Louis Edouard Deveau, O.C., O.N.S., P.ENG, LL.D. (hon.), homme d’affaire et avocat (né le 13 octobre 1931 à Salmon River, comté de Digby, en Nouvelle-Écosse). Louis Deveau est le fondateur de Les Algues acadiennes ltée, une compagnie qui se spécialise dans la culture et la transformation d’algues destinées à l’agriculture, l’élevage des animaux et la consommation humaine. (Voir aussi Aquaculture; Biotechnologie.) Louis Edouard Deveau est devenu une figure dominante de l’industrie moderne de la culture des algues et est reconnu pour ses contributions à la recherche et au développement durable dans le domaine. Récipiendaire de nombreux prix et distinctions, il est aussi bien connu pour les efforts qu’il a faits tout au long de sa vie pour soutenir et promouvoir la culture acadienne et l’éducation française en Nouvelle-Écosse (voir Français acadien; Langue française au Canada).
Jeunesse et formation
Louis Deveau a confié que son intérêt pour les affaires et pour les algues lui a été transmis par ses parents. Sa mère, Marie Madeline (née Deveau) vend des œufs de sa petite ferme familiale dans un commerce installé dans le salon de leur maison. Lorsque commence enfin la construction d’une route pavée pour desservir leur région isolée de Nouvelle-Écosse, elle offre le gîte et le couvert aux ouvriers de voirie. Enfant, Louis Deveau regarde son père Alphonse, le forgeron du village, conduire ses bœufs jusqu’à la rive de la Baie de Fundy (voir Ouvrage de forge). Son père récolte des algues, que les Acadiens appellent goémon de roche, dans la zone intertidale. Ces algues servent d’engrais pour le jardin familial. Le jeune Louis Deveau est convaincu que les algues ont des propriétés magiques pour fertiliser la terre.
Louis Deveau grandit en français dans une province où, à l’époque, l’école publique est offerte seulement en anglais. (Voir aussi Nouvelle-Écosse.) Il fréquente l’école primaire anglaise, puis fait ses études secondaires et collégiales en français au Collège Sainte-Anne (aujourd’hui Université Sainte-Anne) à Pointe-de-l’Église, une école privée administrée par un ordre de prêtres français. Au début des années 1950, il déménage à Halifax où il étudie à l’Université St. Mary puis au Nova Scotia Technical College, où il obtient un diplôme en génie mécanique en 1957.
Faits saillants de carrière
Ministère des Pêches et des Océans
Dans les années 1960, Louis Deveau occupe un poste dans le service du développement industriel du ministère des Pêches et des Océans. Son rôle est de trouver et développer de nouvelles possibilités économiques pour la côte est du Canada. Alors qu’il visite une usine de transformation de poisson à Chéticamp, un village acadien de la côte ouest de l’île du Cap Breton, Louis Deveau croit sentir du homard en train de bouillir, mais un administrateur de l’usine lui apprend qu’il s’agit de crabe. À l’époque, le crabe est considéré comme une espèce nuisible, et souvent rejeté à la mer après avoir été pris dans des équipements de pêche aux poissons de fond ou au homard. Mais Louis Deveau sait que le crabe roi de l’Alaska est une importante pêcherie de la côte ouest. Il engage des experts pour lancer ce que nous appelons aujourd’hui l’industrie du crabe des neiges, aujourd’hui la deuxième plus importante pêcherie de la côte est du Canada. (Voir aussi Pêches au Canada : homards, crabes et crevettes.) En 2017, la valeur des ventes de crabe des neiges était évaluée à près d’un milliard de dollars au quai.
Au ministère des Pêches et des Océans, Louis Deveau est aussi chargé de moderniser la récolte d’algues dans la région. Il organise des projets pilotes au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et à l’Île-du-Prince-Édouard. Un important acheteur de Mousse d’Irlande, Marine Colloids of Rockland, du Maine, est tellement impressionné par la motivation et les capacités de Louis Deveau qu’il décide de l’engager pour diriger ses opérations canadiennes en 1967.
Marine Colloids
Louis Deveau accomplit avec succès la modernisation des opérations canadiennes de Marine Colloids et joue bientôt un rôle plus important dans les entreprises internationales de la compagnie. Au Mexique, il travaille avec les récoltants d’algues pour accroître leur productivité. Pour y parvenir, il transfère la propriété de la ressource aux travailleurs, ce qui les motive à en récolter davantage pour augmenter leurs revenus.
Aux Philippines, il doit relever un défi plus exigeant. Au départ, on l’a envoyé pour qu’il détermine s’il y a lieu de mettre fin complètement aux opérations. Les activités de récolte de la compagnie sont basées dans les îles du sud, qui sont alors le théâtre de soulèvements parmi la population majoritairement musulmane. Louis Deveau doit circuler sous la protection de gardes armés et atterrit à plusieurs reprises sur des pistes d’herbe bordées de sacs de sable. Travaillant auprès de petites fermes opérées par des familles musulmanes, il utilise les nouvelles recherches pour enseigner aux propriétaires à cultiver les algues, plutôt que de recueillir des algues sauvages. Comme au Mexique, il offre aux travailleurs de meilleurs incitatifs financiers. Une fois de plus, son approche est couronnée de succès. Quand Jim Meek, l’auteur de sa biographie Cultivating Success (2021), lui demande de lui expliquer son succès au Mexique et aux Philippines, Louis Deveau lui donne cette réponse rapide : « I managed like a Canadian. » (Je l’ai fait à la manière canadienne.)
