronto (poste qu'il assume jusqu'en 1959). C'est lui qui incite des musiciens de réputation internationale tels que Gina Cigna, Irene Jessner et Boyd Neel à venir y enseigner. De plus, il contribue à mettre sur pied l'Edward Johnson Music Foundation qui parraine le Festival du printemps de Guelph. À sa mort, son nom est donné au nouvel édifice de la faculté de musique de l'Université de Toronto et à sa bibliothèque où les documents personnels de Johnson sont conservés.

Enregistrements

Les enregistrements de Johnson sont peu nombreux. Les 10 premiers (incluant des extraits d' Andrea Chénier et de Parsifal) sont des disques Columbia européens que l'on croit réalisés en Italie vers 1915. Entre 1919 et 1928, il enregistre de nombreux disques chez Victor (É.-U.), la plupart des ballades à la mode, mais également des airs de Carmen, I Pagliacci, La Bohème, Fedora et l'air « If, with all your hearts » d' Elijah de Mendelssohn, l'un de ses meilleurs enregistrements, gravé en 1920. (Se référer à The Tenor of His Time pour la discographie.) Depuis quelques années, des enregistrements de représentations intégrales de Pelléas, Peter Ibbetson et Merry Mount de Hanson, captées à la radio, circulent en tirage limité. Ses enregistrement sont repiqués sur Met stars in the New World (MET 216CD, 1992), RCA/Met singers, 100 years (RCA Red Seal 09026-61580-2, 1984) et Les grandes voix du Canada vol. 2 (Analekta AN 2 7802, 1993).

À Guelph (Ont.), une plaque commémorative rappelle la vie et la carrière de Johnson. En 1992, ses archives sont déposées à la bibliothèque de l'Université de Guelph.

Bibliographie

« Great Canadian tenor gives home-coming recital in Guelph », Canadian Music Trades Journal, XX (avril 1920).

« Edward Johnson and his musical task », Musical Canada, XVI (oct. 1920).

« The Carreer of Edward Johnson », Musical Canada, s.n., I (déc. 1920).

Isabel C. ARMSTRONG, « A chat with Edward Johnson », Musical Canada, s.n., IV (mai 1923).

John NELSON, « Canadian star shines for the world », Maclean's (15 oct. 1925).

Oscar THOMPSON, « Two singers who became managers », The American Singer (New York 1937).

« Edward Johnson : Johnson-Di Giovanni-Johnson : the three-fold career of a Canadian tenor », Record News, II (févr. 1958).

Nathaniel A. BENSON, « Edward Johnson », Canadian Music Journal, II (print. 1958).

Arnold WALTER, « In memoriam », Canadian Music Journal, III (été 1959).

Eugene BENSON, « Edward Johnson », Opera Canada, IX (mai 1968).

Ruby MERCER, The Tenor of His Time (Toronto 1976).

John E. RUTHERFORD, « Edward Johnson and Raoul Jobin on CD », Antique Phonograph News (nov.-déc. 1993).