Amice Mary Calverley, égyptologue, documentariste, humanitaire, compositrice (née le 9 avril 1896 dans le quartier Chelsea de Londres au Royaume-Uni; décédée le 10 avril 1959 à Oakville en Ontario). Amice Calverley est surtout connue dans le domaine de l’égyptologie en tant qu’autrice et illustratrice de quatre volumes documentant les décorations du temple du roi Séthi I à Abydos, en Égypte. Elle était également compositrice de musique de chambre, de chansons et d’un opéra. Durant la Première Guerre mondiale et la Deuxième Guerre mondiale, elle a participé à l’effort de guerre allié en tant qu’infirmière et travailleuse humanitaire civile, respectivement.

Ancêtres, enfance et éducation
Amice Calverley est la deuxième des quatre enfants d’Edmund Leveson Calverley, major et bibliothécaire, et de Sybil Maitland Calverley, née Salvin. Le grand-père maternel d’Amice, Osbert Salvin, est un ornithologue et entomologiste de renom ainsi qu’un pianiste, et sa mère et sa tante sont des artistes talentueuses. Selon sa nièce Sybil Rampen, Amice hérite de la mémoire photographique de son père et elle est formée en tant qu’artiste par sa mère.
Amice et ses deux frères, Hugh et Osbert, naissent dans le riche quartier londonien de Kensington et Chelsea. En 1903, la famille s’installe à Bloemfontein en Afrique du Sud, où son père travaille comme archiviste et bibliothécaire pour la nouvelle colonie britannique établie en Afrique du Sud. La plus jeune sœur d’Amice, Caroline, y naît en 1904. En 1909, le poste d’Edmund Calverley est supprimé et la famille retourne en Angleterre. Amice est admise à la Bedford High School for Girls la même année. Alors qu’elle est encore adolescente, elle étudie également l’art à la Slade School of Fine Art, l’école d’art du University College de Londres. Elle suit également des cours de piano avec James Friskin, un jeune pianiste et compositeur d’origine écossaise qui se joint plus tard à la faculté du Institute of Musical Art de New York (aujourd’hui la Juilliard School of Music).
Immigration au Canada et premiers emplois
En 1912, les Calverley immigrent au Canada et s’installent à Oakville en Ontario. On ignore ce qui motive ce déménagement, mais Edmund Leveson Calverley quitte rapidement sa famille et retourne en Angleterre, où il se remarie. Amice Calverley poursuit ses études de musique au Toronto Conservatory of Music (aujourd’hui le Conservatoire royal de musique) avec Healey Willan.
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate en 1914, la vie et les études musicales d’Amice Calverley sont bouleversées. Elle travaille dans une usine de munitions et commence une formation d’infirmière au Hospital for Sick Children de Toronto, mais elle ne termine pas sa formation. Au lieu, elle travaille comme massothérapeute au Christie Street Veterans’ Hospital de Toronto, alors connu sous le nom de Toronto Military Orthopedic Hospital. En même temps, elle commence à connaitre un certain succès local avec sa musique : en 1916, sa pièce musicale pour enfants The Magic Fishbone est jouée au Toronto Conservatory, et les bénéfices servent à aider les forces armées au front.
Amice Calverley est également une couturière qualifiée. Vers 1920, elle se rend à New York pour faire carrière dans la mode. Elle travaille comme mannequin et créatrice de vêtements et se trouve un emploi dans le grand magasin Wanamaker.
Compositrice
En 1922, Amice Calverley retourne en Angleterre grâce à une bourse du Royal College of Music (RCM) de Londres. Elle étudie la composition avec Ralph Vaughan Williams, l’un des compositeurs britanniques les plus renommés de l’époque, et avec George Dyson, qui devient plus tard le directeur du RCM. En mars 1926, elle termine de composer un opéra intitulé Vel. L’opéra est proposé à l’Opéra de Vienne, mais il n’est pas accepté. À ce jour, son opéra n’est pas publié.
