Allen Lucky Lucas (source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

Allen Lucky Lucas (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.


M. Allen Lucas à Belleville, ON, février 2010.
Tous ces Allemands étaient alignés le long de la route avec toutes ces armes. Et ils donnaient aux Canadiens les bouteilles de rhum qui leur restaient.

Transcription

J’ai fait une formation de chauffeur là-haut à Woodstock [Ontario] pendant un mois, et puis de là, ils m’ont renvoyé en Nouvelle Ecosse et directement sur le bateau pour l’Angleterre. C’était la nuit de Noël, je suis arrivé en Angleterre avant qu’on, sept jours sur le bateau. Et j’ai été malade tout le long, sept jours. Je ne croyais même pas que le bateau allait arriver un jour de l’autre côté. Bon, je devais prendre les messages à l’arrière du convoi et les apporter à l’avant parce qu’en général, de nombreuses fois, la radio ne marchait pas correctement et il y avait un tas de parasites et de trucs dessus. Alors vous deviez porter le message en motocyclette. On devait se faufiler entre les camions et les tanks et les trucs comme ça et à cet endroit là où on est arrivés, en Hollande, le porteur passe le coin et il lançait des briques, ou quelque chose comme ça, et les empilait le long de la route. Et je devais descendre en passant à travers. Et quand je suis arrivé en bas, je ne croyais pas que j’allais y arriver, mais je suis passé au travers, suis arrivé à la tête du convoi, ai pris le message, et il dit : Tu peux repartir maintenant. » Je dis : « Merci beaucoup. » Bon, j’ai attendu un moment jusqu’à ce que les choses se calment un peu et puis j’ai, je les ai enlevés et suis retourné à l’arrière. Bon, on a traversé, on était le passage le plus important, et quand je suis allé dans mon régiment, on a traversé le Rhin sur ces vieilles embarcations à flotteurs avec des blocs moteurs Chrysler à l’arrière. On est passés au milieu et le moteur est tombé en panne et il y a un gars qui revient, il était à vide et le sergent lui a fait un signe pour qu’il vienne et nous remorque. Et le gars allait dans cette direction ici et le sergent a commencé à en avoir marre et il a sorti son pistolet mitrailleur et il l’a pointé et il a dit que s’il ne venait pas il allait le descendre. Et le gars, il est allé comme ça et puis il est venu. Et il a continué à brailler « Attrape ce bateau, attrape le bateau ! » Alors, et on a pris le bateau et ensuite ils nous ont remorqués. Et on est arrivé vers le rivage, et quand on a été assez proche du rivage il a hurlé « Sortez, sortez, sortez ! » On était à peu près seize dans le bateau. Et quoiqu’il en soit on a sauté du bateau et on s’est retrouvé avec de l’eau jusque là. Et quand vous avez votre fusil de neuf livres et une bonne quantité de vos munitions là, je ne savais pas si j’allais arriver jusqu’au rivage ou non. Et malgré tout, le gars derrière moi m’a donné de l’élan deux fois et je suis remonté. On est montés jusqu’en haut, on a regardé par-dessus le sommet et ici, l’artillerie avait un accès direct sur l’emplacement des mitrailleuses de l’autre côté. Il y avait quatre allemands morts allongés sur le sol. Alors on a eu de la chance parce que si on avait jeté un coup d’œil pendant qu’ils étaient, qu’ils avaient la mitrailleuse en marche, on aurait tous été descendus direct. Mais quoiqu’il en soit on est montés là-haut et on est passé à travers ça. Et ensuite il nous a fallu creuser et attendre que le régiment suivant traverse, quand on l’a eu fait et quand on a eu terminé là, il nous a fallu creuser notre tranchée et c’est là qu’on est restés pour la nuit. J’avais un copain dans la compagnie d’appui avec qui j’étais allé à l’école. Alors je dis : « Je crois que je vais me faufiler jusque là pour voir comment il se débrouille. » Et je venais d’arriver là-bas et un obus avait éclaté juste sur le côté de la tranchée, il était assis là et ça l’a enterré. Je parlais avec deux autres copains et il a dit : « Et bien, on l’a sorti de là mais ses nerfs ont lâché. » Il avait eu… Ils l’avaient sorti. Alors je ne l’ai pas vu, je n’ai pas pu le voir. Et j’ai dû repartir sur mes pas furtivement. Et puis la guerre s’est terminée et puis on est allés, on est entrés dans cette ville allemande et les allemands avaient entassé toutes leurs armes le long de la route. Et beaucoup de gars étaient descendus des bateaux là-bas. Et ils étaient ici, les canadiens qui marchaient, et puis il y a tous ces allemands, debout le long de la route avec toutes ces armes. Et il faisaient passer un peu du rhum qu’ils avaient aux canadiens. Les canadiens buvaient leur rhum. Alors on est entrés là dedans et ensuite on repart et le régiment est revenu après la guerre et on est retournés en Hollande et on m’a renvoyé chez moi.