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Chants patriotiques

Chants patriotiques. Chants exprimant l'amour du pays et habituellement destinés à une exécution collective, à l'unisson ou harmonisée.

Chants patriotiques

Chants patriotiques. Chants exprimant l'amour du pays et habituellement destinés à une exécution collective, à l'unisson ou harmonisée. Les textes de certains chants patriotiques se rapportent parfois à des événements ou à des situations spécifiques comme, par exemple, la Confédération, les raids des fenians ou les deux guerres mondiales. Le plus souvent, ils ne traitent d'aucune circonstance particulière, mais célèbrent le pays et saluent un attachement à son endroit. Plusieurs furent écrits dans l'intention de doter le Canada d'un hymne national. Seul l'« Ô Canada » atteignit ce but, en dépit de la popularité brève ou durable d'autres chants patriotiques, dont « The Maple Leaf For Ever » chez les Canadiens anglophones. Comme le démontrent les listes dans Musical Canadiana : A Subject Index (Ottawa 1967), quelque 200 chants patriotiques avaient déjà été publiés avant 1921. Le relevé suivant en fournit un échantillon; d'autres chants sont mentionnés dans les articles Castor, Centenaire - Célébrations du, Chansons politiques, Confédération, Feuille d'érable, Guerres, rébellions et soulèvements.

Les chants patriotiques et hymnes nationaux sont essentiellement des produits de la lutte menée au XIXe siècle pour l'État-nation - concept d'un état unitaire pour tous ceux qui partagent une même langue ou une culture dans un territoire commun. Seuls quelques pays possédaient un hymne national au XVIIIe siècle. Néanmoins, l'on prit peu à peu conscience que les chansons folkloriques et populaires exprimaient les particularités d'un peuple et devaient être recueillies et conservées précieusement comme éléments d'un héritage national. Sans être nécessairement ou même habituellement patriotiques ou nationalistes dans leur contenu, certains chants - par exemple dans la musique irlandaise ou écossaise - en sont venus à représenter le peuple dans son entité. Au Canada français, « À la claire fontaine », « Vive la Canadienne » et d'autres chansons étaient considérées au début du XIXe siècle comme des personnifications de l'âme populaire et étaient invariablement entonnées lors de ralliements patriotiques et à l'occasion de cérémonies. Elles furent également intégrées fréquemment aux suites de danses, pots-pourris et recueils de chansons du milieu du XIXe siècle. Parmi les pots-pourris figurent Chants canadiens pour piano (Crémazie v. 1856), Quadrille canadien d'Antoine Dessane (milieu des années 1850), Le Carnaval de Québec d'Ernest Gagnon (1862) et Mosaïque sur des airs populaires canadiens de Joseph Vézina (1880).

Chez les Acadiens du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse, « Un Acadien errant », adaptation des paroles d'« Un Canadien errant », sur la mélodie grégorienne « Ave Maris Stella », est devenu le chant le plus représentatif.

Parallèlement aux débuts de l'édition musicale, les chants patriotiques canadiens commencèrent à paraître dans les années 1830 et 1840. Les premiers d'entre eux étaient en français, un fait qui s'explique par le degré de conscience politique et les racines canadiennes de la plupart des Canadiens français de l'époque. Plusieurs des Anglo-saxons n'étaient arrivés que récemment et leurs liens étaient plus forts avec la mère-patrie qu'avec la colonie. Les chants de J.P. Clarke sur des textes tirés de l'anthologie annuelle The Maple-Leaf (à partir de 1847) et son cycle de mélodies Lays of the Maple Leaf (1853) peuvent être considérés comme les premières tentatives pour traduire en chansons le caractère particulier du Canada. Cependant, les auteurs-compositeurs anglophones se surpassèrent les uns les autres dans la chanson patriotique après la Confédération (1867). La production atteignit un sommet de ferveur au cours de la Première Guerre mondiale.

