Vue du village de Tsiigehtchic à partir de la route Dempster, été1993. Au bas de l'image et à droite de l'église, on voit trois cavités connues sous le nom de Deetrin' ehchįį k'yit, qui se traduit par « lit de Corbeau ». C'est là qu'était le camp de Corbeau à l'époque oÎ les gens et les animaux pouvaient parler entre eux et changer de forme. L'histoire de comment Corbeau a perdu son bec et a utiliséla ruse pour déjouer les gens et le reprendre s'est déroulée à cet endroit.
Pendant des milliers d'années, Nagwichoonjik a joué un rôle important dans la vie quotidienne des Gwichya Gwich'in, dans un sens pratique et spirituel. Comme l'Aîné Gwichya Gwich'in Gabe Andre explique, Nagwichoonjik « est comme une autoroute pour nous »; le fleuve sert de route pour accéder aux nombreuses ressources que l'on trouve le long de son cours, ainsi qu'à d'autres localités situées à l'intérieur des terres. Il a rassemblé des voisins, parfois dans des rencontres commerciales et sociales et d'autres fois, beaucoup moins amicales. Plusieurs histoires y sont ancrées; elles offrent un aperçu de la culture et de l'histoire des Gwich'in et remontent dans le temps jusqu'aux aventures de Corbeau, lorsque les gens et les animaux étaient égaux et pouvaient changer de forme. Le thème principal de toutes ces histoires est que les gens et le territoire, incluant le fleuve, sont interdépendants et que tout et tous sont reliés. Nagwichoonjik, qui constitue la partie centrale du territoire traditionnel des Gwichya Gwich'in, a façonné leur culture et leur histoire et fait partie d'un paysage culturel important au sein de leurs terres.
Le lieu historique national de Nagwichoonjik a été désigné en 1997 en tant que Paysage culturel autochtone. Il est formé d'un segment de 175 km du fleuve Mackenzie, entre Vihtr'ii Tshik (Thunder River) et Srehtadhadlâîî (Point Separation), ce qui en fait le plus gros lieu historique national au Canada. Les limites du site ont été établies à 5 km à l'intérieur des terres à partir de du fleuve, afin d'assurer que tous les sites archéologiques et culturels les plus importants qui y sont associés soient inclus. Le site est géré par le Conseil tribal des Gwich'in, en collaboration avec des agences fédérales et territoriales responsables de l'aménagement des terres.
Les Gwichya Gwich'in ont nommé ce paysage culturel pour reconnaissance comme lieu historique national afin de promouvoir et de célébrer leur culture et leur histoire avec leurs enfants et les visiteurs. Le site compte environ 50 toponymes souvent reliés à des histoires et rattachés à des collines, des ruisseaux, des rivières, des camps, des lieux de sépulture et des lieux sacrés situés le long de Nagwichoonjik. Les récits associées avec ces endroits s'échelonnent dans le temps depuis les débuts de l'histoire des Gwich'in jusqu'aux camps et cabines contemporains où d'anciennes traditions, la narration d'histoires, le savoir et des activités culturelles sont toujours d'actualité. La chasse, la pêche et la récolte de plantes et de baies à Nagwichoonjik continuent d'être des activités importantes, pratiquées en groupes familiaux. D'autres sites dans ce paysage culturel incluent des sites archéologiques datant d'avant l'arrivée des Européens, tels des camps de pêche et une carrière lithique où l'on s'approvisionnait en matières premières pour la confection d'outils de pierre, des sentiers, ainsi que des sépultures. Les visites historiques par les explorateurs Alexander Mackenzie et John Franklin, des vestiges de postes de traite et le site de l'ancienne communauté Arctic Red où fut construite, en 1883, l'une des plus anciennes missions catholiques romaines sur le territoire des Gwich'in, contribuent tous au contexte historique de Nagwichoonjik.
L'utilisation continue de Nagwichoonjik démontre la relation proche et continue que les Gwichya Gwich'in maintiennent avec ce paysage culturel. Comme le démontre l'histoire orale des Gwichya Gwich'in, Nagwichoonjik a été, à travers le temps, une « autoroute » pour bien des gens, au-delà du contexte culturel ou social.