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Max Stern

Max Stern, C.M., marchand d’œuvres d’art, galeriste (né le 18 avril 1904 à München-Gladbach [aujourd’hui Mönchengladbach], en Allemagne; décédé le 28 mai 1987 à Paris, en France). Max Stern était un marchand d’œuvres d’art et un galériste juif. Il a fui les persécutions nazies en Allemagne avant la Deuxième Guerre mondiale. À la fin des années 1940, sa femme et lui possédaient la prestigieuse Galerie Dominion à Montréal. C’était l’une des premières galeries à promouvoir les artistes canadiens. Vers la fin de sa vie, Max Stern a passé une grande partie de son temps à rechercher les œuvres d’art ayant appartenu à sa famille. Ces efforts se poursuivent par le biais du Max Stern Art Restitution Project.

Jeunesse et famille

Max Stern naît en Rhénanie allemande en 1904 de Julius Stern et de Selma Heilbron. Julius Stern est un important collectionneur d’art et galeriste juif- allemand. Il possède l’une des plus importantes galeries de Düsseldorf. Max est le plus jeune enfant du couple et a deux sœurs aînées : Gerda et Hedi.

Max Stern étudie l’histoire de l’art dans plusieurs villes européennes, notamment à Berlin et à Vienne. Il obtient son doctorat à l’université de Bonn en 1928. Cette même année, il commence à travailler à la galerie d’art de son père, la Galerie Julius Stern. Il hérite de l’entreprise de son père à la mort de celui-ci en 1934. À cette époque, les lois antisémites de l’Allemagne nazie l’empêchent d’être viable.

Persécution sous le régime nazi

Environ 10 mois après la mort de son père Julius, Max Stern reçoit une lettre l’informant de la perte de son accréditation en tant que commerçant d’œuvres d’art. Il ne dispose que de quatre semaines pour vendre les actifs de la galerie. Il tente de contester l’affaire devant les tribunaux, puis essaie de trouver quelqu’un à qui transférer ses biens. En 1936, il réussit à ouvrir une galerie à Londres, en Angleterre, avec un ami et sa sœur, mais il reste à Düsseldorf pour liquider la propriété. En 1937, il vend sa collection aux enchères. Il espère que le produit de la vente l’aidera à se relancer à Londres, mais ce n’est pas le cas. Après avoir quitté définitivement l’Allemagne en 1937, ses avoirs sont gelés. Un an plus tard, il est contraint de les donner aux nazis pour obtenir un visa de sortie pour sa mère.

Camps d’internement pour les Canadiens

En mai 1940, Max Stern est interné sur l’île de Man en tant qu’étranger ennemi. Il obtient ensuite la permission d’émigrer au Canada, où son internement se poursuit pendant deux autres années, d’abord au Nouveau-Brunswick puis au Québec. (Voir aussi Camps de prisonniers de guerre au Canada.) Au camp du Nouveau‑Brunswick, Max Stern est payé 20 cents par jour pour abattre des arbres. Il donne également des leçons d’art à d’autres réfugiés.

L’internement de Max Stern est levé grâce à l’intervention de William Birks, un descendant de la famille de bijoutiers Birks. (Voir Henry Birks.) William Birks critique vivement les politiques antisémites du Canada en matière d’immigration et de réfugiés. (Voir aussi None Is Too Many; Paquebot Saint Louis.)

Un interné juif

Vente d’artistes canadiens aux Canadiens

Max Stern s’installe ensuite à Montréal. Il espère d’abord trouver du travail dans l’industrie aéronautique en temps de guerre, mais se concentre plutôt sur ce qu’il connaît le mieux : la vente d’œuvres d’art. Il n’a qu’une seule idée : vendre des œuvres d’artistes canadiens à des Canadiens, ce qui est inhabituel à l’époque. Rose Millman, qui ouvre la Galerie Dominion sur la rue Sainte-Catherine, à Montréal, en décembre 1941, accepte la vision de Max Stern et lui offre un emploi.

Max Stern devient directeur général de la Galerie Dominion en octobre 1942. En 1944, il devient le partenaire commercial de Rose Millman. L’exposition inaugurale de la galerie en 1943 présente les œuvres de Goodridge Roberts. C’est la première d’une série d’expositions consacrées exclusivement aux artistes canadiens.

