John Montgomery
John Montgomery (1788-1879) naît à Gagetown, au Nouveau-Brunswick. Il est le fils d’Alexander Montgomery. Alexander a immigré au Nouveau-Brunswick après la Révolution américaine. En 1798, la famille Montgomery s’installe à York, au Haut-Canada, où Alexander et John exploitent plusieurs tavernes au cours des années.
La taverne Montgomery ouvre ses portes vers 1830, sur la rue Yonge, dans le secteur d’Eglinton. Parfois appelée The Sickle And The Sheath (la faucille et le fourreau), on la décrit comme « une grande auberge au bord du chemin, avec une large terrasse en avant, et une lampe suspendue au-dessus de la porte centrale. »
Mouvement réformiste
John Montgomery soutient le mouvement réformiste, qui dénonce le népotisme et le patronage qui prévalent dans la politique du Haut-Canada. Il participe au financement des voyages de William Lyon Mackenzie en Angleterre pour présenter des pétitions au Colonial Office. John Montgomery contribue aussi à la fondation de la Banque du peuple, il signe une déclaration des réformistes de Toronto et il est membre d’un comité de vigilance destiné à faire appliquer ses résolutions.
Au printemps de 1837, les réformistes constatent que toutes les possibilités de changement politique par des voies constitutionnelles sont bloquées, et qu’une résistance plus active est nécessaire. Les réformistes commencent à se faire attaquer par des bandes affiliées à l’ordre d’Orange. Simultanément, William Lyon Mackenzie attire de grands rassemblements dans des réunions politiques et des exercices de tir. Il conclut que la meilleure chose à faire est de conduire les foules vers Toronto pour occuper l’assemblée du gouvernement et détenir le lieutenant-gouverneur sir Francis Bond Head.
Quartier général des rebelles
William Lyon Mackenzie fixe le jour du soulèvement au jeudi 7 décembre et choisit comme lieu de rassemblement la taverne Montgomery. Dès lundi, des protestataires commencent à s’assembler dans la taverne.
On demande à John Montgomery de fournir de la nourriture et d’autres approvisionnements aux hommes rassemblés, ce qu’il refuse de faire. La requête le surprend, car à ce moment, il a loué la taverne à John Linfoot. Bien que celui-ci n’a pas encore officiellement pris possession de la taverne, il s’y est déjà installé. Cependant, John Montgomery occupe encore une des pièces de la taverne. La réaction de John Montgomery n’a pas de quoi surprendre. Il s’est querellé avec William Lyon Mackenzie, n’a pas participé à plusieurs des dernières réunions, et on le tient à l’écart des préparatifs du soulèvement.
William Lyon Mackenzie installe trois lignes de sentinelles au nord, au sud et directement devant la taverne, pour empêcher des loyalistes voyageant vers le sud de transmettre des renseignements à Toronto. Les prisonniers arrêtés par les sentinelles sont détenus dans la taverne.
Dans la nuit de lundi, près de 90 protestataires sont arrivés à la taverne, où ils découvrent qu’il n’y a rien à manger. John Linfoot, le nouveau propriétaire de l’auberge, est un Tory, partisan du gouvernement, et il exige d’être payé d’avance pour approvisionner les hommes. William Lyon Mackenzie se voit obligé de puiser dans le maigre fonds qui a été prévu pour payer un petit souper. Le lendemain, le mardi 5 décembre, John Montgomery accepte, sous la contrainte, de fournir un repas aux insurgés.
Bataille de la taverne Montgomery
Plus tard dans la journée de mardi, William Lyon Mackenzie et 800 rebelles non entraînés empruntent la rue Yonge vers le sud pour se rendre à la ville, mais ils sont arrêtés par un poste de garde que le shérif William Jarvis a installé là où se trouve aujourd’hui l’intersection des rues Yonge et Maitland, près de l’actuelle rue College. Les protestataires, qui ne s’attendaient pas à participer à un soulèvement armé, font défection pendant les deux journées suivantes.
Le nombre des nouveaux arrivants à la taverne ne compense pas celui des défections, et le 7 décembre les insurgés ne sont plus que 500. Ils sont très mal équipés pour affronter le millier de miliciens et de volontaires envoyés vers le nord sous le commandement du colonel James FitzGibbon pour écraser la rébellion. Près de 150 rebelles, armés de piques et de carabines, sont postés dans les bois à l’ouest de l’auberge ; une soixantaine d’autres sont placés dans les champs à l’est. Les autres, sans armes et sans utilité stratégique, attendent autour de la taverne ou s’abritent à l’intérieur.
Quand les forces de James FitzGibbon arrivent à la taverne, l’escarmouche ne dure que 15 minutes. Le colonel dispose de deux canons, qui permettent de disperser rapidement les insurgés. Deux boulets de canon traversent la taverne. Avant que l’édifice soit pris, les insurgés font sortir par l’arrière les loyalistes détenus depuis lundi et les libèrent.
Le lieutenant-gouverneur Bond Head accorde son pardon à beaucoup de rebelles tout de suite après la bataille, mais ordonne que la taverne soit brûlée jusqu’au sol. Un seul des rebelles, Ludwig Wideman, est mort dans la taverne pendant la bataille. Un certain nombre d’insurgés et quelques loyalistes ont été blessés.
Répercussions
Après le combat, John Montgomery est arrêté et accusé de haute trahison. Trouvé coupable, il est condamné à mort et sa sentence est commuée. Alors qu’on le conduit à Fort Henry, il s’échappe et s’enfuit à Rochester, New York, où il rencontre à nouveau William Lyon Mackenzie. Il reçoit son pardon en 1843.
De retour à Toronto, John Montgomery soumet des pétitions demandant une compensation pour la perte de sa taverne, mais il n’obtient rien avant 1873. À ce moment, un comité de l’Assemblée législative, sous Oliver Mowat, évalue le montant de ses pertes à plus de 15 000 $. Il reçoit une compensation de 3 000 $.
Postérité
Dans les décennies qui suivent la Rébellion, le site de la taverne Montgomery est occupé par plusieurs hôtels, puis est acheté par Postes Canada. La succursale postale K y demeure jusqu’en 2012, quand la propriété du bureau de poste est vendue. Le 15 mai 1925, on y installe une plaque commémorative, qui est aujourd’hui entretenue par la Commission des lieux et monuments historiques du Canada.
Il n’y a aucune trace connue de la taverne d’avant 1837. On ne connaît pas son emplacement exact ni son empreinte au sol.
(Note : La taverne Montgomery ne doit pas être confondue avec l’auberge Montgomery’s Inn à Etobicoke, qui était en activité à la même époque et qui appartenait à Thomas Montgomery, qui n’a aucun lien avec John Montgomery.)