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Petro-Canada

Petro-Canada

Petro-Canada, société pétrolière nationale fondée par le gouvernement fédéral au milieu des années 1970, est un produit de la crise énergétique mondiale, du NATIONALISME ÉCONOMIQUE canadien et de l'appui traditionnel de l'État à la mise en valeur des ressources énergétiques dans les régions pionnières, dont l'exploitation est fort coûteuse. Petro-Canada participe à des activités en amont (exploration et mise en valeur) et en aval (raffinage et mise en marché) de la ressource. Elle a des intérêts importants dans la production réalisée dans l'Ouest canadien, dans les sables bitumineux de l'Alberta, dans les projets de développement Hibernia et Terra Nova au large de Terre-Neuve, et dans divers emplacements à l'échelle internationale. Elle contrôle près d'un cinquième de l'activité de raffinage de pétrole au Canada et du marché de l'essence (voir INDUSTRIE PÉTROCHIMIQUE). Elle emploie plus de 6000 personnes dans le monde et figure parmi les plus grandes sociétés pétrolières et gazières du Canada.

Histoire

Petro-Canada est fondée au début des années 1970, période où la question de l'énergie suscite un grand débat entre le gouvernement minoritaire libéral TRUDEAU et ses opposants. Trudeau est assailli par les nationalistes et le NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE (NPD), grâce à l'appui duquel il se maintient au pouvoir après les élections fédérales de 1972, à la CHAMBRE DES COMMUNES. L'INDUSTRIE PÉTROLIÈRE est alors majoritairement sous contrôle étranger, principalement américain. L'Arctique canadien commence à attirer des sociétés privées en raison de la découverte récente de pétrole en Alaska, et la POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE du Canada semble s'orienter de plus en plus vers les besoins de l'Amérique du Nord plutôt que vers les besoins intérieurs.

Beaucoup de gouvernements nationaux ont déjà créé des sociétés d'État dans le secteur pétrolier dans le but d'exercer un plus grand contrôle sur l'industrie pétrolière internationale et de mieux en connaître les rouages. De telles sociétés servent à garantir la sécurité d'approvisionnement, à augmenter la perception de recettes et à mieux informer les gouvernements sur les marchés mondiaux de l'énergie. Cependant, leur mise en place s'avère coûteuse et, au fil du temps, elles ressemblent de plus en plus aux entreprises du secteur privé. Le Cabinet Trudeau rejette d'abord l'idée de fonder une société pétrolière d'État pour des raisons de coût et de rendement.

À l'automne 1973, toutefois, les structures mondiales du secteur pétrolier s'écroulent, les prix quadruplent et les principales entreprises pétrolières sont nationalisées dans les pays arabes exportateurs de pétrole du Moyen-Orient. L'incertitude provoquée par des importations de pétrole prolongées force Ottawa à réévaluer sa position. Bien que temporairement exportateur net, le Canada est vulnérable à une interruption de l'approvisionnement en pétrole importé, qui toucherait plus durement le Québec et les provinces de l'Atlantique, et il veut en savoir davantage, de toute urgence, sur le potentiel de production d'énergie de ses régions pionnières (voir PÉTROLE, APPROVISIONNEMENT ET DEMANDE DU). Le NPD menace de défaire le gouvernement minoritaire libéral en Chambre s'il n'agit pas rapidement pour protéger les consommateurs et mettre sur pied une société pétrolière d'État. Des voix plus radicales réclament la NATIONALISATION de toute l'industrie pétrolière et les provinces consommatrices de pétrole appuient fortement une intervention fédérale qui améliorerait la sécurité d'approvisionnement. À la fin d'octobre 1973, le gouvernement Trudeau accepte donc une motion du NPD demandant, entre autres, la création d'une société pétrolière nationale.