En 1944, la galerie expose des œuvres du Groupe des Sept et d’Emily Carr, alors très peu connue. Max Stern visite Emily Carr à Victoria en 1944 et est émerveillé par son talent. Il choisit 60 tableaux à diverses étapes de sa carrière et les apporte à Montréal. La peintre ne croit pas qu’il réussira à en vendre une seule, mais l’exposition remporte un vif succès. En recevant le chèque de la Galerie Dominion, Emily Carr aurait dit n’avoir jamais vu autant d’argent de sa vie. Elle meurt l’année suivante, laissant à Max Stern le rôle d’agent de sa succession.

« Big Raven »

Max Stern ne se contente pas de vendre de l’art canadien, il soutient également directement les artistes canadiens. La Galerie Dominion est la première au Canada à offrir aux artistes des revenus garantis afin qu’ils puissent se consacrer à leur art.

En 1946, Max Stern épouse Iris Westerberg, qui lui a été présentée par William Birks. L’année suivante, le couple achète la Galerie Dominion à Rose Millman. En 1950, il déménage la galerie dans une maison en rangée en pierre grise dans la rue Sherbrooke, près du Musée des beaux-arts de Montréal. Elle y demeure jusqu’à sa fermeture en 2000.

Max Stern Art Restitution Project

Max Stern demande aux exécuteurs de sa succession de garder la Galerie Dominion ouverte après sa mort en 1987, avant d’entamer le processus de liquidation de ses biens. À cette époque, il est notoire que l’Allemagne nazie a volé d’énormes quantités de biens et d’objets culturels aux Juifs dans toute l’Europe. La plupart des œuvres d’art volées ont été vendues et revendues plusieurs fois. Les survivants de l’Holocauste recherchent les œuvres d’art qui leur ont été volées, ainsi qu’à leurs familles, cinq ou six décennies plus tôt.

Dans un tel contexte, la provenance de la collection européenne de Max Stern est soigneusement analysée dès 1999. À l’époque, on ne sait pas que Max Stern est le fils de Julius Stern, ni qu’il a dirigé la Galerie Stern de Düsseldorf. Les enquêteurs découvrent que Max Stern est en contact avec nul autre que Lester B. Pearson après la guerre. De son vivant, Max Stern tente de récupérer 22 tableaux de sa collection. Il ne croit probablement pas pouvoir récupérer la vaste collection qu’il a été contraint de vendre aux enchères en 1937. En effet, malgré un intérêt international croissant pour la récupération d’œuvres volées, confisquées ou vendues de force, l’aspect juridique de la restitution reste obscur.

Depuis 2002, le Max Stern Art Restitution Project tente de retrouver les œuvres d’art précédemment détenues par la Galerie Stern de Düsseldorf, que Max Stern a été contraint de vendre aux enchères par les nazis. Le projet est soutenu par l’Université Concordia, l’Université McGill et l’université hébraïque de Jérusalem. Max Stern tente, sans grand succès, de récupérer ces œuvres après la Deuxième Guerre mondiale. Le projet de restitution vise à utiliser les recettes de son entreprise pour réinvestir dans la restitution d’autres œuvres d’art. Jusqu’à maintenant, plus de 200 peintures ont été identifiées comme manquantes dans la collection, et plus de 30 ont été récupérées.

Distinctions et héritage

Pendant de nombreuses années, Max Stern est apparemment le seul directeur de galerie d’art au Canada à détenir un doctorat en histoire de l’art. En plus de promouvoir sans relâche l’art et les artistes canadiens, il contribue également à populariser davantage les sculptures d’Henry Moore et d’Auguste Rodin. À un moment donné, Max Stern possède la plus grande collection d’œuvres de Rodin à l’extérieur du Musée Rodin à Paris. Comme il n’a pas d’enfants, il lègue la plus grande partie de sa collection à des institutions canadiennes.

Max Stern est nommé Membre de l’Ordre du Canada en 1984. En 1985, il reçoit un diplôme honorifique de l’Université Concordia.