Suzy Lake, photographe, artiste de performance, vidéaste (née le 14 juin 1947 à Détroit, au Michigan). Suzy Lake est une artiste féministe influente qui soulève des questions d'identité, de beauté, de genre et de vieillesse dans ses pièces visuelles et de performance. Elle fut l'une des pionnières dans le mouvement des centres gérés par les artistes au Canada. Elle figure dans les collections des institutions majeures au Canada comme à l'étranger, notamment au Musée des beaux-arts de l'Ontario, le Musée des beaux-arts de Montréal, la Vancouver Art Gallery et la Albright-Knox Art Gallery à Buffalo, dans l'État de New York.
Enfance et éducation
Suzy Lake étudie la peinture, le dessin et la sérigraphie à Détroit, au Michigan, aux universités Wayne State et Western Michigan. Lorsqu'elle est inscrite à Wayne State, elle milite beaucoup. Parmi ses principales activités, elle fait du bénévolat pour Detroit Mothers, un organisme qui vient en aide aux mères monoparentales du quartier défavorisé Jeffries Housing Project en prenant soin de leurs enfants pendant la journée. Pendant les émeutes raciales de Détroit en 1967 qui ont lieu dans son quartier, elle réalise que la situation politique s'est détériorée et qu'elle doit quitter la ville.
Suzy Lake pense déménager à New York et à Boston, mais en raison de son copain peintre, qui souhaite échapper à la conscription de la guerre du Vietnam, elle finit par s'installer à Montréal en 1968.
En 1971, Suzy Lake est l'assistante de Guido Molinari, qui lui sert aussi de mentor. Autodidacte dans les domaines du cinéma, de la photographie et des arts de performance, Suzy Lake est une membre active de la communauté artistique de Montréal dans les années 1970. En 1972, elle cofonde la galerie indépendante Véhicule Art Inc. et en 1977, elle obtient une maîtrise en études multidisciplinaires et en photographie de l'Université Concordia.
Photographie
Dès ses débuts de carrière, elle pratique une forme d'art conceptuel qui emploie la photographie, non pas à titre de représentation transparente de la réalité, mais bien comme un outil de communication et de questionnement. En utilisant ses propres performances, planifiées expressément pour l'appareil photo, Suzy Lake questionne l'apparence, les gestes et les positions du corps et crée une métaphore pour la condition psychologique. Dans les séries Suzy Lake As (1974) et Are You Talking To Me? (1979), par exemple, la manipulation subtile des traits du visage ou les expressions de confrontation exigent la participation du spectateur. Des photographies plus récentes, comme la série Pre-Resolution (1984), ou encore Too Many Stones (1996), montrent le corps humain dans son aspect actif et puissant, plutôt qu'en tant qu'objet de désir. En se mettant elle-même dans des situations de déconstruction ou de reconstruction, l'artiste dramatise l'autotransformation que sous-tend l'autoportrait en photographie.
Le thème de la vieillesse
À titre d'artiste qui s'intéresse depuis toujours à des questions comme l'identité, le genre et la politique du corps féminin, il est tout naturel pour Suzy Lake d'étudier la vieillesse. Dans les trois tryptiques qui comprennent Peonies and the Lido (2002), par exemple, les deux panneaux extérieurs montrent des pivoines roses en gros plan et le panneau central présente des images de l'artiste, allongée sur une chaise de plage sur le Lido, à Venise, vêtue comme Gustav von Aschenbach, personnage de la nouvelle La Mort à Venise de Thomas Mann (ou plutôt, comme l'acteur Dirk Bogarde qui joue le personnage de Gustav von Aschenbach dans l'adaptation cinématographique de Luchino Visconti). Habillée de lin blanc, le visage maquillé de façon grossière avec du mascara, Suzy Lake expose ironiquement l'aspect morbide et décadent de l'histoire, tout en soulignant la fragilité et donc la mortalité du corps.
Pour sa série Reduced Performing en 2008 et 2009, Suzy Lake produit des images de son corps à partir d'un numériseur. Dans ces photographies, son corps à une seule dimension devient un objet, comme si l'image est créée à des fins médicales : le corps y apparaît sans subjectivité, il n'est qu'un système abstrait de membres reliés entre eux.
Distinctions et expositions
Les oeuvres de Suzy Lake sont exposées partout au Canada, notamment lors d'expositions individuelles à la Mount Saint Vincent University Gallery à Halifax (1977), à la Art Gallery of York University à Toronto (avec Martha Rosler, 1996), au Musée canadien de la photographie contemporaine (1993) et au Macdonald Stewart Art Centre à Guelph (1992). Un survol de son oeuvre, intitulée Political Poetics, est présenté au University of Toronto Art Centre en 2011, et une rétrospective de sa carrière, Introducing Suzy Lake, est montée au Musée des beaux-arts de l'Ontario à l'automne 2014. Elle figure aussi dans des expositions de groupe au Los Angeles Museum of Contemporary Art (2007), au Santa Monica Museum (2007), à la Mendel Art Gallery à Saskatoon (1993) et au International Center of Photography à New York (1978).
Ses pièces sont représentées dans de nombreuses collections publiques, dont celles du Musée des beaux-arts de l'Ontario, du Musée des beaux-arts de l'Ontario, du Musée d'art contemporain de Montréal, de la Art Gallery of Hamilton, du Musée du Québec à Québec et du Albright-Knox Art Gallery à Buffalo.
Suzy Lake commence à enseigner les arts à l'Université de Guelph en 1988, pour enfin devenir professeure au département des beaux-arts, poste qu'elle occupe jusqu'à sa retraite en 2008. En 1997, elle reçoit le prix Toronto Arts dans la catégorie des arts visuels. Elle est aussi membre de l'Académie royale des arts du Canada.