Démographie
La démographie, qui étudie les changements affectant les populations humaines, s'intéresse à la POPULATION dans son ensemble et aux phénomènes immédiats qui la modifient globalement (naissances, décès, migrations) ou qui en altèrent la composition (sexe, âge, état civil, langue, religion, études, revenu, etc.). Une population se définit habituellement comme un groupe d'individus vivant dans un espace bien défini. On peut cependant étudier des sous-populations (par exemple, des groupes ethniques), la population d'âge scolaire ou la population active. Il s'agit là de la démographie au sens « restreint » du terme. Depuis trois siècles, les démographes ont mis au point une batterie impressionnante de méthodes d'analyse de ces phénomènes et de leurs interrelations. Cet ensemble de faits, de relations et de méthodes constitue le noyau de la démographie. Dans la mesure où celle-ci se confine dans cette zone centrale, elle est virtuellement une branche des mathématiques et peut aussi s'appliquer aux populations animales et végétales.La plupart des démographes étendent cependant leurs études au-delà de ce noyau, notamment en cherchant à comprendre les variations survenant dans les phénomènes purement démographiques (fécondité, mortalité, nuptialité, structure par âge) et leurs impacts éventuels sur la société. Leurs recherches touchent à beaucoup de disciplines, en particulier la sociologie, l'ethnologie, l'économie, l'histoire, la psychologie et la biologie.
Dire qu'il n'y a pas en démographie de sous-disciplines est matière à débats. On peut en effet soutenir, par exemple, que l'économique de la population et la génétique des populations disposent d'un noyau de méthodes, de concepts et de connaissances qui justifient l'étiquette de « sous-disciplines ». On peut cependant identifier deux types d'études démographiques : celles qui se confinent dans la démographie au sens restreint du terme (et dont certaines recourent à des modèles mathématiques assez sophistiqués) et celles qui s'intéressent aux relations entre phénomènes purement démographiques et phénomènes sociaux (et parfois biologiques), et qui utilisent les méthodes statistiques communes à toutes les disciplines scientifiques.
Évolution de la démographie au Canada
En tant que discipline très empirique, la démographie repose sur un petit nombre de modèles théoriques et sur une foule de données statistiques. Ces données proviennent en bonne partie des recensements et des statistiques de l'état civil (c'est-à-dire qui portent sur les naissances, sur les mariages et sur les décès). Il fut un temps où ces sources d'information formaient, au Canada comme dans les autres pays industrialisés, la base même de la démographie (voir DONNÉES DÉMOGRAPHIQUES, COLLECTE DE). Il s'y ajoute maintenant de plus en plus de données tirées d'enquêtes.
Le recensement de 1871 donne lieu à quelques analyses élémentaires de nature historique, mais il faut attendre 60 ans avant que le Bureau de la statistique du Dominion, prédécesseur de Statistique Canada, entreprenne à nouveau des analyses démographiques de ses données. Il tire en effet du recensement de 1931 10 monographies très détaillées et les publie en 2 volumes. Le recensement de 1941 donne matière à 2 monographies, celui de 1951, à aucune, celui de 1961, à 8, celui de 1971, à environ 10, tandis que celui de 1981 n'en produit aucune. Les auteurs de ces monographies sont surtout des chercheurs universitaires. Depuis 1961, s'ajoutent des études de portée plus limitées, mais toujours reliées aux recensements, et qui concernent des aspects particuliers de la population du Canada. Depuis 1974, Statistique Canada publie de temps en temps des projections démographiques pour l'ensemble du Canada et chacune de ses provinces.
Statistique Canada emploie beaucoup de démographes, mais ils ne représentent pas plus de 10 p. 100 des démographes canadiens. Il vaut la peine de mentionner les contributions de quelques pionniers de la recherche : l'Histoire de la population canadienne-française, du journaliste Georges Langlois, publiée dans les années 30, et l'ouvrage remarquable d'Enid Charles sur la fécondité, qui paraît dans les années 40. Pendant les années 50, plusieurs chercheurs se mettent à publier des textes en démographie. Parmi eux, figurent deux démographes canadiens réputés, qui travaillent maintenant aux États-Unise : Nathan Keyfitz et Norman B. Ryder.
Ce n'est pas avant les années 60 que des groupes de professeurs se spécialisant dans la recherche et dans l'enseignement supérieur en démographie créent dans quelques universités canadiennes des programmes spécialisés dans cette discipline. Il n'existe qu'un seul vrai département de démographie, celui de l'U. de Montréal, mais à l'U. de l'Alberta et à l'U. de Western Ontario, des groupes de professeurs, de chercheurs et d'étudiants s'intéressant principalement à la démographie travaillent au sein des départements de sociologie. La démographie s'enseigne également dans plusieurs autres universités, qui n'offrent pas de programme spécialisé dans cette discipline. En dehors des universités, on retrouve la plupart des démographes dans les ministères et dans certains organismes parapublics des gouvernements fédéral et provinciaux.
Domaines d'application
L'examen du travail des quelque 400 démographes canadiens montre que leurs études de démographie « appliquée » portent surtout sur les prévisions des besoins en matière de logement, de santé et d'éducation ainsi que sur les services aux personnes âgées; sur les prévisions de la clientèle de certains des principaux services publics; et sur la mise sur pied de politiques reliées à la planification de l'économie, à la régulation des naissances, au bien-être social, à la main-d'oeuvre, à l'immigration, à la langue et à la préservation des groupes culturels minoritaires. Certaines autres études ne sont cependant pas définies de façon aussi précise. C'est le cas des projections démographiques qui trouvent un grand nombre d'utilisateurs et de certaines recherches en milieu universitaires, qui visent l'histoire de la population et les problèmes des pays en développement.
Institutions
Il y a au Canada deux associations de démographes et une fédération nationale. L'Association des démographes du Québec, fondée en 1971, regroupe un peu moins de 200 démographes francophones. Elle publie deux numéros par an de ses Cahiers québécois de démographie. Elle a comme contrepartie anglophone la Canadian Population Society, fondée en 1974. Celle-ci a plus de 200 membres et publie une revue semestrielle, les Canadian Studies in Population. La Fédération des démographes canadiens assure le lien entre les deux associations.