Chansons du jour de l'An
Chansons du jour de l'An. On désigne par cette expression les parodies de chansons ou les chansons originales publiées, tout au moins dans la presse québécoise entre 1767 et 1919, à l'occasion du premier de l'An. Le texte et la musique (à partir de 1830 surtout) faisaient l'objet d'une présentation spéciale, grâce à l'emploi de motifs ornementaux des plus variés. Car ces « couplets » se voulaient des « étrennes du garçon qui porte la gazette aux pratiques » ou encore, un « hommage du petit gazettier aux abonnés ». Selon M. Chauveau, « autrefois on faisait entrer le pauvre petit messager de la nouvelle année, tout transi de froid; on lui faisait chanter sa chanson [...] et on le récompensait par quelques gâteaux ou même par un verre de liqueur en sus des étrennes obligées ». Aussi, il était fréquent de lire comme dernière strophe des vers, tels ceux parus dans la Gazette de Montréal de 1802 : « Si ma politique - Peut vous amuser - Et mes chants lyriques - Vous bien disposer; D'une bourse pleine - Lachez le cordon - Et par des Etrennes - Encouragez nos sons. » En plus des voeux et requêtes, on retrouvait des thèmes divers : politique et expression patriotique (le texte de « Sol canadien, terre chérie » parut d'abord sous forme de couplets du jour de l'An), coutumes et traditions, sujets littéraires, etc.
De nombreux poètes canadiens apportèrent leur contribution à l'enrichissement du genre, tels Louis Fréchette, François-Xavier Garneau, Napoléon Legendre et Benjamin Sulte. Il en va de même des compositeurs, entre autres, Napoléon Aubin, Jean-Baptiste Labelle et Nazaire LeVasseur; leur musique, invariablement de forme strophique, était sans prétention. L'explication de l'intérêt porté par les poètes et musiciens canadiens pour ce genre mineur réside sans nul doute dans la croyance selon laquelle leurs aïeux avaient toujours observé dans leur nouvelle patrie une cérémonie du jour de l'An, héritée des Gaulois : ceux-ci « se faisaient mutuellement de petits cadeaux de gui de chène béni par les Druides, en chantant une espèce de cantique qui avait pour refrain : Au gui l'an neuf! Ce qui explique, soutient l'auteur anonyme de L'Abeille canadienne, à la fois les présens et les chansons du jour de l'an. » Cette interprétation, de portée nationaliste, n'est pas sans poser problème : bien que moins nombreux, des New-Year Verses of the Printers Lad parurent également dans des journaux québécois, à partir de 1767, sans qu'il soit toujours précisé, il est vrai, qu'il s'agisse de pièces musicales.