La devise officielle du Canada est A mari usque ad mare, ce qui signifie « d’un océan à l’autre ». À son apparition, lors de la création de la Confédération, il s’agit plutôt d’une déclaration d’ambition, puisqu’à l’époque le Canada n’est pas suffisamment étendu pour faire de la devise une réalité.
Origines
A mari usque ad mare provient du psaume 72, verset 8 de la Bible : Et dominabitur a mari usque ad mare, et a flumine usque ad terminos terrae. Il se lit comme suit dans la version du roi Jacques : « He shall have dominion also from sea to sea, and from the river unto the ends of the earth » (Et il régnera depuis une mer jusqu’à l’autre, et depuis un fleuve jusqu’aux limites de la terre).
Il semblerait que ce verset ait retenu l’attention quand, au moment de rédiger l’Acte de l’Amérique du Nord britannique en 1867, l’expression «dominion» est choisie, à la suggestion du Néo-brunswickois Samuel Leonard Tilley, pour désigner l’ensemble du Canada.
À cette époque, l’Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick sont les provinces fondatrices du Dominion du Canada. Le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse donnent au nouveau pays un accès à l’océan Atlantique. Mais ce n’est qu’après l’adhésion de la Colombie-Britannique à la Confédération en 1871 que la devise D’un océan à l’autre peut véritablement s’appliquer au nouveau Dominion du Canada, qui s’étend désormais de l’Atlantique au Pacifique.
En 1872, le révérend George Monro Grant, secrétaire de Sandford Flemming, responsable des travaux d’arpentage du chemin de fer du Pacifique, traverse le Canada. L’année suivante, il publie son journal de voyage intitulé Ocean to Ocean. Le titre se rapproche de l’expression « d’un océan à l’autre » et, selon la tradition, George Monro Grant cite le psaume en question dans ses nombreux sermons en prônant l’adoption de l’expression comme devise du Canada.
Devise officielle
En 1906, l’expression acquiert pour la première fois une dimension officielle lorsqu’elle est gravée sur le pommeau de la masse de l’Assemblée législative de la nouvelle province de la Saskatchewan. Le sous-secrétaire d’État, Joseph Pope, est mis au courant de l’événement et, de toute évidence, la phrase l’impressionne.
En 1919, Joseph Pope fait partie d’un comité de quatre membres nommé par le gouvernement fédéral qui a pour mandat de proposer de nouvelles armoiries pour le Canada. Les armoiries précédentes ne comportant pas de devise, les nouvelles se doivent d’en être munies. L’ébauche des nouvelles armoiries comprenant la devise est approuvée par le Conseil des ministres en avril 1921, puis par le roi Georges V en mai.
Le major général Willoughby Gwatkin, l’un des membres du comité, propose la devise In memoriam in spem (Souvenir et espoir), mais on adopte plutôt la contre-proposition de Joseph Pope.
Le 29 septembre 1921, après avoir examiné la version définitive des armoiries, Joseph Pope écrit dans son journal : « Nos armoiries sont très belles… on ne pouvait espérer mieux. La devise A mari usque ad mare, que j’ai moi-même suggérée, me semble tout à fait appropriée ».
Océan Arctique
En 2006, les dirigeants des trois territoires du nord du Canada (le Yukon, lesTerritoires du Nord-Ouest et le Nunavut) marquent le centenaire de la devise du Canada et en proposent une nouvelle. Au lieu de D’un océan à l’autre, ils suggèrent D’un océan à l’autre et à l’autre (en anglais, From sea to sea to sea), ce qui permet d’inclure la troisième frontière océanique du Canada, l’océan Arctique.
Le premier ministre du Yukon, Dennis Fentie, fait valoir que pareil changement permettrait de mieux refléter toute l’étendue du Canada, en ajoutant une « perspective nord-sud » à la manière de penser dominante, traditionnellement « est-ouest ». À mesure que les changements climatiques affectent le Nord, selon ces premiers ministres, il sera de plus en plus important pour le Canada d’affirmer ses revendications le long de son océan nordique. La fonte des glaces polaires pourrait enfin dégager le légendaire passage du Nord-Ouest, facilitant ainsi le transport maritime et permettant un meilleur accès aux ressources naturelles du Nord.
Bien que la devise officielle n’ait pas été modifiée, de nombreux Canadiens utilisent déjà l’expression « d’un océan à l’autre et à l’autre » pour décrire le pays. Par exemple, lorsque Peter Gzowski, animateur à CBC, décède en 2002, le premier ministre de l’époque, Jean Chrétien, parle de sa « présence inoubliable qui nous manquera d’un océan à l’autre et à l’autre ». Alors que débute officiellement la construction de la route entreInuvik et Tuktoyaktukdans les Territoires du Nord-Ouest en 2014, le premier ministre d’alors, Stephen Harper, déclare que la route connecterait le Canada pour la première fois « d’un océan à l’autre et à l’autre ».