Bien que la plupart des compositions d’Amice Calverley datent des années 1910 et 1920, elle n’abandonne pas la musique après s’être lancée dans une carrière d’égyptologue (voir ci-dessous). Elle se fait fabriquer un clavicorde pour pouvoir jouer lors de ses voyages sur le terrain et elle continue à composer. Son String Quartet in F minor, qu’elle compose en 1933, est joué à Vienne, Londres et Toronto. Cependant, elle ne parvient pas à se faire un nom en tant que compositrice; dans une critique de 1935 d’un concert à Toronto présentant certaines de ses musiques, elle n’est mentionnée que comme une « ancienne élève du Conservatoire », tandis que les autres compositeurs présentés sont nommés.
Au cours des dernières années, la musique d’Amice Calverley est redécouverte et jouée plus régulièrement dans la région du Grand Toronto. En 2015, elle est nommée compositrice agréée du Centre de musique canadienne (CMC). Ses manuscrits sont confiés au CMC par sa nièce, l’artiste et autrice Sybil Rampen, et ils sont en cours de numérisation et d’enregistrement.
Égyptologue
En 1926, Amice Calverley se rend compte qu’elle ne peut pas subvenir à ses besoins en tant que compositrice et elle se tourne vers son talent d’artiste pour gagner sa vie. Elle trouve un emploi au Ashmolean Museum de l’université d’Oxford, où elle illustre un livre de l’archéologue V. Gordon Childe. Leonard Woolley, un autre archéologue de renom qui travaille à Ashmolean, l’encourage à développer ses talents de dessinatrice.
Cette initiative la met en contact avec la Egypt Exploration Society. En 1925, la société entreprend une étude photographique du temple du roi Séthi I, à Abydos en Égypte, l’un des temples pharaoniques les mieux préservés datant d’environ 1300 av. Jésus-Christ. Amice Calverley se joint au projet en 1927 en tant que dessinatrice. Cependant, le matériel photographique disponible s’avère insatisfaisant. Sous la direction de l’éminent égyptologue Alan H. Gardiner, Amice Calverley est envoyée à Abydos pour produire de nouvelles photos ainsi que des dessins manuels des nombreuses œuvres d’art du temple. Elle commence sa première mission sur le terrain en janvier 1928 et elle effectue sa deuxième au cours de l’hiver 1928-1929.
Lors de son deuxième séjour, Amice Calverley rencontre John D. Rockefeller, qui visite le site en compagnie de James H. Breasted, de l’Institut oriental de l’Université de Chicago. Impressionné par le travail d’Amice Calverley, John D. Rockefeller lui assure le financement d’une publication élaborée présentant ses illustrations, ainsi que des travaux supplémentaires sur le terrain.

Temple du roi Séthi I à Abydos
Grâce à ce financement à long terme, Amice Calverley peut embaucher une assistante en 1929, Myrtle F. Broome, qui est elle-même une artiste hautement qualifiée. Les deux femmes se sont rencontrées à Marseille en France alors qu’elles étaient en route pour Abydos en octobre 1929 et elles sont rapidement devenues amies. Ensemble, elles passent les huit hivers suivants à Abydos (de 1929 à 1936-1937), documentant méticuleusement une grande partie des œuvres d’art du temple. Leurs travaux sont publiés en trois volumes intitulés The Temple of King Sethos I at Abydos (1933, 1935 et 1938) et les volumes sont très appréciés par la communauté égyptologue. Selon l’égyptologue Alan H. Gardiner, les illustrations contiennent de nombreuses erreurs linguistiques commises par les anciens scribes, mais presque aucune erreur de copie de la part d’Amice Calverley ou de Myrtle F. Broome.
La Deuxième Guerre mondiale interrompt les travaux sur le terrain et retarde les publications ultérieures. Amice Calverley retourne à Abydos avec une nouvelle équipe au cours de la saison 1947-1948; par la suite, des difficultés diplomatiques empêchent la poursuite des travaux sur le site. Le volume IV de The Temple of King Sethos at Abydos n’est publié qu’en 1958. À cette époque, Amice Calverley vit à Oakville en Ontario, et elle travaille sur les volumes V et VI jusqu’à sa mort en 1959. Ces deux derniers volumes demeurent inédits.
Humanitaire et documentariste
Pendant son séjour à Abydos dans les années 1930, Amice Calverley utilise sa formation d’infirmière pour offrir une aide médicale aux habitants. Myrtle Broome et elle distribuent des onguents, des bandages et d’autres remèdes. Plus tard, lorsqu’une épidémie de choléra éclate à Abydos en 1947, Amice Calverley obtient et administre des vaccins aux villageois locaux ainsi qu’aux Britanniques et aux Américains de la Haute-Égypte de l’époque.
