Will Ferguson a étudié dans l’ouest du Canada et obtenu un B.B.A. de l’Université York. Ses ouvrages englobent la totalité de l’expérience humaine. Les récits qu’il propose dans des genres aussi divers que le roman, l’essai, le carnet de voyage et les mémoires, ainsi que dans ses réflexions sur l’identité canadienne, décrivent des paysages et des milieux historiques, humains et géographiques montrant combien l’humanité est en évolution permanente.
Parmi les nombreuses publications de Will Ferguson, on trouve un certain nombre de livres écrits dans un style à la fois informatif et humoristique traitant de l’histoire et de l’identité canadiennes. Il écrit Why I Hate Canadians, le premier de cette série d’ouvrages publié en 1997, sous le choc d’un certain dépaysement culturel à son retour au Canada après avoir enseigné l’anglais au Japon pendant cinq ans. Dans un style ironique et irrévérencieux, il pointe les idées et les idéaux qui font du Canada un pays admiré avec envie dans le monde entier, mais qui, paradoxalement, semblent échapper quelque peu à l’attention de la population canadienne elle‑même. I Was a Teen‑Age Katima Victim: A Canadian Odyssey, publié en 1998, et Bastards and Boneheads: Canada’s Glorious Leaders, Past and Present, sorti l’année suivante, traitent également de l’histoire et de l’identité canadiennes sans se départir de ce ton de dénigrement critique ironique qui caractérise l’auteur. Canadian History for Dummies, paru en 2000, constitue sa version, plutôt véhémente, des origines du Canada dans laquelle il met à bas un certain nombre de mythes, écrivant notamment : « dire […] que l’ensemble de la population canadienne est constituée d’immigrés, y compris les autochtones, constitue, pour le moins, une déformation éhontée de la réalité » [traduction libre]. Toutefois, en dépit de cette autodérision, ses ouvrages traduisent son amour indéfectible pour le Canada, pour la diversité de ses cultures et pour sa « grande histoire ». Beauty Tips from Moosejaw, publié en 2004, lui vaut un deuxième Stephen Leacock Memorial Award for Humour. Il y dépeint le Canada comme une série d’avant‑postes : « Les avant‑postes ne sont pas seulement géographiques, ils peuvent être linguistiques, politiques, culturels […] de petites victoires pour la survie » [traduction libre]. Canadian Pie, publié en 2011, constitue un recueil hilarant d’articles remettant effrontément en cause un certain nombre des icônes les plus indéboulonnables du Canada, notamment Anne of Green Gables qu’il affuble du qualificatif de « toute‑puissante » et « les gros objets que l’on trouve le long des routes canadiennes ».
Les livres que Will Ferguson consacre aux voyages fascinent le lecteur grâce à un sentiment permanent de découverte. Dans Hitching Rides with Buddha (Hokkaido Highway Blues), paru en 1998, il rend compte de son périple japonais printanier le long de la route des cerisiers en fleurs. Il y déploie une langue poétique empreinte d’humour, réussissant brillamment à incarner la nature éphémère et fugitive d’une telle beauté « […] aussi rapidement qu’ils sont apparus […] ils tombent comme des confettis […] et leur disparition ouvre la voie à la chaleur de l’été rayonnant sur une nature d’un vert profond » [traduction libre]. Dans un deuxième ouvrage consacré à ses chroniques de voyage, datant également de 1998, The Hitchhiker’s Guide to Japan, il explore, du sud au nord du pays, les subtiles évolutions des identités culturelles. Dans Beyond Belfast: A 560‑Mile Journey Across Northern Ireland on Sore Feet qui remporte la Stephen Leacock Memorial Medal for Humour, il s’intéresse à l’opposition frappante entre la beauté saisissante de l’Irlande et les troubles tragiques qui la frappent.
En matière de fiction, Will Ferguson réussit à atteindre un équilibre audacieux entre veines comique, tragique et poétique. Son premier roman paru en 2001, Happiness, qui lui vaut une Stephen Leacock Memorial Medal for Humour, offre un regard ironique et mordant sur le monde de l’édition. Il nous donne à voir les excentricités et les qualités de ceux qui œuvrent sans relâche pour leurs auteurs : « […] des dizaines de ces éditeurs fouillent inlassablement des marécages de mots, remuant la boue […] des créatures les plus égoïstes que l’on puisse imaginer… les écrivains […] et, la plupart du temps fortuitement, un chef‑d’œuvre s’y glisse » [traduction libre]. Spanish Fly, sorti en 2008, propose un roman radicalement différent du précédent mettant en scène des personnages à la dérive dans le contexte de la Grande Dépression dans l’ouest du Texas. Des petits escrocs et des call‑girls font l’éducation de Jack, 19 ans, lui enseignant toutes leurs stratégies, plus ou moins licites, alors qu’il se débat pour tenter de survivre dans cette période troublée. Le récit, à l’instar de personnages à l’âme et au corps littéralement « asséchés », semble soumis à l’implacable logique de paysages battus inlassablement par les vents et par la poussière. Dans ces passages descriptifs, l’auteur évoque des « tempêtes sèches » et la « chaleur étouffante de blizzards noirs », faisant dire à ses personnages : « Les années de sécheresse sont bien là maintenant […] Pour nous, désormais, une sortie, c’est trois bouffées d’air frais avalées goulûment entre une tempête et la suivante » [traduction libre]. Son troisième roman, 419, lui vaut le prix Scotiabank Giller. Dans ce récit éclaté aux quatre coins du monde, l’auteur étudie la façon dont l’absence totale d’espoir conduit à la corruption de l’âme humaine. L’intrigue, particulièrement complexe, repose sur un phénomène « viral » transcontinental qui, par l’entremise de messages circulant d’un ordinateur à l’autre sur Internet, infecte la vie d’innocents prêts à croire n’importe quoi et à se rendre coupable d’actes condamnables dans un contexte où la pauvreté du pays dans lequel ils vivent bouche toute perspective d’avenir : « Je vous contacte aujourd’hui concernant une proposition d’affaires urgente […] la décision que vous prendrez aura d’importantes conséquences pour le futur […] d’une jeune femme » [traduction libre].
La précision de la langue de Will Ferguson, qu’elle prenne une forme poétique ou humoristique, donne vie, avec une vérité criante, aux paysages qu’il a parcourus et aux personnages qu’il a imaginés, traîtres et tragiques, vulnérables et vénaux, mais mystérieusement capables de se racheter, de s’élever et d’atteindre la grâce.
Will Ferguson vit à Calgary et continue à effectuer de très nombreux voyages.