La Loi sur la Société Petro-Canada est adoptée en 1975 après un âpre débat à la Chambre des communes et crée une nouvelle SOCIÉTÉ DE LA COURONNE dotée de pouvoirs étendus qui servent à mener des activités d'exploration et de mise en valeur, ainsi que d'un mandat détaillé qui consiste à importer des ressources pétrolières et à s'engager dans la recherche et le développement énergétiques, de même que dans des activités en aval comme le raffinage et la mise en marché. La nouvelle société obtient un budget initial de 1,5 milliard de dollars en capitaux et l'accès préférentiel aux emprunts de capitaux en qualité d'agent de Sa Majesté, ce qui réduit ses coûts de capital. Toutefois, le gouvernement libéral inclut aussi dans la Loi des dispositions qui accordent à Ottawa l'autorité sur le budget des investissements de Petro-Canada et sa stratégie d'entreprise. Il veut ainsi conserver la nouvelle société de la Couronne comme instrument de sa politique et l'empêcher d'agir de son propre chef : il désire que Petro-Canada soit principalement active dans les régions pionnières comme celles où on trouve des sables bitumineux, l'Arctique et les zones situées au large de la côte est, plutôt que dans le secteur déjà développé des hydrocarbures de l'Ouest canadien.

En 1976, dès l'installation de son siège social à Calgary, en milieu hostile, Petro-Canada a comme principal objectif sa croissance, sous la houlette du premier président de son conseil d'administration, Maurice STRONG, ami du premier ministre. L'entreprise privilégie la croissance plutôt que la rentabilité, cette stratégie répond à plusieurs préoccupations d'ordre administratif. Ainsi, la croissance est nécessaire pour que Petro-Canada puisse explorer et mettre en valeur les ressources d'hydrocarbures des régions pionnières sans que ses prises de décision ne dépendent d'Ottawa. De plus, dès le premier jour de ses activités, Petro-Canada est la cible d'une campagne menée par un groupe de pétroliers de droite et par le Parti conservateur fédéral, alors dirigé par Joe CLARK, visant à dissoudre la société. Albertain d'origine, Clark comprend les objections de l'Ouest, mais il sous-estime nettement la force du sentiment nationaliste et l'importance symbolique de Petro-Canada dans le reste du pays.

La menace de Clark de démanteler Petro-Canada au lieu de seulement la privatiser incite les dirigeants de la société de la Couronne à étendre son champ de rayonnement par une série d'acquisitions qui en font un des joueurs les plus importants dans l'industrie, trop important pour qu'un gouvernement songe à le démanteler. Petro-Canada survit à l'éphémère gouvernement conservateur minoritaire dirigé par Clark en 1979-1980, années de la deuxième crise du pétrole, car elle a su lier son destin aux inquiétudes des Canadiens en matière d'approvisionnement, de prix et de propriété de l'énergie. Elle participe à la découverte du grand gisement pétrolier d'Hibernia, au large de Terre-Neuve, et est partenaire dans le projet Syncrude portant sur l'exploitation des sables bitumineux à Fort McMurray, en Alberta. Dans l'esprit de la population, ces deux projets représentent la sécurité et le contrôle national.

En 1980, les libéraux reviennent au pouvoir et lancent le très controversé PROGRAMME ÉNERGÉTIQUE NATIONAL (PEN), qui comprend des projets pour faire de Petro-Canada une entreprise d'aussi grande taille que n'importe quelle multinationale, au dire du ministre fédéral de l'Énergie. Les rôles de la société de la Couronne dans le cadre du PEN sont multiples et coûteux : conseiller le gouvernement, importer du pétrole, accélérer l'exploitation des sables bitumineux, agir comme catalyseur dans l'exploration et la mise en valeur des ressources dans les régions pionnières, percevoir des rentes et autres redevances et favoriser la canadianisation de toute l'industrie pétrolière. Elle doit aussi gérer des actifs importants en aval de la filière énergétique. Tous ces rôles entraînent des dépenses élevées pour des retombées encore lointaines, dépenses qui ne peuvent être justifiées qu'en présumant, comme le croient la plupart des gouvernements, que le pétrole sera une ressource précaire et très coûteuse dans les années 80 et 90.

