Project Mémoire

Alexander Burton (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Lors d’une mission ultra secrète, Alexander Burton et les marins du navire câblier CS John W. Mackay ont passé trois semaines à voler les câbles de communication au fond de l’océan. Bien qu’opérant dans une zone qui regorgeait de sous-marins ennemis, le navire mena sa mission à bien, mais personne n’eut le droit d’en parler jusqu’après la guerre.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

Alexander Burton
Alexander Burton
Troisième lieutenant Alexander Burton (à gauche) en 1943 avec une photo de son fils, le Matelot de 1re classe Philippe Burton.
Alexander Burton
Alexander Burton
Alexander Burton
Le navire câblier John W. Mackay.
Alexander Burton
Après avoir décidé de voler le câble et avoir récupéré le câblier, ils l’ont envoyé dans l’Atlantique pour voler le câble qui courait d’Anzio en Italie jusqu’en Amérique du Sud.

Transcription

Je devrais peut-être faire un résumé de la situation de l’époque en ce qui concernait les Anglais. Ils avaient dans les 150 000 milles de câbles de communications sous-marins, et ils étaient, ça se passait au début de la guerre, quand la guerre a éclaté et que les Allemands ont commencé à bombarder l’Angleterre, ils ont détruit toutes les usines fabriquant du câble ainsi que la plupart de ses câbliers. Donc l’Angleterre s’est retrouvée dans une situation où elle ne pouvait plus produire le câble dont elle avait besoin pour assurer les réparations. Elle ne pouvait pas en acheter parce que les autres pays maritimes étaient la France, l’Allemagne et l’Italie et bien sûr l’Angleterre. Les États-Unis ou la Russie ne fabriquaient pas de câble parce qu’ils n’avaient pas d’empire comparable. Donc une fois que les 155 000 milles de câble britannique ont commencé à se détériorer, ils ont découvert qu’ils n’avaient aucune réserve pour les réparer alors… et ils ne pouvaient pas en fabriquer ni en acheter parce qu’ils étaient en guerre contre les autres pays producteurs de câble.

Alors il fallait qu’ils aillent en voler, c’est ce qu’ils ont fait. Après avoir décidé de le voler, il leur a fallu ensuite trouver un câblier et le câblier qu’ils voulaient se trouvait à Halifax, le [câblier] John W. Mackay. Après avoir décidé de voler le câble et avoir récupéré le câblier, ils l’ont envoyé dans l’Atlantique pour voler le câble qui courait d’Anzio en Italie jusqu’en Amérique du Sud. Il avait été installé en 1924, je crois. Et, souvenez-vous qu’à cette époque dans l’Atlantique, si on en croit le livre de Winston Churchill, Le tournant du destin, les Allemands avaient coulé 568 navires, et nous, on devait parcourir l’Atlantique, à bord d’un câblier et puis s’arrêter pour essayer de trouver le câble, qui était reporté sur les cartes, le remonter et l’enrouler dans des conteneurs à dix milles par pied parce que les réservoirs faisaient 20 pieds de profondeur et 32 pieds de diamètre. Alors ça a pris – pour couvrir les 450 milles qu’ils avaient demandé, ça a pris dans les 450 heures ou plus, pour le trouver et le récupérer. Et quand on a eu le câble, on a utilisé tout ce câble pour relier les câbles des lignes britanniques entre eux au large de l’Afrique et dans l’océan Indien, et couvrir jusqu’aux Maldives, ça nous a pris à peu près un an pour faire ça. Et c’est essentiellement ce que j’ai fait.

Je suis passé de l’adolescence à l’âge adulte pratiquement du jour au lendemain. Et ce qui se produit très souvent quand je parle avec d’autres de ce qu’ils font et du temps où ils étaient à l’université et ainsi de suite, je suis passé à côté de tout ça, moi. Et je n’y ai pas eu droit quand je suis rentré malheureusement parce que le gouvernement canadien ne reconnaissait pas la marine marchande en tant qu’unité combattante, et je n’ai pas bénéficié d’études gratuites ni de concessions de terrain, vous savez, pas de médailles et autres. Alors ça a été un moment difficile. Mais à part ça, je me suis fait tout seul comme on dit.