« Pour honorer un acte de courage très évident ou pour rendre hommage à des actes de bravoure exceptionnels ou d'extrême attachement au devoir face à l'ennemi. » Des mots qui ne disent pas vraiment tout le courage et le dévouement reliés à la Croix de Victoria (V.C.), la plus haute distinction militaire accordée pour bravoure au Canada et dans le Commonwealth. C'est au cours de la rébellion indienne que William Neilson Hall, fils d'esclaves évadés, se mérita pour ses actes et au nom de la Couronne, la Croix de Victoria. Il fut le premier membre de la marine canadienne, le premier Noir et le premier Néo-Écossais à recevoir cette médaille prestigieuse.
Né à Horton Bluff (N.-É.), Hall est le premier Noir, le premier Néo-Écossais et le premier marin canadien à recevoir la Croix de Victoria (avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada/C-18743). |
En 1857, Hall était à bord du HMS Shannon en Extrême-Orient. C'est alors que les Sepoys de l'armée indienne de la East India Company se livrèrent à une mutinerie. L'insurrection se propagea rapidement, car elle était nourrie par un ressentiment à l'endroit des colonisateurs britanniques; elle éclata d'après une rumeur selon laquelle les cartouches des fusils Enfield des Sepoys auraient été graissées avec du lard de porcs et de vaches. Tout contact avec ces animaux détruirait la pureté des Mahométans et la caste des Hindous. Des navires de guerre britanniques, déjà dans les environs, furent dépêchés sur les ports indiens, dont le Shannon, sur Calcutta, où le capitaine reçut l'ordre d'envoyer des hommes par voies terrestres jusqu'à Cawnpore et Lucknow. Cawnpore, un important poste militaire sur la rivière Gange, était pourtant sous garde légère tellement Sir Hugh Wheeler, son commandant britannique, avait confiance en la loyauté de ses troupes Sepoys. La 2e cavalerie de Cawnpore souleva une mutinerie le 5 juin. Les Sepoys étaient beaucoup plus nombreux que les Britanniques et mirent peu de temps à les dominer. Les Sepoys tuèrent tous les Blancs, car ils croyaient qu'une fois tous les Blancs morts, les Britanniques ne reprendraient pas la ville. L'aide mit trop de temps à arriver.
La garnison du Lucknow, sous le commandement de Sir Henry Lawrence, fut entourée par les rebelles. Les forces britanniques étaient prêtes et livrèrent un bon combat en attendant des renforts, qui eux-mêmes durent se battre en cours de route contre des rebelles Sepoys. La « brigade Shannon » remonta le Gange jusqu'à Allahabad. Ils commencèrent leur trajet ardu par terre le 2 septembre, traînant huit canons avec lesquels ils espéraient reprendre le contrôle de la garnison, et ils subirent de nombreuses pertes.
Les canons les aidèrent à se battre en avançant en direction de la garnison. Il fallait six hommes pour manier un canon; chaque homme avait son numéro, à commencer par l'officier en charge. Si cet officier était tué ou blessé, l'homme no 2 prenait sa place en ligne, et ainsi de suite. Ce système de numérotation évitait la confusion, et le canon continuait de tirer. Alors que le groupe Shannon avançait en direction de Cawnpore, l'attaque des Sepoys s'intensifia. La force navale fut rejointe à Cawnpore par Sir Colin Campbell et ses Highlanders. Ils amorcèrent la très dangereuse marche de 72 kilomètres pour se rendre à Lucknow où les Britanniques - soldats, femmes et enfants - s'étaient réfugiés à la Résidence, les Sepoys les empêchant de fuir. Il leur était impossible de s'échapper, car les rues étroites étaient sous le contrôle des rebelles.
Les Britanniques arrivèrent à Lucknow en novembre. Campbell devait prendre le périmètre d'assaut afin de combattre les rebelles dans les rues pour arriver à la Résidence. Il lança sa plus importante attaque du sud-ouest, là où la ligne des forces en mutinerie était interrompue par la jungle. Il y avait une immense mosquée du côté ouest de Lucknow, la Shah Najaf, d'où des volées meurtrières de grenades et de balles de mousquets pleuvaient sur les Britanniques. Les Britanniques durent prendre la mosquée, mais ils étaient sans échelles et devaient escalader un mur de 6 mètres. Ils tirèrent les canons jusqu'à une distance de 350 mètres du mur dans lequel ils essayèrent de pratiquer une brèche en lançant tir sur tir, toujours sans résultat. Ils se résignèrent alors à rapprocher les canons du mur.
Les marins traînèrent les canons à proximité de la mosquée, subissant ainsi de lourdes pertes. Les murs de la mosquée comportaient des meurtrières espacées pour permettre aux canonniers marins d'être à l'abri des tirs à un certain endroit. Mais chaque coup de feu provenant des gros canons les ramenait directement dans la ligne de tir des Indiens. Bientôt, il ne resta que Hall et un officier blessé, le lieutenant Thomas Young encore capables de tirer du canon. Hall, maintenant le no 1 sur le canon, continuait de charger le canon et de tirer, traînant le canon à nouveau après chaque tir. Finalement, il réussit à pratiquer dans le mur une brèche assez grande pour permettre à quelques Highlanders de pénétrer à l'intérieur et d'ouvrir la barrière, permettant ainsi l'accès à la mosquée au reste des troupes.
Hall reçu la Croix de Victoria en reconnaissance de ses actes héroïques du 16 novembre 1857. Il poursuivit son service dans la Royal Navy jusqu'en 1876, alors qu'il prit sa retraite à Horton Bluff, en Nouvelle-Écosse. Il y vécut jusqu'à sa mort en 1904.