Robin Blaser est une figure importante de la Renaissance de San Francisco dans les années 1950 et 1960. Sa poésie explore le pouvoir de la langue et son rôle dans la définition et la création de l’expérience humaine. Ses œuvres jouent sur la forme et la ligne, mélangeant souvent la prose narrative et les séries de vers. Il est lauréat du prestigieux prix Griffin pour la poésie et est membre de l’Ordre du Canada.
Enfance et éducation
Après avoir passé son enfance dans l’Idaho, Robin Blaser part vers l’ouest, en 1944 à Berkeley, en Californie, où, entouré des poètes Jack Spicer et Robert Duncan, il s’implique dans la scène locale de la poésie. En 1955, Robin Blaser commence sa carrière universitaire en tant que bibliothécaire à l’Université de Harvard à Cambridge, au Massachusetts. Il présente ses œuvres dans un festival de poésie à Vancouver en 1966 et, la même année, après qu’on lui ait offert un poste de professeur à la Simon Fraser University (SFU), il immigre au Canada. Il devient citoyen canadien en 1972 et reste à l’emploi de la SFU jusqu’à sa retraite en 1986.
Influences majeures
Robin Blaser est un écrivain prolifique; il publie en effet plus de 14 recueils de poésie, 11 livres d’essais, le livret d’opéra de The Last Supper (2000), ainsi que plusieurs traductions. Deux des plus grandes sources d’inspiration chez Blaser sont la nature, que son amour du jardinage et des arbres confirme, et les personnages des classiques de la littérature, qu’il étudie en grec et en latin. Robin Blaser parle aussi de façon courante l’allemand, le français, l’italien et le portugais. Son humour intelligent et pince-sans-rire caractérise ses œuvres qui sont parfois cyniques, parfois sarcastiques, mais toujours songées. Il attire les foules à chacune de ses participations à des conférences et des festivals grâce à son humour et à la façon dont il parle de poésie avec authenticité et conviction.
Son premier recueil, The Moth Poem, est créé lorsqu’il découvre une noctuelle prisonnière de son piano, puis dans un cendrier débordant. Le poète utilise la noctuelle comme métaphore de l’éphémérité de la langue, de la lutte du poète, et de la nature même du monde qu’il tente d’exprimer :
the moth in the piano
will play on
frightened wings brush
the wired interior
of that machine
La noctuelle représente le poète qui « continuera » devant la « machine » de la société qui marginalise la poésie. En partant d’abord de son expérience individuelle avec un minuscule papillon, Robin Blaser crée un récit épique et une expérience universelle en dévoilant comment chaque vie fait partie d’un univers plus grand.
Le cosmos des langues
Robin Blaser croit que la langue est le cosmos de la poésie et que le rôle de cette dernière est de créer un cosmos sans cesse en expansion qui expose tous les mondes qui constituent l’expérience humaine : « des mondes dans d’autres mondes ». Pour lui, chaque langue apprise ouvre un nouveau monde, un nouveau territoire dans lequel on peut faire des liens avec les autres et ainsi agrandir tous les mondes, qu’ils soient intérieurs et extérieurs, poétiques ou réels. Dans le poème « The Medium », par exemple, il décrit la langue en ces mots :
it is essentially reluctance the language
a darkness, a friendship, tying to the real
but it is unreal
the clarity desired, a wish for true sight,
all tangling
La langue n’est jamais source de frustration pour Robin Blaser. Au contraire, ses « enchevêtrements », aux mille sens possibles, le fascinent.
Son poème le plus célèbre, « Even on Sunday », écrit dans le cadre des Jeux gais de Vancouver en 1990, soulève les dangers d’une société aspirant à l’homogénéité. Nommant d’abord les plus noires erreurs de l’humanité, il en vient à parler de responsabilité individuelle. Il y aborde les souffrances créées par l’Holocauste, le racisme aux É.-U. et le refus de donner l’entièreté de leurs droits aux femmes et aux homosexuels à travers le monde. Il lutte contre « toute forme de caractère étranger » et demande que l’inclusion de l’humanité ne soit pas seulement légiférée, comme le droit d’expression, mais qu’elle devienne une pratique mentale. Il croit fermement que les contraintes d’une société et d’une culture homogènes sur les individus répudient « l’existence même de leur différence. »
Image-Nations
Pendant trente ans, Robin Blaser écrit un recueil de poèmes intitulé Image-Nations, qui explore les rituels et les icônes de notre société : les figures mythiques, les sacrements religieux et la langue sacrée. Dans Image-Nation 9 (half and half, par exemple, Robin Blaser démystifie les dieux en les réduisant à des formes qui nous permettent de mieux comprendre leur rôle dans nos vies :
there are shining masters
when I tell you what they
look like some of it is
nearly false
their blue hair
but they are not ourselves
Dans Image-Nation 21 (territory), il fait référence au rituel de la mort et de la commémoration, suggérant au passage le rôle d’agrandisseur du cosmos du poète : « …he did not search / out death or courage, did not / found something, a country, / or end it, but made it endless… » Les idées d’expansion et d’inclusion sont des thèmes clés pour le poète qui croit que chaque monde individuel mérite de faire partie du cosmos plus grand.
Essais
The Fire, son acclamé livre d’essais, est une collection de ses réflexions sur la poésie, les poètes et leur besoin d’une communauté pour qu’ils puissent « entretenir et noter leur relation passionnée avec le monde extérieur… »
Les essais de Robin Blaser incluent la voix de nombreux collègues poètes, écrivains et penseurs, et donnent ainsi au lecteur l’accès à une discussion approfondie sur la poésie et son rôle dans nos vies, qui serait, selon Robin Blaser, d’offrir une vision globale du monde.