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Politique au Manitoba

Lors des élections provinciales du Manitoba le 3 octobre 2023, Wab Kinew et le Nouveau Parti démocratique (NPD) ont remporté un gouvernement majoritaire avec 34 sièges. Wab Kinew, un anichinabé de 41 ans, est devenu le premier membre des Premières Nations à être élu premier ministre d’une province canadienne. Le Parti progressiste-conservateur a été réduit de 36 à 22 sièges, tandis que le Parti libéral a gagné un siège. La lieutenante-gouverneure est Anita R. Neville.

Armoiries du Manitoba

Structure du gouvernement provincial

Le gouvernement provincial du Manitoba compte 57 sièges. Chaque siège est occupé par un député élu par vote dans sa circonscription électorale. Les frontières des 57 circonscriptions de la province sont tracées pour que chacune d’entre elles comprenne de 250 à 400 électeurs. Des élections provinciales générales sont tenues tous les quatre ans le premier mardi du mois d’octobre. Si le parti au pouvoir le juge avantageux, il arrive que des élections soient tenues avant cette date. Si le parti au pouvoir détient une minorité de sièges, des élections peuvent avoir lieu avant la fin du mandat de quatre ans, advenant que le parti minoritaire perde la confiance de l’Assemblée.

À l’instar des autres provinces, le Manitoba fonctionne selon un système électoral uninominal, ce qui signifie que le candidat ayant obtenu le plus grand nombre de votes dans chaque circonscription l’emporte. Habituellement, le parti ayant obtenu le plus grand nombre de sièges forme le gouvernement, et le chef de ce parti devient premier ministre. Toutefois, un parti ayant obtenu moins de sièges peut également former une coalition avec les membres d’un autre parti ou de plusieurs autres partis pour former le gouvernement.

En théorie, en tant que représentant de la reine, le lieutenant-gouverneur occupe la fonction politique la plus importante de la province; dans les faits, toutefois, son rôle est en grande partie symbolique. (Voir aussi Premiers ministres du Manitoba; Lieutenants-gouverneurs du Manitoba.)

Le premier ministre choisit habituellement les membres du Cabinet parmi les députés du parti au pouvoir. Les membres du Cabinet ont le titre de ministre et sont chargés de dossiers spécifiques, tels que les finances, la santé ou l’éducation.

Premier gouvernement

Le 15 mars 1871, l’Assemblée législative du Manitoba se réunit pour la première fois. Elle comprend alors 12 députés élus dans des circonscriptions anglophones et 12 dans des circonscriptions francophones, un conseil législatif et un conseil exécutif nommés pour appuyer le chef du gouvernement, le lieutenant-gouverneur Adams G. Archibald.

Depuis 1871, la province est passée d’une représentation électorale de type communal à une représentation électorale axée sur la répartition de la population, et d’un gouvernement non partisan à un gouvernement constitué par un parti politique élu.

De la fin des années 1800 au début des années 1900

Tandis que le concept de gouvernement responsable fait son chemin pendant les années 1870, la loyauté des commettants va plutôt à leurs collectivités respectives qu’à des partis politiques. Cependant, au cours des années 1880, une forte opposition libérale au gouvernement non partisan de John Norquay voit le jour sous la gouverne de Thomas Greenway. Lors de l’élection de 1888, les libéraux de Thomas Greenway forment le premier gouvernement partisan du Manitoba. Ils sont défaits en 1899 (à cause de dépenses extravagantes et d’une politique ferroviaire jugée faible) par un Parti conservateur en grande forme dirigé par Hugh John Macdonald. Lorsque ce dernier démissionne, en 1900, R. P. Roblin devient premier ministre dans l’espoir d’effectuer un retour sur la scène fédérale. Il conserve le poste jusqu’en 1915, lorsqu’un scandale sur l’attribution de contrats pour la construction des nouveaux édifices parlementaires fait tomber le gouvernement, qui en était à son cinquième mandat.

Macdonald, sir Hugh John

En 1920, en opposition au gouvernement libéral de Tobias Crawford Norris, les Fermiers unis du Manitoba (FUM) se lancent dans l’arène politique et font élire 12 députés à l’Assemblée législative, ce qui signale le début d’une nouvelle ère de politique non partisane. Leurs efforts portent leurs fruits en 1922 lorsqu’ils remportent l’élection avec une mince majorité. Ils forment le nouveau gouvernement.

Les fermiers nomment John Bracken à la tête de leur parti. Il demeure premier ministre jusqu’en 1943, même si les FUM se désistent de la politique en 1928. John Bracken forme ensuite un parti de coalition, les libéraux-progressistes, qui remporte une majorité en 1932, mais n’obtient qu’une majorité simple à l’élection de 1936 et est gardé en vie grâce à l’aide du Crédit social. Aux élections de 1940, pendant la guerre, John Bracken demeure à la tête d’un gouvernement de coalition comprenant des membres conservateurs, libéraux-progressistes, de la Fédération du Commonwealth coopératif et du Crédit social.

De la Deuxième Guerre mondiale à la fin des années 1980

En 1943, Stuart S. Garson succède à John Bracken au poste de premier ministre lorsque ce dernier démissionne pour devenir chef du Parti conservateur fédéral. En 1945, la Fédération du Commonwealth coopératif se retire du gouvernement de coalition formé pendant la guerre. En 1950, c’est au tour des conservateurs, tandis que le Crédit social finit par disparaître tout simplement. À partir de 1948, le premier ministre Douglas Lloyd Campbell devient le chef de la coalition, bien qu’après 1950, le gouvernement soit majoritairement libéral.

