Kingston
Ville située à l'extrémité est du lac Ontario, fondée par Frontenac en 1673 sous le nom de Fort Cataraqui et rebaptisée Fort Frontenac par la suite. Tombée aux mains des Anglais en 1758, elle fut nommée Kingston en 1783 par des Loyalistes fuyant New York. En 1991, la ville comptait plus de 61 000 habitants (116 000 avec la banlieue). Son premier centre d'activité musicale fut l'église [anglicane] Saint George's qui reçut un orgue mécanique avant 1800, mais dont les cylindres peu nombreux firent dire au pasteur que ses paroissiens n'avaient jamais eu à se plaindre de nouveaux hymnes (Anderson, p. 15). Vers 1802, une chorale de 30 voix commença à participer aux offices dominicaux et, en 1818, la Kingston Patriotic Society offrit à l'église un orgue à clavier. La vie culturelle dépendait surtout des officiers de la garnison et, dès 1812, la Gazette faisait état d'une représentation de The Doctor's Courtship« entremêlée de musique vocale et instrumentale », donnée par la Theatrical Amateur Society of the Gentlemen of the Army and Navy. La musique du régiment égayait défilés et concerts, et jouait des quadrilles lors des bals, dîners, pique-niques et soirées de charité.
De 1841 à 1844, Kingston, qui abritait quelque 8000 habitants, fut le siège du gouvernement canadien; l'Université Queen's fut fondée en 1841. Pour la « ville du calcaire », ce fut une époque d'essor remarquable, y compris musicalement : le 13 septembre 1841, le ténor anglais John Braham y donna un « Grand Concert »; en 1842, la Kingston Vocal Sacred Music Society était active, et la Kingston Amateur Band donna des concerts en 1843. Plusieurs commerçants faisaient de la publicité pour des pianos et autres articles; l'un d'eux, Abraham Nordheimer, arriva en 1842 pour enseigner la musique; peut-être l'un des organisateurs de la Kingston Harmonic Society en 1844, il déménagea la même année à Toronto. En 1846, Charles Ambrose fils fonda une Philharmonic Society. Il y avait deux théâtres et deux salles publiques, et on enseignait la musique dans plusieurs écoles de jeunes filles. Cette période de croissance fut toutefois suivie d'un bref déclin et, en 1849, le rédacteur en chef de The British Whig déplorait la disparition de la Philharmonic Society (due au départ d'Ambrose à Toronto en 1848) et l'annulation des « Promenade Concerts » promis par la musique du 20e régiment. On se consola quelque peu avec la visite, en 1850, de la Société musicale Germania, un orchestre de Berlinois.
En 1862, John C. Fox, de New York, fonda une manufacture de pianos qui eut bientôt la réputation d'être alors la plus importante du Canada. Fox mourut en 1868 et, dans les années 1870, Weber & Co. (Weber Piano Co.) devint la plus importante manufacture d'instruments de la ville. Toujours pour le XIXe siècle, citons aussi J. Reyner (harmoniums et mélodéons) et Wm. Wormwith (pianos).
En 1879, trois ans après la fondation du Royal Military College, la Martin's Opera House ouvrit ses portes. C'est là, en 1889, qu'eut lieu la première représentation d'un des plus célèbres opéras légers canadiens du XIXe siècle, Leo, the Royal Cadet d'Oscar Telgmann, un « opéra militaire canadien » dont l'action se situe à l'école militaire. Le théâtre brûla le 6 décembre 1898, mais trois ans plus tard, on érigea sur son emplacement la Grand Opera House (par la suite Grand Theatre) qui accueillit des célébrités comme Nellie Melba et Ernestine Schumann-Heink, ainsi que la D'Oyly Carte Company.
Le compositeur de Leo allait participer à la vie musicale de Kingston pendant plus de 50 ans. Telgmann et sa femme, Alida Jackson, fondèrent en 1892 le Kingston Cons. of Music and School of Elocution et y enseignèrent jusqu'à la fin des années 1930. Le Telgmann Concert Party, né au début des années 1880, devint l'Orchestre symphonique de Kingston (1914-36). En 1953, Graham George le remit sur pied.
