Le Fjord du Saguenay a été creusé presque à la limite de la calotte glaciaire continentale. Il a aussi la caractéristique, très rare, d'être un fjord intracontinental. Partout ailleurs, les fjords débouchent sur des fronts océaniques; c'est le cas en Terre de Baffin et en Colombie-Britannique, de même qu'en Scandinavie et au Chili. Le fjord du Saguenay se trouve à l'intérieur du continent et cette localisation en fait une voie de pénétration dans le plateau laurentien permettant d'atteindre la baie d'Hudson (voir Baie d’Hudson) par l'intérieur des terres. Bien avant l'arrivée des Blancs, les Autochtones connaissaient cette voie de passage. Tadoussac deviendra le premier poste de traite au Canada, dès 1599, parce que les autochtones avaient déjà l'habitude de se rendre en ce lieu de rencontre pour faire du troc avec d'autres tribus.
Dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, trois unités géomorphologiques s'étagent sur le bord du plateau laurentien. Le lac Saint-Jean (voir Lac Saint-Jean) occupe une cuvette dont le fond est à 98 m d'altitude. Le môle de Kénogami est un verrou fracturé d'une soixantaine de kilomètres de longueur. Les eaux du lac s'y fraient un chemin difficile vers Chicoutimi, située 90 m plus bas. Enfin, le fjord conduit à l'estuaire du Saint-Laurent (voir Fleuve Saint-Laurent). Cet ensemble est délimité par un réseau de failles et des escarpements bien visibles dans le paysage. Le fjord est situé presque au centre d'un fossé d'effondrement, large de 50 km sur le rebord du Bouclier canadien, ce qui laisse supposer qu'il a une origine tectonique (voir Tectonique des plaques), car il se trouve dans une zone de roches fracturées, donc moins résistantes à l'érosion. Son tracé actuel est en effet attribuable à l'érosion glaciaire.
Lors de la dernière glaciation, le glacier continental s'écoulait depuis le nord-ouest dans cette région ainsi que l'attestent les stries glaciaires. Après avoir arasé le plateau au nord et surcreusé la cuvette du lac Saint-Jean, le glacier s'est engouffré dans le fossé d'effondrement en direction du sud-est. Le pouvoir d'érosion de la glace dans cette dépression bordée de failles a été accentué par la déclivité de 90 m entre le niveau du lac et l'amorce du fjord un peu en aval de Chicoutimi. Sur 90 km, jusqu'à Tadoussac, la glace a creusé une succession d'ombilics et rongé les versants pour donner à cette vallée la forme caractéristique d'un fjord.
Les rives sont presque partout des falaises abruptes, hautes de 300 m, avec un sommet de 460 m au cap Trinité. Si l'on tient compte de la partie immergée, les chiffres sont encore plus impressionnants. À l'amont, la profondeur totale du fjord est de 450 m, elle atteint 700 m au cap Trinité et reste à 580 m en aval, avant d'amorcer une remontée brusque aux abords de Tadoussac. Indice d'une vallée glaciaire, les parois sont lisses, usées par le passage d'une langue de glace. De même les vallées suspendues de part et d'autre des versants sont aussi une preuve qu'il s'agit bien d'une auge glaciaire, subséquemment envahie par la mer. La largeur du fjord va en diminuant vers Tadoussac; de 3,5 km près de Chicoutimi, elle n'est plus que de 1,3 km à Tadoussac, autre caractéristique propre aux fjords. La caractéristique principale vient de la profondeur du plancher marin. En moyenne, il se situe à 240 m, mais se relève à seulement 22 m aux abords de Tadoussac; c'est ce qu'on appelle le « seuil » à l'embouchure du fjord.
Cette disposition est contraire au profil normal des cours d'eau, fleuves ou rivières. Elle s'explique uniquement par le creusement d'une langue glaciaire qui termine sa course par le contact avec les eaux marines au sortir de la vallée. La glace s'amincit au contact de l'eau de mer, elle est soulevée et commence à flotter, perdant ainsi tout pouvoir d'érosion. C'est pourquoi il demeure toujours un seuil de roche en place à l'embouchure des fjords - c'est le cas du Saguenay - et ce seuil joue même un rôle dans la biologie marine du fjord car il emprisonne, en amont, des eaux froides qui conviennent à la faune marine en profondeur. L'entrée de l'estuaire du Saint-Laurent était déjà libre de glace il y a 13 000 ans. C'est par le couloir du fjord que les eaux de l'Atlantique vont envahir les Basses terres du lac Saint-Jean et créer la mer de Laflamme, tributaire de la mer de Champlain (voir Mer Champlain) qui aura des effets identiques dans cette région: dépôts de strates argileuses propres à l'agriculture.
En amont de Chicoutimi, le fjord devient une rivière qui est le seul émissaire des eaux du lac Saint-Jean et de son immense bassin hydrographique de 79 000 km2. La rivière Saguenay a un débit de 1200 m3/s avec des pointes de 1600 m3/s en période de crues. Cependant, elle n'aura jamais reçu autant d'eau que pendant la crue millénaire du 11 juillet 1996 au cours de laquelle il est tombé environ 180 mm de pluie en 36 h dans la région, une masse stagnante d'air humide venant en contact avec un courant froid dérivant du nord.
L'importance du débit de la rivière et surtout les nombreuses ruptures de pente du môle de Kénogami ont tôt fait d'attirer dans la région des usines énergivores telles les usines de pâtes et papiers et surtout les usines d'aluminium, les plus grandes du monde à Alma, Jonquière et Laterrière. Dans la course à l'hydroélectricité, le Saguenay a suivi de près le Saint-Maurice (voir Rivière Saint-Maurice). En 1925, le barrage de l'Isle-Maligne est érigé et le niveau du lac Saint-Jean est haussé de 5,3 m pour transformer le lac en un réservoir destiné à stabiliser le débit de la rivière. Dès lors, l'industrie métallurgique devient le moteur économique de la région. Pour les besoins des armées en guerre, on construit en hâte le grand barrage de Shipshaw qui apporte 896 Mw d'un coup. Les centrales du Saguenay vont hausser leur puissance installée à 2300 Mw dans cette région, dont le centre est la conurbation de Jonquière et Chicoutimi, forte de 166 000 habitants.
Le fjord du Saguenay est une richesse naturelle qui doit être préservée. De nombreuses espèces marines fréquentent ses eaux dont le béluga, le rorqual et la baleine bleue qui viennent s'alimenter à son embouchure. Un parc marin et un parc de conservation des terres riveraines ont été érigés pour préserver ce milieu sensible. Depuis plus d'un siècle, il y a constamment des croisières sur le Saguenay pour permettre aux touristes venus de partout admirer le fjord le plus accessible en Amérique du Nord. (Voir Parc du Saguenay; Rivière Saguenay.)