Durant la Deuxième Guerre mondiale, Amice Calverley participe à diverses missions pour des organismes humanitaires et pour le gouvernement britannique. Elle participe à l’évacuation d’enfants des villes anglaises, elle travaille brièvement avec l’ambassade en Égypte afin de décourager un rapprochement arabe avec l’Allemagne nazie, et elle analyse des photos pour la Royal Air Force. En 1944, vers la fin de la guerre, elle s’enrôle comme travailleuse humanitaire civile pour l’Administration des Nations unies pour les secours et la reconstruction (UNRRA) dans les Balkans.
Dans les années 1930, Amice Calverley commence également à documenter les coutumes locales en les filmant, à la fois en Égypte et dans les pays où elle voyage entre deux campagnes sur le terrain, comme la Roumanie et d’autres États des Balkans. Une fois la Deuxième Guerre mondiale terminée et son travail à Abydos interrompu, elle se rend en Crète pour travailler sur de la documentation semblable. Toutefois, comme le gouvernement grec mène une guerre civile contre les insurgés communistes, Amice Calverley se met à filmer la guerre et à apporter de l’aide aux blessés. Elle devient activiste pour les soins aux anciens combattants et elle utilise son film pour recueillir des fonds et sensibiliser le public.
Sa santé déclinant, Amice Calverley doit finalement abandonner ses voyages. Elle s’installe à Oakville en Ontario, vers 1950.
Vie personnelle et sociale
Amice Calverley ne se marie jamais et n’a jamais d’enfants, bien qu’elle soit fiancée à trois reprises et reçoive de nombreuses autres propositions. Elle est polyglotte et s’implique avec ouverture d’esprit dans toutes les communautés dont elle fait partie. Lors de ses longs séjours à Abydos, elle entretient des relations amicales avec les habitants et elle fréquente les hauts fonctionnaires et les membres de la famille royale qui visitent le temple. Toujours curieuse et désireuse d’acquérir de nouvelles compétences, elle étudie non seulement l’arabe, mais elle suit également des cours de percussion et de pilote.
Plus tard, durant sa vie à Oakville, elle se fait connaitre dans la communauté artistique de Toronto par l’intermédiaire des concerts de musique de chambre qu’elle organise. Son dévouement à la vie culturelle de Toronto se manifeste également dans ses dons au Musée royal de l’Ontario, dont une collection de 200 pièces de porcelaine anglaise du 18e siècle, ainsi qu’une autre collection de 800 pièces de broderie roumaine qu’elle a sauvées de la destruction durant la Deuxième Guerre mondiale.
Décès et legs
Amice Calverley meurt le 10 avril 1959 d’une rupture d’anévrisme alors qu’elle prépare un concert. Son décès est largement médiatisé dans toute l’Amérique du Nord. Des nécrologies sont publiées dans le New York Times et le Evening Star de Washington, D.C.
Pour préserver l’héritage d’Amice Calverley, sa nièce Sybil Rampen crée un centre culturel et d’archives à Oakville. Le centre est situé sur le domaine acheté en 1950 par le frère d’Amice Calverley, Hugh (le père de Sybil Rampen) et est connu aujourd’hui sous le nom de Joshua Creek Heritage Art Centre. Les écrits, les enregistrements et la correspondance personnelle d’Amice Calverley y sont conservés. Cela inclut plus de 700 pages de manuscrits musicaux, des diapositives, de nombreuses peintures et des dessins originaux ainsi qu’une collection d’objets provenant du travail sur le terrain d’Amice Calverley à Abydos (perles, amulettes, pièces de monnaie et autres objets anciens). Ces derniers sont étudiés et catalogués par la Society for the Study of Egyptian Antiquities depuis 2006, mais de nombreux objets qui intéressent les égyptologues et les musiciens attendent d’être étudiés plus en détail.
Amice Calverley est saluée comme une pionnière et une artiste remarquable. Sa précieuse contribution à l’égyptologie est largement reconnue dans ce domaine. Le reste de son legs, en particulier dans le domaine de la musique qu’elle a qualifié de véritable passion, n’est pas encore pleinement reconnu.