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Vaccins contre la COVID-19

Au début de 2020, alors que la pandémie de COVID-19 prenait de l’ampleur, le développement et le déploiement d’un vaccin sécuritaire et efficace en un à deux ans semblaient très peu probables. Jusqu’à ce moment-là, jamais un vaccin contre un nouveau virus n’avait été conçu durant une pandémie, et il n’existait encore aucun vaccin autorisé pour prévenir les infections par le coronavirus chez l’humain. Malgré cela, le premier vaccin contre la COVID-19 a été approuvé en décembre 2020, soit environ un an après la signalisation des premiers cas. En juillet 2021, on comptait plus de 30 vaccins contre la COVID-19 approuvés pour un usage public par au moins une autorité réglementaire nationale. Cette avancée était attribuable aux nombreuses décennies de recherche sur les coronavirus et sur la technologie des vaccins, notamment sur l’utilisation de l’acide ribonucléique messager (ARNm), ainsi qu’à d’importants investissements gouvernementaux, et à une collaboration sans précédent entre les gouvernements, les laboratoires de recherche universitaire, les compagnies pharmaceutiques et les organisations de santé internationales. Plusieurs scientifiques canadiens ont joué un rôle important dans les éléments clés la recherche qui a mené au développement des vaccins à ARNm de Pfizer et de Moderna.

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Morphologie structurale du virus de la COVID-19

Coopération internationale et financement gouvernemental

La séquence génétique du virus SARS-CoV-2 est rendue publique le 12 janvier 2020. Cette annonce entraîne un niveau de financement gouvernemental sans précédent ainsi qu’une grande collaboration avec les laboratoires de recherche universitaires, les entreprises pharmaceutiques, et les organisations de santé internationales axées sur la recherche et le développement d’une longue liste de vaccins potentiels. En avril, près de 80 entreprises et instituts de 19 pays différents s’attaquent au défi de trouver un vaccin contre la COVID-19. À ce moment-là, l’Organisation mondiale de la santé et ses partenaires lancent le Dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 (Accélérateur ACT) afin de favoriser la collaboration à l’échelle planétaire ainsi que le développement, la production et l’accès équitable aux tests, aux traitements, et aux vaccins contre la COVID-19. Le 15 mai de la même année, le gouvernement des États-Unis lance l’opération Warp Speed pour assurer le développement, la production, et la distribution rapides, sécuritaires et efficaces de vaccins, de traitements, et de tests. Cette mesure aide les entreprises à accélérer le lancement d’essais cliniques pour plusieurs vaccins potentiels à l’automne 2020 et permet de fixer un objectif de produire 300 millions de doses avant janvier 2021.

Essais cliniques

En général, il faut environ 10 à 15 ans pour développer un nouveau vaccin, en partant du concept initial jusqu’aux trois phases d’essais cliniques, en passant par l’approbation réglementaire, la production, la distribution et, enfin, l’injection dans les bras. Il s’agit normalement d’un processus d’essais cliniques en étapes linéaires. La première phase vise principalement à tester la sécurité du vaccin chez des personnes en santé. La deuxième phase évalue la réponse immunitaire, les niveaux de dosage, et les effets indésirables. La troisième phase teste l’efficacité du vaccin pour prévenir la transmission de la maladie et l’infection. Toutefois, pour répondre à l’urgence de la pandémie, un processus d’étapes parallèles est mis au point; aucune étape ne peut être raccourcie ou supprimée, mais elles peuvent se chevaucher.

Recherches sur le vaccin

Pour mettre au point des vaccins contre la COVID-19, des approches à la fois nouvelles et bien connues sont adoptées. L’une des approches les plus connues consiste à inactiver le virus en entier pour déclencher une réponse immunitaire. Une autre méthode bien connue, mais plus récente, utilise un vecteur viral (un virus ou une bactérie inoffensifs) afin de livrer le matériel génétique permettant de coder un antigène spécifique du virus infectieux dans les cellules hôtes du receveur afin de stimuler l’immunité de ce dernier. Toutefois, l’approche la plus réussie pour le vaccin contre la COVID-19 est un processus relativement nouveau basé sur l’utilisation de l’ARN messager (ARNm). Bien qu’il semble nouveau, ce processus est basé sur des décennies de recherche qui ont commencé dans les années 1980 et ont progressé sur plusieurs fronts distincts. L’un de ces fronts de recherche était dirigé par une équipe canadienne de l’ Université de la Colombie-Britannique, qui a littéralement fourni la clé du succès des vaccins à ARNm contre la COVID-19.