À partir de 1958, les conservateurs, avec Dufferin Roblin à leur tête, dirigent la province jusqu’à la victoire, en 1969, d’Edward Richard Schreyer, du Nouveau Parti démocratique (NPD), qui gagne avec une faible majorité. Les néo-démocrates restent au pouvoir pendant deux mandats. Un grand nombre de réformes sociales sont alors adoptées, et la présence du gouvernement dans le secteur privé s’accroît.

Entre 1970 et 1990, la politique provinciale se modifie profondément, avec notamment la quasi-disparition du Parti libéral provincial et l’élection du NPD sous Edward Schreyer et ensuite Howard Pawley. En 1977, Sterling Rufus Lyon conduit le Parti conservateur à la victoire en promettant de réduire la dette de la province et de favoriser la libre entreprise. Son gouvernement ne dure cependant que le temps d’un mandat. En 1981, le NPD, sous la direction d’Howard Russell Pawley, remporte les élections et est réélu en 1985. En fait, le gouvernement de Sterling Rufus Lyon est le premier dans l’histoire du Manitoba à n’assumer qu’un seul mandat : la tradition politique de la province est reconnue pour la stabilité de ses gouvernements, particulièrement à l’époque des Fermiers unis du Manitoba et des gouvernements de coalition qui ont suivi. Les nombreuses initiatives du NPD comprennent la création d’une assurance automobile prise en charge par le gouvernement et l’achat, prévu en 1987, de la compagnie Inner-City Gas. Les tentatives d’augmentation des services bilingues au sein de la province par le gouvernement néo-démocrate attisent de vieilles passions et sont abandonnées.

De la fin des années 1980 à aujourd’hui

Les néo-démocrates de Howard Pawley sont chassés du pouvoir en 1988 par la victoire serrée des conservateurs de Gary Filmon, qui forment un gouvernement minoritaire et fragile devant l’opposition libérale véhémente à l’Accord du lac Meech. (Voir Accord du lac Meech : document.) L’accord domine alors l’ordre du jour parlementaire et est finalement torpillé par des tactiques procédurières mises en branle par le député néo-démocrate d’origine crie Elijah Harper. Gary Filmon déclenche une élection immédiatement après le rejet de l’Accord du lac Meech, en 1990. Il en ressort avec une mince majorité, qui lui permet de finalement imposer ses priorités législatives et de commencer à concentrer les efforts de son gouvernement sur le contrôle de la dette provinciale, qui grossit sans cesse. Sa réussite dans ce domaine lui vaut de se faire réélire avec une plus grande majorité en avril 1995.

À partir de l’élection de Gary Doer en 1999, le NPD domine la politique provinciale jusqu’en 2016. En 2009, Gary Doer est nommé ambassadeur du Canada aux États-Unis; il sélectionne alors l’un de ses députés, Greg Selinger, pour le remplacer. Aux élections générales de 2011, Greg Selinger reprend le pouvoir avec un gouvernement majoritaire.

Brian Pallister

Le leadership de Greg Selinger est remis en question à l’automne 2014, lorsque cinq membres du cabinet quittent leur poste. Une course à la direction du NPD est déclenchée à l’hiver 2015. Greg Selinger remporte la course à la direction, mais il se voit destitué de ses fonctions de premier ministre environ un an plus tard. En avril 2016, les Manitobains donnent un gouvernement majoritaire à Brian Pallister, chef du Parti progressiste-conservateur, mettant fin à presque 17 années de gouvernement néo-démocrate dans cette province. La victoire est historique : le Parti progressiste-conservateur remporte 40 des 57 sièges de la province, obtenant ainsi une des plus importantes majorités de l’histoire provinciale. Brian Pallister fait campagne sur des promesses d’austérité. Il s’engage à annuler une augmentation de la taxe de vente provinciale et à éliminer un déficit budgétaire.

À l’été 2019, Brian Pallister déclenche des élections générales environ un an avant la date prévue par la loi. Selon lui, son gouvernement a tenu la plupart de ses promesses et a besoin d’un nouveau mandat des électeurs. Le 10 septembre 2019, les progressistes-conservateurs remportent de nouveau un gouvernement majoritaire, cette fois avec 36 sièges.

Alors qu’elle est au pouvoir, Heather Stefanson dévoile son programme politique phare; The Path to Progressing Together. Ce programme promet des avancées dans un bon nombre de ses projets précédents, comme la lutte contre la pénurie d’infirmières, et l’amélioration de l’accès aux services de santé mentale. Il fixe également des engagements pour améliorer la coopération avec les dirigeants autochtones, décarboniser l’économie du Manitoba, et stimuler les investissements internationaux. Mais tout comme Brian Pallister, Heather Stefanson n’a qu’un faible soutien public. Elle n’obtient que 25 % d’approbation lors d’un sondage en mars 2022. Elle s’attire des critiques pour avoir transféré des patients des soins intensifs à l’extérieur de la province, pour avoir omis de divulguer la vente de 31 millions de dollars de biens personnels, et plus particulièrement pour avoir refusé les recherches des corps de deux femmes autochtones assassinées dans la décharge de Prairie Green. Lors des élections du 3 octobre 2023, les progressistes-conservateurs de Heatther Stefanson sont réduits de 36 à 22 sièges. Wab Kinew et le NPD remportent un gouvernement majoritaire avec 34 sièges. Wab Kinew, l’anichinabé de 41 ans devient le premier membre des Premières Nations à être élu premier ministre d’une province canadienne. Heather Stefanson annonce dans son discours de concession qu’elle quitte son poste de chef du parti progressiste-conservateur.

(Voir aussi Premiers ministres du Manitoba.)