L'église Saint George's devint une cathédrale en 1862 et acquit une solide notoriété musicale, en particulier après la création de son choeur de jeunes garçons et d'hommes en 1892. Les maîtres de chapelle furent successivement J.O. Martin (1892-97), Robert Harvey (1897-1935), Frank Harrison (1935-41), George Maybee (1941-73) et John Gallienne (1974-90), à qui succéda en 1990 Mark Sirett, natif de Kingston. Le choeur s'est produit au Canada, aux États-Unis et en Angleterre et a réalisé plusieurs enregistrements. En 1986, l'église s'adjoignit un choeur de jeunes filles et d'adultes.
Parmi les chorales d'église de moindre importance actives en 1991, citons celle de l'église unie Chalmers (dirigée par David Cameron), celle de l'église unie de la rue Sydenham (F.R.C. Clarke) et celle de Saint Mary's (Norman Brown). La Kingston Choral Society, ensemble de 100 voix, fut fondée en 1953 par Graham George qui, à partir de 1946, participa de multiple façon à la vie musicale de Kingston : enseignement universitaire, musique religieuse, direction et composition.
Les Parr Christie Singers, les Gadabouts, Melos et les Sweet Adelines furent d'autres ensembles vocaux. Les Meistersingers et le Kinsmen's Club donnent chaque année une série de comédies musicales de Broadway. Tous les ans depuis 1990, le Northern Opera Theatre monte un opéra. En 1974, David Cameron fonda les Pro Arte Singers, un choeur de chambre de 28 voix qui devint professionnel en 1980. Ses directeurs furent Cameron (1974-83) et Brian Jackson (1983-87), à qui succéda Thomas Barker. Ce choeur a créé des oeuvres des compositeurs locaux David Barber, Richard Bronskill, John Burge et David Keane. David (William) Barber (Ottawa, 25 mars 1958; B.Mus., Université Queen's, 1980) a en outre fait partie des Pro Arte Singers et s'est produit comme contreténor solo. Il a été actif comme critique musical à partir de 1981 et est devenu rédacteur en chef de la section des spectacles au Whig-Standard de Kingston en 1991. Il est l'auteur de A Musician's Dictionary (Kingston 1983; réimpr., Toronto 1985), Bach, Beethoven and the Boys (Toronto 1986) et When the Fat Lady Sings (Toronto 1990). En 1991, les ventes globales de ces trois livres pleins d'humour totalisaient quelque 100 000 exemplaires.
L'Université Queen's, qui dispense depuis 1969 un programme de premier cycle en musique et qui a inauguré un édifice de la musique en 1974, encouragea la musique instrumentale en engageant les membres du Quatuor à cordes Vághy comme artistes résidents en 1968. Le quatuor regroupa jusqu'en 1988 des chefs de pupitre de l'OS de Kingston. Le Kingston Youth Orchestra fut fondé en 1968; il était dirigé en 1991 par James (Arthur) Coles (Toronto, 23 avril 1930; A.R.C.T. 1954, B.Mus., Toronto, 1954), éducateur, violoniste et chef d'orchestre. L'ONJ a tenu des sessions d'été à Kingston, à l'Université Queen's (1977-90). À partir de 1977, la pianiste Valery Lloyd-Watts (élève de Glen Geary à Vancouver, Pierre Souvairain au RCMT et Lamar Crowson en Angleterre) a organisé à Kinston, en juillet, un rassemblement international de professeurs et d'élèves de la méthode Suzuki. En tant que soliste, elle s'est produite au Canada en récital et avec des orchestres et a réalisé des enregistrements pédagogiques pour la méthode Suzuki et l'Alfred Publishing Co.
Parallèlement aux Jeux olympiques de Montréal en 1976, Kingston organisa un Festival des arts et de la culture dont la partie musicale mettait en vedette l'OS de Kingston, la Kingston Camerata, le Quatuor à cordes Vághy, le Canadian Wind Quintet et, comme invités, Camerata, le Canadian Brass et le Paul Horn Quintet. En 1991, les compositeurs Kristi Allik, István Anhalt, John Burge, F.R.C. Clarke, Clifford Crawley, Graham George et David Keane, ainsi que les musiciens de jazz Chris McCann et Dave Barton habitaient Kingston. C'est la ville natale de Bryan Adams, la professeure Katherine Burrowes, le baryton George MacFarlane, Gordon Monahan, Walter Murdoch, Billy O'Connor et les cinq membres du groupe rock Tragically Hip.