La liste suivante présente, dans l'ordre chronologique, une sélection de chansons qui connurent une grande faveur populaire ou qui sont signées de compositeurs connus (dont quelques étrangers). Les chants reliés à la Première Guerre mondiale ne sont pas inclus car leur contenu en interdisait l'usage en temps de paix.

LANGUE FRANÇAISE

« Canada, terre d'espérance », chant patriotique (paroles de F.-R. Angers); Napoléon Aubin, Le Canadien (1er janv. 1836).

« Noble patron », chant canadien (F.-R. Angers); Charles Sauvageau (Québec 1843).

« Dans ce banquet patriotique », chant national (F.-M. Derome); Charles Sauvageau, Le Ménestrel, I (27 juin 1844).

« Le Drapeau de Carillon » (O. Crémazie); Charles W. Sabatier (Crémazie 1858).

« Sol canadien, terre chérie » (I. Bédard 1829); chantée en 1842 sur un air traditionnel. Une nouvelle mélodie de T.F. Molt fut publiée en 1859.

« Avant tout je suis Canadien » (G.-É. Cartier 1835); chantée d'abord sur un air traditionnel (« La Pipe de tabac ») puis sur une mélodie nouvelle de J.-B. Labelle (v. 1860) et sur « Le Petit mousse noir ».

« Chant du vieux soldat canadien » (O. Crémazie); Antoine Dessane (Crémazie s.d., Le Chansonnier des collèges 1860).

« La Huronne » (P.-G. Huot); Célestin Lavigueur (Brousseau Frères v. 1861, et autres).

« La Mère canadienne » (E. Blain de Saint-Aubin); Antoine Dessane (Sénécal 1862, Turcotte 1862).

« Canadiens, Ô notre patrie » (O. Dufresne); J.U. Marchand (s.é. 1862?).

« Ô Canada! mon pays! mes amours! » (G.-É. Cartier 1834); chantée en 1834 sur un air traditionnel. Une nouvelle mélodie fut composée par J.-B. Labelle en 1867 ou avant.

« Rallions-nous » (B. Sulte); Charles-M. Panneton, 1874.

« Ô mon pays, terre adorée » (L. Fréchette); Guillaume Couture, v. 1875 (ms à l'Université de Montréal).

« Ô Canada, beau pays, ma patrie »; paroles et musique de C. Lavigueur, 1880 (Bernard & Allaire 1880).

« Ô Canada, terre de nos aïeux » (A.-B. Routhier); Calixa Lavallée, 1880 (A. Lavigne 1880).

« Le Canada » (O. Crémazie); Alfred La Liberté, Le Passe-Temps, 185 (26 avril 1902); poème aussi mis en musique par Alexis Contant, 1906 (ms à la Bibliothèque nationale du Canada), et par J.-J. Gagnier (Frères des Écoles chrétiennes 1916).

« Ô Canada, ma patrie » (J.H. Malo); Alexis Contant (Yon 1902).

« Hymne à la patrie » (A. Lozeau); J.-J. Gagnier, Le Passe-Temps (17 juin 1905).

« Canadien, toujours » (G. Leury); Charles Tanguy, Le Passe-Temps (15 juin 1907). Poème aussi mis en musique par Alfred Lamoureux (Gaudin 1925).

« Lève-toi, Canadien! »; paroles et musique de Rodolphe Mathieu (Édition exclusive de musique canadienne 1934).

Un échantillon de chants patriotiques contemporains se retrouve dans la musique imprimée regroupée dans l'album intitulé « Collection de musique composée par des auteurs canadiens... Exposition provinciale de 1863 », conservé à la BN du Q à Montréal. Parmi les collections qui contiennent des chants patriotiques figurent Le Chansonnier des collèges (1850, notation musicale ajoutée dans l'édition de 1860) et Chants des Patriotes (Yon 1893, 1903). Voir aussi Saint-Jean-Baptiste - Fêtes de la.

Langue Anglaise

« The Emblem of Canada », chant national canadien (paroles tirées de The Maple-Leaf, collection annuelle); J.P. Clarke; première mise en musique, Nordheimer v. 1850; seconde mise en musique dans Lays of the Maple Leaf (Nordheimer 1853).