Recherche et développement de la technologie à ARNm

L’acide ribonucléique messager (ARNm) est une molécule monocaténaire qui correspond à la séquence génétique lue par un ribosome (la structure moléculaire qui lie les acides aminés entre eux dans les cellules) lors de la synthèse d’une protéine spécifique. Un vaccin à ARNm est conçu pour livrer des molécules d’ARNm codant pour l’antigène dans les cellules immunitaires. Ces cellules utilisent ensuite l’ARNm spécifique comme modèle pour fabriquer une protéine étrangère distinctive qui serait normalement produite par un agent pathogène, comme le virus de la COVID-19. Ces protéines stimulent alors une réponse immunitaire adaptative qui enseigne au système immunitaire du corps de la personne vaccinée à reconnaître et à détruire le véritable agent pathogène s’il entre dans le corps et l’infecte.

Comment fonctionne le vaccin à ARNm

L’idée de déverrouiller et de synthétiser l’ARNm pour traiter des maladies et développer des vaccins émerge dans les années 1980. Au cours des années 1990, l’équipe de recherche de la biochimiste Katalin Karikó et de l’immunologiste Drew Weissman, de l’Université de Pennsylvanie, fait d’importants progrès dans le développement de vaccins à ARNm. Au milieu des années 1990, des vaccins à ARNm contre l’influenza et le cancer sont testés sur des souris. Toutefois, le principal défi limitant l’utilisation de l’ARNm dans les vaccins pour humains est le transport du matériel de l’ARNm à travers les parois des cellules immunitaires pour déclencher en toute sécurité une réponse immunitaire efficace.

Des chercheurs de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) jouent un rôle important dans la résolution de ce problème d’introduction d’ARNm dans les cellules immunitaires. En 1995, Pieter Cullis et son équipe, en collaboration avec Jeffery Wheeler, concentrent leurs recherches sur l’utilisation de nanoparticules lipidiques (NPL), qui sont des substances organiques grasses utilisées par les cellules vivantes pour former une bulle protectrice autour d’un médicament, surtout ceux destinés à la thérapie génique, afin qu’il puisse être livré dans les cellules. En 2005, l’équipe de l’UBC a déjà développé des nanoparticules lipidiques pour une variété d’utilisations. Cette même année, l’équipe de recherche de l’Université de Pennsylvanie fait une percée majeure. Elle met au point une méthode pour produire de l’ARNm synthétique qui pourrait être injecté en toute sécurité dans les cellules. (Voir aussi Recherche canadienne sur les nanoparticules lipidiques : l’élément clé des vaccins à ARNm contre la COVID-19.)

Pendant ce temps, en 2007, un autre Canadien, Derrick Rossi, établit un laboratoire à la Harvard Medical School pour poursuivre des travaux qui se basent sur ceux de Katalin Karikó et de Drew Weissman. Les recherches de Derrick Rossi utilisent l’ARNm pour faire en sorte que les cellules adultes fonctionnent comme des cellules souches embryonnaires. Cette recherche ouvre la porte à la reprogrammation des cellules à de nombreuses fins, comme la réparation de tissus endommagés et la génération d’organes humains pour les transplantations. À partir de ces travaux, la compagnie de biotechnologie Moderna est créée aux États-Unis, en 2010.

À ce stade, l’équipe de Pieter Cullis s’unit à Katalin Karikó et Drew Weissman pour se concentrer sur le développement d’un vaccin à ARNm utilisant des nanoparticules lipidiques pour encapsuler l’ARNm synthétique et lui permettant ainsi d’entrer en toute sécurité dans les cellules immunitaires. Ce travail suscite des collaborations avec la compagnie de biotechnologie allemande BioNTech et la compagnie pharmaceutique américaine Pfizer. En 2012, les premiers tests réussis d’un vaccin à base d’ARNm sont menés sur des souris, suivis du premier essai sur un humain du vaccin contre l’influenza en 2015.

Pendant ce temps, motivés par la menace croissante des coronavirus après l’épidémie de SRAS en 2003 et celle du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (SRMO) en 2012, les Instituts nationaux de la santé des États-Unis (NIH) commencent des recherches centrées sur la biologie des coronavirus et le développement de vaccins en 2014. Un résultat majeur de ce travail implique des études sur la protéine de spicule particulière aux coronavirus, et sur son rôle potentiel dans le développement de vaccins. Ces travaux mènent à une collaboration entre les NIH et Moderna.

