Rosemarie Kuptana (parfois Rosemary), O.C., animatrice de radio inuite, auteure, défenseure des droits autochtones et ancienne présidente de l’Inuit Tapiriit Kanatami (née le 24 mars 1954 près du détroit du Prince-de-Galles, aux Territoires du Nord-Ouest).
Jeunesse et pensionnat indien
Rosemarie Kuptana naît dans un igloo alors que ses parents sont à la chasse au phoque sur le détroit du Prince-de-Galles. Avec sa famille, elle mène une vie traditionnelle et nomade jusqu’à ce qu’elle atteigne l’âge de six ans. Son père, William, amène ensuite la famille à Sachs Harbour, où il travaille à la construction du poste de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et de la station météorologique du hameau.
Jusqu’à huit ans, Rosemarie Kuptana parle l’innuinnaqtun, la langue de l’Arctique de l’Ouest qu’elle perd lorsqu’elle est arrachée à sa famille par la GRC et envoyée dans un pensionnat indien à Inuvik. Elle y passe près d’une décennie et se rappelle y avoir été frappée et fouettée pour avoir parlé sa langue. « Ce qui a fait le plus mal a été de retourner à la maison et de me sentir comme une étrangère, de ne pas pouvoir parler à ma mère, à mon père ou à ma grand-mère, dans notre propre langue », déplore-t-elle plusieurs années plus tard. La perte de sa langue au pensionnat indien est l’une des origines de son militantisme pour la conservation et la promotion des langues et de la culture inuites.
Carrière d’animatrice
En 1979, Rosemarie Kuptana devient animatrice radio pour le Service du Nord de la CBC, qui diffuse une émission dans l’Arctique de l’Ouest sur les enjeux culturels et politiques touchant les peuples inuits. Elle se joint ensuite à la nouvelle Inuit Broadcasting Corporation (IBC), qui produit des émissions radio et télévisées en inuktitut.
De 1983 à 1988, Rosemarie Kuptana occupe le poste de présidente de l’IBC. Motivée par sa propre expérience, elle travaille avec l’objectif principal d’offrir une programmation en inuktitut. Elle contribue également à la création d’une grande part des infrastructures administratives et journalistiques de l’IBC. En outre, Rosemarie Kuptana exerce des pressions auprès des régulateurs fédéraux de radiodiffusion pour contrôler les ondes du Service du Nord de la CBC et y diffuser un meilleur contenu inuit.
Rosemarie Kuptana lisant un texte à la Munk School of Global Affairs, 2013.
Activisme pour les Inuits et l’Arctique
Au milieu des années 1980, Rosemarie Kuptana amorce son parcours de politicienne et de militante à l’échelle nationale et internationale. De 1986 à 1989, elle est la vice-présidente canadienne de ce qui est aujourd’hui le Conseil circumpolaire inuit (CCI), l’organisation internationale qui représente les Inuits de l’Alaska, du Canada, du Groenland et de la Russie.
En avril 1991, à un moment critique de l’histoire des droits autochtones au Canada (voirDroits des Autochtones au Canada), Rosemarie Kuptana devient présidente de ce qui est aujourd’hui l’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), l’organisme national militant pour l’autodétermination des Inuits du Canada. Son mandat de présidente, d’une durée de trois ans, s’amorce au milieu de négociations constitutionnelles prolongées qui se concluent par l’Accord de Charlottetown. Assise à la table des négociations aux côtés des autres organismes autochtones nationaux, elle contribue à inclure dans l’accord la reconnaissance des peuples autochtones et leur droit à l’autonomie gouvernementale. Réélue pour un deuxième mandat de trois ans en mai 1994, Rosemarie Kuptana travaille également pour la protection des droits de chasse des Inuits et l’expansion de leurs droits territoriaux dans le Nord. Son deuxième mandat arrive cependant à terme de manière prématurée lorsque, en juin 1996, elle est démise de ses fonctions par les membres du conseil à la suite de graves problèmes financiers dans l’ITK.
En juillet 1995, Rosemarie Kuptana réintègre le CCI à titre de présidente pour un mandat de deux ans avant de présenter sa démission pour des raisons familiales et de santé.
Après son service à la tête d’organismes inuits nationaux et internationaux, Rosemarie Kuptana se tourne vers les enjeux environnementaux, notamment les changements climatiques. En 2000, elle assiste à une conférence internationale sur les changements climatiques à La Haye, où elle présente les premières conséquences du réchauffement planétaire sur la glace entourant sa communauté, Sachs Harbour. Elle milite également pour une approche plus holistique en matière de changements climatiques et pour des politiques basées à la fois sur les connaissances traditionnelles inuites et les études scientifiques modernes.
Héritage
Au cours des dernières décennies, Rosemarie Kuptana a apporté une grande contribution à la culture et aux droits inuits. En tant que présidente de l’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), elle se bat pour l’autodétermination des peuples inuits au Canada. Comme présidente de l’Inuit Broadcasting Corporation (IBC), elle milite pour augmenter la diffusion en inuktitut pour conserver la culture et le patrimoine de son peuple. Tout récemment, Rosemarie Kuptana a appuyé la lutte pour contrer les effets des changements climatiques et du réchauffement planétaire dans le Nord à l’aide du savoir inuit traditionnel.
Prix et distinctions
Rosemarie Kuptana devient Officier de l’Ordre du Canada en 1999 pour « avoir propagé la culture inuite et avoir été un leader en matière de droits de la personne ». Elle remporte également la Médaille de la Confédération du gouverneur général et reçoit des doctorats honorifiques des universités Trent et York.