Project Mémoire

Ann Styles (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Ann Styles a servi dans la Marine royale canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lisez et écoutez le témoignage d'Ann Styles ci-dessous.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

Médaille de la guerre 1939-1945 remise à Ann Styles pour avoir servi dans la Marine pendant la Deuxième Guerre mondiale
Ann Styles dans son uniforme du WRNS (Women’s Royal Naval Service) en 1942.
Fête de Noël au mess du WRNS de l’établissement à terre du HMS (Navire de sa Majesté) « Lizard », 1942.
Papier à lettres avec en-tête du HMS « Lizard », vers 1942.
Bandeau de tête en soie noire de l’uniforme du HMS d’Ann Styles, vers 1942.
J’ai souvent dit que mon plus vif souvenir de la guerre était de n’avoir jamais eu peur. Je crois que j’étais trop jeune et insouciante pour m’inquiéter de ma propre sécurité.

Transcription

Je m’appelle Ann Styles. C’est sous mon nom de jeune fille de Lucas que j’ai servi dans la Marine royale, en Grande-Bretagne, pendant deux années et demi. J’ai principalement servi dans un établissement à terre. Tous les établissements navals étaient baptisés de noms de bateaux (rires), comme s’ils étaient de vrais navires. Mais bon, c’était des locaux de la Marine royale. J’étais pour ma part dans le « Navire de sa Majesté » Lizard (HMS Lizard), sur la côte Sud de l’Angleterre. C’était une zone très vulnérable aux bombardements aériens et il y avait souvent des raids, de jour comme de nuit. J’occupais un emploi de bureau, et cela semble peu prestigieux mais en fait, c’était très important. Je devais autoriser les hommes à partir en mer et j’étais chargée de l’approvisionnement des navires en fournitures et papier, mais aussi en hommes. Les navires endommagés devaient évidemment être réparés et ils étaient toujours en manque de quelque chose à leur retour, et nous devions tout leur procurer, du charbon de Newcastle, de la nourriture ou des fournitures médicales. Nous acheminions les demandes partout où l’on pouvait nous approvisionner et nous assurions que tout soit bien expédié. Il faut se rappeler que c’était bien avant l’informatique et que nos instructions nous parvenaient par courrier ou par transmissions. Nous devions aussi appeler par courrier ceux qui pouvaient servir sur les navires ayant perdu des effectifs en mer. Il fallait bien remplacer ceux qui avaient été tués, et nous devions veiller à ce qu’ils soient du bon rang. Autrement dit, si on avait besoin d’un cuisinier, il ne servait à rien d’envoyer un artilleur. Nous devions aussi recruter du personnel médical et tout le monde qui servait à bord. L’une de mes tâches les plus ennuyeuses consistait à mettre à jour les règlements. La nuit, il y avait toujours des raids et l’immeuble qui abritait le WREN (Auxiliaires féminines de la Marine royale britannique) comptait trois étages. J’avais évidemment la « chance » de travailler au troisième. Il n’y avait pas d’ascenseur et à chaque raid, je devais dévaler l’escalier jusqu’au sous-sol, où nous restions confinés jusqu’à la fin des bombardements. Cela pouvait arriver quatre fois au cours d’une même nuit. Et nous reprenions le travail dès le matin. J’ai souvent dit que mon plus vif souvenir de la guerre était de n’avoir jamais eu peur. Je crois que j’étais trop jeune et insouciante pour m’inquiéter de ma propre sécurité. Je me rappelle toutefois avoir été épuisée et avoir eu très faim. Nos rations étaient très maigres et celles qu’on avait étaient très mal cuisinées. Nous aurions eu besoin de mazout (rires), mais il n’y en avait pas assez. Si bien que nous faisions le tour des cantines de l’Armée du salut pendant nos congés ou de tout autre organisme rattaché à l’armée qui pouvait nous offrir à manger.