« Let's Sing Success to Canada » (W. Mathews); Martin Lazare (Nordheimer 1859).

« The Maple Leaf For Ever » (A. Muir); Alexander Muir, 1867 (The Guardian 1867?).

« Our Old Canadian Home » (C.P. Woodlawn); C.P. Woodlawn (Nordheimer 1868).

« This Canada » (J.D. Edgar); E.H. Rideout, 1867 (Nordheimer 1973); jugé meilleur chant national lors d'un concours à Montréal en 1868.

« Canadian National Hymn » (G.C. Hutchinson); F. Muller (Nordheimer 1872).

« Canada, the Gem in the Crown » (J. Davids); F.H. Torrington (Suckling 1876).

« God Bless Our Wide Dominion », hymne du Dominion (marquis de Lorne); Arthur Sullivan (de Zouche 1880).

« May God Preserve Thee Canada » (R.S. Ambrose?); R.S. Ambrose (Suckling 1887).

« My Own Canadian Home » (E.G. Nelson); E. Cadwallader, Daily Telegraph (Saint-Jean, N.-B. 1890). Aussi mis en musique par Morley McLaughlin (Maritime Steam Lithography 1890).

« Canada For Ever » (A. Muir); Alexander Muir (Whaley Royce 1894).

« The Men of the North »; paroles et musique de H.H. Godfrey (Whaley Royce 1897).

« The Land of the Maple »; paroles et musique de H.H. Godfrey (Mason & Risch 1897).

« Canada » (H. Boulton); Edward German (Chappell 1904).

« Canada » (W.A. Fraser); Albert Ham (Whaley Royce 1906).

« A Song of Canada » (Percy Semon); Percy Semon (Chappell 1909).

« Mighty Dominion » (Wilfrid Mills); Laura Lemon (Boosey 1910).

« Hail Canada »; paroles et musique de J.H. Anger (Whaley Royce 1911).

« Ô Canada, dear Canada! » (M. Pugh); G.V. Thompson (Thompson 1912).

« Our Canada from Sea to Sea » (A. Stringer); Gena Branscombe (Thompson 1939).

« We Sing a Song to Canada » (F. Harris); Healey Willan (B. 652, Harris 1939).

Le recueil Canadian National and Patriotic Songs fut compilé par Theodore Martens (Suckling 1890). H.H. Godfrey, à l'instar d'E. Cadwallader (fl. 1890-1908), un auteur invétéré de chants patriotiques, vit un recueil de ses Canadian Patriotic Songs and Melodies publié chez Canadian American Music en 1902.

L'engouement pour la composition de chants patriotiques diminua de façon sensible après la Première Guerre mondiale. La raison principale en fut indubitablement l'acceptation générale de l'« Ô Canada » et, par conséquent, la disparition de la motivation propre à susciter un autre hymne national. En outre, la désillusion des années 1920 et les années de dépression entraient en flagrante contradiction avec l'image des chants patriotiques traditionnels (éloignés de la réalité quotidienne) et avec la naïveté et le chauvinisme avoué de plusieurs des premiers chants. Au Canada, la Deuxième Guerre mondiale ne suscita qu'une fraction du nombre de chants patriotiques conçus pour relever le moral qu'avait inspirés la Première Guerre. Le style pop apparu au milieu du XXe siècle était incompatible avec le style solennel des chants patriotiques d'autrefois, et le genre devint donc de plus en plus l'apanage de compositeurs amateurs. Le patriotisme n'était pas éteint, mais s'exprimait de façon moins conventionnelle. Des exemples de chansons écrites sur le pays après 1950 et fortement teintées de musique folklorique ou populaire sont « Mon pays » (1964, le compositeur insiste qu'il ne s'agit pas d'un chant patriotique) et « Gens du pays » (1975) de Gilles Vigneault ainsi que « CA-NA-DA » de Bobby Gimby, chanson-thème du centenaire de la Confédération (1967).