La Base des Forces canadiennes (BFC) Valcartier est l’une des plus anciennes zones d’entraînement militaire au Canada. Située à quelques kilomètres au nord de Québec, elle a été fondée sous le nom de Camp Valcartier, juste avant la Première Guerre mondiale. Pendant la guerre, il s’agissait de la principale base d’entraînement du premier contingent canadien, avant son départ pour le service outre‑mer. Il s’agit aujourd’hui de l’une des principales bases de l’Armée canadienne connue sous le nom de Base de soutien de la 2e Division du Canada Valcartier.
Fondation
En 1912, le ministère canadien de la Milice et de la Défense a besoin de terres au Québec pour la formation à temps partiel d’environ 5 000 soldats chaque été. En juin 1913, le gouvernement fédéral acquiert près de 2 000 ha près du village de Saint‑Gabriel‑de‑Valcartier, à environ 20 km au nord‑ouest de Québec.
Quand la Première Guerre mondiale éclate en août 1914, le ministre de la Milice et de la Défense Sam Hughes ignore les plans de mobilisation existants, qu’il juge trop lents et trop lourds. Il décide de lancer un appel direct aux armes, en demandant aux commandants de régiment d’enrôler des nouvelles recrues pour le Corps expéditionnaire canadien (CEC) localement, dans leurs manèges militaires, avant de les regrouper pour l’entraînement à Valcartier.
Pour gérer cet afflux de nouvelles recrues, l’armée a besoin d’un camp qui pourrait fournir un hébergement, des zones d’entraînement et des champs de tir pour 25 000 à 30 000 hommes, avant leur départ pour l’Europe. À Valcartier, le gouvernement exproprie 125 agriculteurs de leurs terres, pour un coût de 40 000 $, ces nouveaux terrains ajoutant 3 480 ha à l’acquisition initiale. On organise également la construction de routes, de conduites d’eau, de douches, de lignes téléphoniques et télégraphiques et d’un chemin de fer jusqu’à Québec. En dépit de ces efforts, le nouveau camp présente peu d’édifices permanents, les soldats étant hébergés dans des tentes.
Première Guerre mondiale
Les travaux d’équipement militaire à Valcartier sont lancés le 8 août 1914, avec la construction d’un champ de tir de 15 000 cibles qui, une fois achevé le 22 août, devient le plus important au monde. Les premières troupes arrivent deux jours plus tard pour commencer leur entraînement.
Le saviez‑vous?
En 1914, la ration quotidienne des soldats s’entraînant au Camp Valcartier se composait de poivre et de sel, d’une once d’huile, d’une once de thé, d’un tiers d’once de café, d’une once de fromage, de deux onces de confiture, de deux onces de beurre, d’une livre un quart de pain, de deux onces de haricots, de six onces de légumes frais, d’une livre de pommes de terre (les fruits étaient en supplément), d’une livre de viande fraîche et d’un pied cube de bois.
Le premier contingent s’entraîne à Valcartier jusqu’à son départ pour la Grande‑Bretagne, le 3 octobre 1914. Bien que le contingent n’ait besoin que de 25 000 hommes, ce sont plus de 31 000 militaires qui appareillent pour l’outre‑mer à partir de Québec; à l’époque, c’est la plus grande armada à avoir jamais quitté le Canada. Cependant, à compter du printemps 1915, presque tous les convois de troupes partent d’Halifax, en Nouvelle‑Écosse, où le port reste ouvert toute l’année, contrairement à celui de Québec qui ferme pendant l’hiver.
À peu près à la même époque, l’entraînement de base pour le service en Europe est décentralisé dans divers camps répartis au Canada, d’où un plus petit nombre de soldats s’entraînant à Valcartier : alors qu’ils étaient 33 644 en 1914, ils ne sont plus que 1 811 en 1917. Le camp ferme aussi chaque hiver.