Cette hypothèse se révèle fausse et, en 1981-1982, l'industrie pétrolière mondiale traverse sa crise la plus grave des 50 dernières années, marquée par la surproduction, la chute des prix et l'engorgement des marchés. Les prix échappent au contrôle des pays exportateurs de pétrole et plongent de plus de 40 dollars le baril à moins de 10 dollars en l'espace de quelques mois. Dans ce contexte de surcapacité, l'idée de maintenir des sociétés pétrolières d'État visant la sécurité d'approvisionnement et tournées vers l'avenir paraît moins convaincante qu'auparavant. Bien avant l'arrivée au pouvoir des conservateurs de Brian MULRONEY, en 1984, Petro-Canada commence à veiller sur ses propres ressources et à élaborer une stratégie axée sur la prudence et les lois du marché pour assurer la gestion de son empire en expansion. Ottawa n'intervient plus dans les politiques de l'entreprise. Petro-Canada se retire de plusieurs projets coûteux dans les régions pionnières et, dans une manœuvre vigoureuse, congédie sans préavis 2000 employés, soit près de 25 p. 100 de son personnel, en réaction à la chute des prix.

Les besoins de Petro-Canada en capitaux propres et le désir des gestionnaires d'être dégagés de l'obligation de servir d'instrument de la politique d'Ottawa conduisent à un dénouement prévisible : la société, qui compte des actifs estimés à 6 milliards de dollars, acquis aux frais des contribuables, doit être privatisée. Une privatisation partielle commence en 1991 lorsque Petro-Canada, qui est inscrite en bourse dans l'ensemble du pays, vend environ 30 p. 100 de ses actions, et continue en 1995 lorsque les actions de la compagnie s'échangent à la Bourse de New York. Depuis, les investisseurs privés ont acquis 81 p. 100 des actions de Petro-Canada, et le gouvernement du Canada conserve les 19 p. 100 qui restent. Étant donné qu'aucun investisseur ne peut détenir à lui seul plus de 10 p. 100 des émissions publiques d'actions, la propriété étrangère est limitée à 25 p. 100 des actions offertes au public (50 p. 100 à compter de 1996 pendant que la limite d'exercice du droit de vote demeure à 25 p. 100) et que le gouvernement fédéral a refusé d'intervenir dans les affaires de Petro-Canada, le contrôle de la société réside maintenant fermement entre les mains des cadres opérationnels.

Au cours des années suivantes, Petro-Canada rationalise ses opérations en vendant sa participation financière dans des immeubles et d'autres actifs jugés non essentiels à la poursuite de ses activités et, parallèlement, en renforçant des secteurs de base, comme avec l'acquisition d'Amerada Hess Canada Ltd en 1996 pour la somme de 735 millions de dollars qui lui permet de gagner des réserves certifiées de pétrole et de gaz dans la transaction.

En 2000, 25e année d'existence de Petro-Canada, la société réalise le bénéfice net le plus élevé de son histoire en déclarant un résultat net de 893 millions de dollars (9,5 p. 100 des revenus), ce qui représente près d'une quadruple augmentation par rapport au bénéfice net de 233 millions de dollars (3,8 p. 100) enregistré l'année précédente.

En mai 2002, Petro-Canada effectue le plus gros achat qu'elle ait réalisé à ce jour : l'acquisition de la majorité des opérations pétrolières et gazières internationales de Veba Oil GmbH pour la somme de 3,2 milliards de dollars, ce qui lui permet pratiquement de doubler sa production quotidienne de barils de pétrole.

La volonté du gouvernement canadien de réduire davantage sa participation sur le marché, et ainsi celle des contribuables, occasionne la vente de ses actions restantes, soit 19 p. 100, en septembre 2004 pour presque 3,2 milliards de dollars, conduisant à une conclusion heureuse de la privatisation commencée en 1991.