Développement des vaccins contre la COVID-19

L’identification rapide du virus SARS-CoV-2 et la diffusion publique de sa séquence génétique en janvier 2020 accélèrent le développement de vaccins contre la COVID-19 basés sur des biotechnologies variées. Plus particulièrement, la propagation rapide de la pandémie incite l’entrelacement des différents fils de recherches axées sur les vaccins à ARNm et sur la biologie des coronavirus, dans le cadre des programmes accélérés chez Moderna et Pfizer-BioNTech pour développer des vaccins à ARNm contre la COVID-19. Ces projets sont d’ailleurs aussi accélérés grâce à des initiatives comme l’opération Warp Speed. Les essais cliniques des deux vaccins à ARNm démontrent des niveaux élevés de sécurité ainsi qu’une remarquable efficacité de 90 à 95 % pour la prévention des infections graves et des décès.

Le 2 décembre 2020, près d’un après l’apparition des premiers cas de COVID-19, le Royaume-Uni autorise l’utilisation d’urgence du vaccin à ARNm produit par Pfizer-BioNTech. Le Canada fait de même le 9 décembre, suivi par les États-Unis le 11 décembre. Au Canada, les premiers vaccins sont administrés le 14 décembre à des résidents de foyers de soins de longue durée et aux travailleurs de la santé de première ligne. Un deuxième vaccin à ARNm, produit par Moderna, est autorisé au Canada le 23 décembre. Un troisième vaccin, à base de vecteur viral, produit par Oxford-AstraZeneca, est approuvé au Canada le 26 février 2021, tandis qu’un quatrième vaccin, le vaccin à dose unique de Johnson & Johnson, est approuvé le 5 mars 2021. Un vaccin à base de protéines produit par Novamax Inc est autorisé par Santé Canada le 17 février 2022. Ce même mois, un vaccin à base de plantes produit par Medicago Covifenz est approuvé au Canada.

À l’échelle mondiale, en date du 4 mars 2023, on compte 50 vaccins contre la COVID-19 autorisés pour un usage public par au moins une autorité de réglementation, ainsi que 242 vaccins potentiels qui sont à divers stades de développement.

Utilisation du vaccin contre la COVID-19 au Canada et à l’international

En date du 3 mars 2023, 83,4 % de la population du Canada a reçu au moins une dose d’un vaccin contre la COVID-19, et parmi les personnes âgées de cinq ans et plus, ce nombre passe à 87,1 %. Sur la population totale, plus de 80,7 % sont entièrement vaccinés (au moins deux doses), et parmi les personnes âgées de cinq ans ou plus, le nombre passe à 84,5 %.

Bien que le Canada ait réussi à atteindre l’un des niveaux les plus élevés d’utilisation des vaccins contre la COVID-19 dans le monde, le taux de vaccination varie considérablement. En date du 8 mars 2023, 13,32 milliards de doses de vaccins contre la COVID-19 ont été distribuées sur toute la planète, et 69,7 % du total de la population mondiale a reçu au moins une dose. Cependant, de nombreux pays, surtout en Afrique, affichent de très faibles taux d’utilisations du vaccin contre la COVID-19. Plusieurs facteurs limitent et restreignent l’utilisation des vaccins contre la COVID-19 dans ces pays, comme des difficultés d’approvisionnement, d’entreposage et de distribution des vaccins, des enjeux dans la livraison à l’administration de vaccins par la santé publique et le personnel médical, et la résistance du public en raison de la réticence à la vaccination, du manque d’informations, ou de la désinformation persistante sur les vaccins contre la COVID-19. (Voir aussi Vaccination et réticence à la vaccination au Canada.)

Malgré tout, le développement et le déploiement de vaccins sécuritaires et efficaces contre une nouvelle maladie virale respiratoire mortelle comme la COVID-19, au cœur d’une pandémie sans précédent, demeurent une réussite historique remarquable.

Termes clés

Pandémie

Propagation d’une maladie infectieuse, généralement causée par un nouveau virus ou une nouvelle bactérie, affectant une large proportion de la population dans plusieurs pays ou dans le monde entier.

Santé publique

Services de santé, généralement de type préventif, fournis par un gouvernement afin d’améliorer la santé de ses citoyens au niveau de la population.

Vaccin

Préparation composée de bactéries ou de virus tués ou affaiblis, ou de leurs antigènes spécifiques, qui stimulent l’organisme qui y est exposé afin de développer une immunité contre ces mêmes bactéries ou virus.

Virus

Organisme trop petit pour être vu par les microscopes typiques, qui peut se multiplier à l’intérieur des cellules de son hôte, causant habituellement une maladie.