Camp d’entraînement de la Milice et camp de secours pendant l’entre‑deux‑guerres
Après la guerre, la Milice utilise le Camp Valcartier pour son entraînement d’été. Pendant la Grande Dépression, il est transformé en camp de secours pour les chômeurs. En 1932, le gouvernement conservateur du premier ministre R.B. Bennett adopte la Unemployment Relief and Public Works Construction Acts (législation sur le secours aux chômeurs et sur les travaux publics) qui régisse l’établissement, d’un océan à l’autre, de camps pour les chômeurs. Dans ces camps les hommes sont logés, nourris, vêtus, reçoivent une ration de tabac et sont payés 20 ¢ par jour pour travailler sur des projets de construction militaire.
À Valcartier, le chantier le plus important durant cette période est probablement le lancement de la construction d’une nouvelle usine de l’Arsenal fédéral pour produire des munitions, dans le cadre d’un projet d’expansion des installations existantes à Québec où, en raison de contraintes d’espace, on ne peut fabriquer que des munitions d’armes légères et quelques obus d’artillerie. Les camps de secours sont toutefois fermés après l’élection, en 1935, du premier ministre libéral William Lyon Mackenzie King. Pouvant accueillir jusqu’à 2 400 hommes, Valcartier est à l’époque le plus grand camp de ce type au Canada.
Deuxième Guerre mondiale
Lorsqu’éclate la Deuxième Guerre mondiale, en septembre 1939, Valcartier devient un camp d’entraînement permanent. L’organisation la plus importante du camp est alors le Centre d’instruction de l’infanterie canadienne A13, l’un des quelques centres de ce type au pays.
Lorsque la 2e Division canadienne est autorisée, au début de 1940, l’une de ses trois formations, la 5e Brigade d’infanterie canadienne, se regroupe à Valcartier, ce qui lui permet, avec toutes ses unités réunies, de s’entraîner efficacement pour la première fois. Après le départ de la 2e Division pour la Grande‑Bretagne, une brigade de défense intérieure, la 15e Brigade d’infanterie, est constituée en juillet 1941; après son installation ultérieure en Nouvelle‑Écosse, elle est remplacée par la 21e Brigade d’infanterie, cette nouvelle formation étant disponible comme force de réserve pour tout l’Est du Canada.
Au début de l’automne 1941, le gouvernement canadien engage deux bataillons d’infanterie et divers éléments de soutien pour renforcer la garnison britannique à Hong Kong, notamment le Royal Rifles of Canada de Québec, qui se regroupe à Valcartier avant son départ pour l’Extrême‑Orient le 23 octobre.
Guerre froide
Lorsque la guerre de Corée éclate en juin 1950, le gouvernement mobilise la 25e Brigade d’infanterie canadienne pour combattre sur place. Valcartier est alors un point de rassemblement pour le nouveau 2e Bataillon, Royal 22e Régiment, avant son déploiement. Après la formation de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en 1949, dont la mission consiste à dissuader l’expansionnisme soviétique, le Canada accepte de stationner en Europe la 27e Brigade d’infanterie canadienne, constituée de trois bataillons d’infanterie recrutés dans 15 régiments de la Milice, qui, après un rassemblement à Valcartier pour un entraînement préalable, part pour l’Allemagne en décembre 1951.
La BFC Valcartier aujourd’hui
Valcartier abrite actuellement le 5e Groupe‑brigade mécanisé du Canada (5 GBMC), dont les racines remontent à 1968, année de la création d’une formation opérationnelle de combat à Valcartier, constitué d’unités de toutes les armes et de tous les services. Pour la première fois, ces unités offrent à des francophones la possibilité de servir dans des unités francophones, en dehors de l’infanterie.
Le saviez‑vous?
En avril 2021, le colonel Marie‑Christine Harvey prend le commandement du 5 GBMC, devenant la première femme à commander un groupe‑brigade mécanisé.
La BFC Valcartier, affectée à la 2e Division du Canada et connue sous le nom de Base de soutien de la 2e Division du Canada Valcartier, abrite également le Groupe de soutien de la 2e Division du Canada dont les principales missions, outre la fourniture d’un vaste éventail de services de soutien administratif à ses unités, consistent à soutenir les forces dans le cadre d’opérations nationales et de leur préparation en vue d’opérations à l’étranger.