En mars 2009, Petro-Canada et Suncor, une société canadienne de mise en valeur et d'exploration pétrolière qui emploie environ 6500 personnes, annoncent leur intention de fusionner leurs activités dans une transaction qui ferait augmenter les revenus totaux à 54,6 milliards de dollars (43,4 milliards de dollars américains).

Opérations

Petro-Canada est une société pétrolière et gazière intégrée qui se consacre à des activités en amont et en aval de la ressource. Dans la partie en amont de ses affaires, elle a des intérêts importants dans l'exploration et la production réalisées à l'échelle canadienne et internationale, qui incluent, parmi d'autres, les installations de production de Terra Nova et d'Hibernia situées au large de la côte est du Canada, divers projets de sables bitumineux au Nord de l'Alberta et différents emplacements dans la mer du Nord.

Dans le cadre de l'exercice 2003, la société déclare des produits d'exploitation record de 27,6 milliards de dollars et un bénéfice net de 3,1 milliards (11 p. 100 des revenus). Ses activités en amont (raffinage, mise en marché et distribution) contribuent à 59 p. 100 des revenus alors que le reste provient de ses opérations en aval, qui sont regroupées comme suit : gaz de l'Amérique du Nord, pétrole de la côte est, sables bitumineux et opérations internationales.

À la fin de 2008, Petro-Canada produit plus de 418 000 barils de pétrole par jour, en pétrole brut ou l'équivalent et en gaz naturel, dont à peine plus du tiers provient de ses activités à l'étranger. Sa production de gaz naturel totale dans le monde en 2008 atteint 706 millions de pieds cubes par jour, 83 p. 100 de ce nombre provenant de sources canadiennes.

Parmi ses activités en aval, qui représentent deux tiers des affaires de la société, Petro-Canada exploite deux raffineries, situées à Edmonton et à Montréal, et une usine de lubrifiants située à Mississauga, en Ontario. Dans l'ensemble du pays, la société a un vaste réseau de points de vente au détail au nombre de 1323 en 2008, 60 p. 100 d'entre eux se situent en Ontario et au Québec, tandis que la majorité de ses 233 relais routiers sont situés dans les quatre provinces les plus à l'ouest du Canada.

Travail communautaire

L'ancienne société de la Couronne aide activement la communauté et est reconnue pour son appui au relais du flambeau olympique menant aux Jeux olympiques de Calgary de 1988. Le produit de la vente des marchandises lors de cet événement a été utilisé pour créer le Fonds de bourses d'études du flambeau olympique qui, depuis 1988, a versé plus de 6 millions de dollars à 2000 athlètes et entraîneurs canadiens. Elle est aussi un des principaux donateurs aux mesures de perfectionnement des athlètes amateurs en préparation des Jeux olympiques de 2010.

Consciente de l'impact de ses opérations d'exploration et de production auprès des communautés autochtones, la société crée une équipe responsable des relations avec les autochtones en 2001 pour mieux comprendre les besoins et les vulnérabilités des Premières nations du Canada. L'un des résultats clés de cette démarche est la création du poste de directeur des affaires autochtones qui supervise les efforts de la société à cet égard, y compris la nomination de conseillers provenant de la communauté autochtone pour aider la société à mettre en œuvre ses projets.

Les activités d'exploration et de production de Petro-Canada, de par leur nature, ont une incidence sur l'environnement, réalité que la société reconnaît et dont elle tient compte depuis longtemps, par exemple en combinant ses forces à celles du Pembina Institute for Appropriate Development pour créer l'Éco-fonds de l'Alberta. Dans le Canada atlantique, Petro-Canada est le principal organisme du secteur privé participant à l'Équipe de conservation de Terre-Neuve et du Labrador, qui effectue des évaluations énergétiques dans les résidences et essaie de sensibiliser les gens au changement climatique.