Les Algues acadiennes ltée
Louis Deveau acquiert les actifs canadiens de Marine Colloids en 1980. La même année, il lance Les Algues acadiennes ltée, dirigeant l’entreprise depuis la chambre à coucher de son fils, Jean-Paul, qui est parti étudier à l’université.
Durant ses premières années d’activité, Les Algues acadiennes dépend d’un acheteur unique, Marine Colloids, l’ancien employeur de Deveau. Ceci présente un risque financier manifeste. Selon l’entente d’achat, la firme basée dans le Maine a le droit d’acheter toute la production de Les Algues acadiennes, mais aucune obligation d’en acheter la moindre part. Louis Deveau s’empresse de parcourir l’Europe à la recherche de nouveaux marchés pour la mousse d’Irlande, qui en 1980 est principalement utilisée en comme additif alimentaire.
Son objectif à plus long terme est de transformer la production d’algues en une industrie fondée sur la science et le développement de produit. Avec le temps, Les Algues acadiennes construit sa propre usine d’extraction et vend ses produits sur le marché en pleine croissance des engrais fabriqués à partir d’algues (ou bio-stimulants). L’entreprise mène aussi un projet de recherche de plusieurs dizaines d’années afin de cultiver des algues alimentaires pour le marché japonais. Les Algues acadiennes réussit à satisfaire les standards très élevés du Japon pour les algues alimentaires, dans son centre de culture de 100 acres situé dans une région rurale de Nouvelle-Écosse.
Affirmer que les engrais à base d’algues ont des propriétés magiques est une chose. Louis Deveau en a apporté la preuve, travaillant en étroite collaboration avec des scientifiques indépendants d’universités et d’instituts de recherche, et publiant les résultats dans des revues à comité de lecture. Il a aussi recruté pour Acadia une équipe de chercheurs de pointe. Aujourd’hui, la compagnie cultive des algues de manière durable dans plusieurs pays, et exporte ses produits dans plus de 80 pays (voir Développement durable).
Louis Deveau a cédé la présidence de la compagnie à son fils Jean-Paul en 2002. Père et fils ont tous deux dirigé la spectaculaire croissance de la compagnie. Entre 1980, l’année de sa fondation, et 2020, les revenus ont augmenté au centuple.
Vie personnelle et engagement communautaire
Louis Deveau épouse sa femme Fedora (née Robichaud) le 14 octobre 1957. Ensemble, ils élèvent cinq enfants (Jean-Paul, Louise, Michelle, Nicole et Monique). Les Deveau s’engagent bénévolement dans de nombreuses organisations. Fedora recueille des fonds pour la recherche sur le cancer et aide directement des familles immigrantes par l’intermédiaire de l’Église catholique (voir aussi Immigration au Canada; Catholicisme au Canada). Louis Deveau contribue à des organisations commerciales et fait une apparition à la piscine locale pour aider l’équipe de nage de sa fille.
Outre le bénévolat et les dons caritatifs, les Deveau s’engagent pour la promotion et la conservation de l’éducation francophone et de la culture acadienne en Nouvelle-Écosse (voir Français acadien; Langue française au Canada). Frustrés du fait que leurs enfants ne puissent recevoir une éducation en français dans le système d’école publique de Nouvelle-Écosse, Fedora et Louis Deveau défendent toute leur vie les programmes d’immersion française et de langue française dans les écoles. Ils sont à l’avant-garde d’une transformation culturelle. À partir des années 1970, ils contribuent à ouvrir une ère où la culture française est non seulement adoptée mais intégrée au système d’école publique de Nouvelle-Écosse. Aujourd’hui, l’enseignement en français et l’immersion française sont offerts dans les écoles de la province. En 2013, Louis Deveau est reçu membre de l’Ordre de la Pléiade de la francophonie, en reconnaissance de sa contribution à l’éducation et la culture francophones au Canada.
Louis Deveau consacre aussi beaucoup de temps à son alma mater, l’Université Sainte-Anne (autrefois Collège Sainte-Anne), la seule université francophone de Nouvelle-Écosse. En 1971, il est nommé au premier conseil d’administration laïc de l’université après qu’un ordre de prêtres français ait mis fin à sa longue administration de l’administration. Entre 2006 et 2012, il est chancelier de l’université. À l’âge de 90 ans, Louis est toujours conseiller d’Allister Surette, le président de l’Université Sainte-Anne. Un centre d’affaires du collège porte le nom de Louis en son honneur.
Prix et distinctions
- Doctorat honorifique, Université Sainte-Anne(1994)
- Doctorat honorifique en droit, Université Dalhousie/Nova Scotia Agricultural College (2002)
- Officier, Ordre du Canada (2004)
- Membre honoraire, Nova Scotia Institute of Agrologists (2004)
- Prix honoraire pour l’œuvre d’une vie, Association aquicole du Canada 2005)
- Chancelier de l’Université Sainte-Anne, Nouvelle-Écosse (2006)
- Doctorat honorifique en commerce, Université St. Mary (2006)
- Ordre de la Pléiade (2013)
- Ordre de la Nouvelle-Écosse (2015)