Poterie d'étain
L'alliage utilisé pour la poterie d'étain est essentiellement composé des mêmes métaux que le bronze (cuivre et étain). La découverte de l'étain remonte probablement à l'âge de bronze. Du début du XVIIe siècle au milieu du XIXe siècle, l'étain est le matériau le plus souvent utilisé pour fabriquer la coutellerie (cuillères, fourchettes) et les petites pièces de vaissellerie pour servir, verser, manger et boire. À l'état naturel, l'étain est constitué d'environ 80 p. 100 d'étain et de 20 p. 100 de cuivre. En Amérique du Nord, l'étain brut est difficile à trouver et les potiers d'étain le tirent de la ferraille. L'alliage obtenu après refonte de ces rebuts est fréquemment adultéré, ou « gonflé » au plomb, avant d'être façonné en nouveaux objets. Le plomb constitue parfois jusqu'au tiers de certains étains non soumis à l'usure (p. ex. tuyaux d'orgues et moules à chandelles).
Comme l'étain est un métal mou, la durée des objets d'usage quotidien n'est pas longue : on l'évalue à cinq ans. Il se vend des moules en bronze en deux morceaux pour couler les pièces de vaisselle les plus courantes; les potiers d'étain fabriquent leurs propres moules pour les autres pièces. Aujourd'hui, au Canada, quelques anciens ordres religieux du Québec, comme la Congrégation de Notre-Dame, utilisent encore l'étain et possèdent plusieurs moules à cuillères et à assiettes qui servent à la refonte périodique.
Sous le régime français, les étains d'origines française et anglaise étaient d'usage courant comme en témoignent les cuillères et les fragments d'écuelles, de bols et d'assiettes retrouvés sur le site des premières habitations situées entre Louisbourg et Montréal. Bien qu'il n'existe aucune preuve documentaire de l'existence d'une industrie de l'étain à cette époque, on a retrouvé des pièces sans poinçon qui ont sans doute été fondues ou refondues ici. Les habitants plus tardifs de la NOUVELLE-FRANCE et les premiers colons de l'Amérique du Nord britannique semblent avoir utilisé presque exclusivement des étains importés. Ce n'est qu'au début du XIXe siècle qu'apparaissent les pièces d'étain gravées d'un poinçon d'origine canadienne, et elles se limitent à Montréal et à Québec. On sait aujourd'hui que la poterie d'étain n'est jamais devenue une industrie artisanale importante au Canada, peut-être parce dès les années 1830, la vaisselle en étain est remplacée par des articles en céramique et en acier peu coûteux importés d'Angleterre.
Rares sont les potiers d'étain canadiens qu'on a pu identifier aux poinçons gravés sur la vaisselle. Le plus important est Thomas Menut, de Montréal, qui fabrique surtout des cuillères et des fourchettes frappées d'un grand « T. M. » et d'un castor. Il semble avoir commencé à travailler entre 1810 et 1820, jusqu'aux années 1850. Son fils Jean-Baptiste lui succède. Ce dernier figure sur la liste des potiers d'étain de Montréal en 1857-1858, puis encore en 1868. Son poinçon représente un ange aux ailes déployées encadré par les initiales « I. M. ». Il semble que quelques orfèvres de Montréal et de Québec fabriquent aussi occasionnellement des objets en étain. Quelques pièces conservées sont gravées d'un petit « Montréal », identique au poinçon qui distingue l'argenterie des Arnoldis, de Robert Cruiskshank, de Salomon Marion et de Paul Morand. Aucun de ces étains ne porte d'estampille susceptible de nous faire connaître leur auteur. Dans la ville de Québec, David Smellie, qui exploite un commerce de 1780 à 1827, fabrique aussi une petite quantité d'étains. La vaisselle Britannia, constituée d'un étain dur qui s'obtient par repoussage dans les moules et finition au tour, ne semble pas avoir été fabriquée au Canada.