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Capitales

Les capitales sont les centres désignés du pouvoir politique officiel et des autorités administratives de leurs territoires respectifs.

Capitales

Les capitales sont les centres désignés du pouvoir politique officiel et des autorités administratives de leurs territoires respectifs. Elles sont aussi très souvent le foyer principal du pouvoir économique - et donc du véritable pouvoir politique - représenté surtout par les sièges sociaux d'entreprises et divers organismes non gouvernementaux. Elles attirent, de ce fait, une partie importante des intellectuels et des créateurs du pays. En somme, les capitales sont généralement le siège des élites dirigeantes qui détiennent un pouvoir décisionnel. En exerçant une emprise sur les réseaux de transport et de communication, les élites des capitales ont assuré la domination de leur ville sur les territoires qui en dépendent politiquement.

Les capitales agissent également comme symboles de l'identité et de la légitimité politiques. Les édifices publics (de même que les sièges sociaux) sont habituellement conçus de façon à impressionner la population par la dignité du pouvoir et la majesté de la loi qui s'en dégagent, suscitant ainsi un sentiment d'identification personnelle et de confiance. La plupart des édifices législatifs et des palais de justice empruntent à des styles architecturaux de certains grands royaume, république ou empire du passé, de manière à démontrer que l'autorité qu'ils représentent s'inscrit dans une grande tradition historique, et donc qu'elle est digne de respect. Le « Capitole » de la République romaine est l'un de ces archétypes, le « Parlement » médiéval du peuple en est un autre. Un troisième archétype provient des styles plus éclectiques qui apparaissent au XIXe siècle à l'époque des empires français de Napoléon I et de Napoléon II.

Deux évolutions différentes

Les capitales du Canada peuvent être classées en deux groupes, selon que le territoire qu'elles administrent politiquement a été défini de manière à refléter et à favoriser les intérêts politiques et commerciaux d'une colonie déjà établie, ou selon que le territoire était déjà défini avant que l'emplacement de la capitale ne soit choisi. Les villes du premier groupe ont été mieux en mesure de dominer dans leurs territoires respectifs, car elles profitaient déjà de voies de communication. Celles du deuxième groupe ont eu à rivaliser avec une autre ville sur le même territoire ou ailleurs pour établir leur prééminence.

Le premier groupe comprend les villes de ST JOHN'S, HALIFAX, de CHARLOTTETOWN, de QUÉBEC, de TORONTO, de WINNIPEG et de VICTORIA. Toutes ont été fondées à des endroits stratégiques en tant qu'avant-postes de l'empire européen et, à l'exception de Winnipeg, on les a choisies en fonction des besoins de la navigation à voile. Les villes de St. John's (fondée en 1583), Halifax (1749) et Victoria (1843) constituent des refuges portuaires pour les grands bateaux de la Marine royale et du commerce océanique. La ville de Québec (1608) bénéficie d'un emplacement facilement défendable, à l'endroit le plus avancé où les grands voiliers du XVIIe siècle peuvent remonter le Saint-Laurent en toute sécurité. La ville de Toronto (fondée sous le nom d'York en 1793) est choisie en grande partie parce qu'elle offre un mouillage protégé dans la mer intérieure que forme le lac Ontario.

Comme elles sont situées à la porte des régions qui regorgent de ressources exploitables (terres agricoles, forêts, zones minières ou lieux de pêches), ces capitales deviennent rapidement des centres commerciaux. Même Winnipeg (fondée en 1812) est une porte d'entrée (celle des grandes Plaines), bien que ses « côtes » soient définies par la topographie (le BOUCLIER) et la frontière des États-Unis le long du 49e parallèle. Charlottetown, la plus petite capitale provinciale, est, depuis 1769, le point d'accès principal de ce petit territoire insulaire. Quant à DAWSON, la capitale du territoire du Yukon de 1898 à 1951, elle appartient aussi à ce groupe, parce qu'elle est établie sur les rives du fleuve Yukon, porte d'entrée du pays de la ruée vers l'or (voir RUÉE VERS L'OR DU KLONDIKE). Cette ville, qui compte 30 000 habitants en 1900, verra sa population diminuer aussi rapidement qu'elle a augmenté.

Dès le départ, les villes du premier groupe sont dominantes dans leurs territoires officiels respectifs et, hormis Québec et Victoria, elles le sont toujours. La rivale de Québec pour le véritable pouvoir est MONTRÉAL, qui, bien qu'elle ait été fondée en 1642 comme avant-poste d'amont, reste dépendante sur le plan économique jusqu'après la GUERRE DE L'INDÉPENDANCE AMÉRICAINE. Le développement et le pouvoir financier de la ville ne prennent vraiment leur élan qu'après l'arrivée du bateau à vapeur. Au XIXe siècle, les canaux et le chemin de fer permettent aux entrepreneurs de tirer pleinement profit de ces voies d'accès plus rapides au coeur de l'Amérique du Nord. Un phénomène semblable se produit à VANCOUVER, qui voit le jour en 1886 comme terminus du Canadien Pacifique. Elle devient la porte d'entrée du commerce par chemin de fer dans le bassin du Pacifique, une fonction que ne peut remplir la ville de Victoria située dans une île.

Le deuxième groupe de capitales comprend FREDERICTON, REGINA, EDMONTON, YELLOWKNIFE, WHITEHORSE et, bien sûr, OTTAWA. Exception faite de Whitehorse, chacune de ces villes a dû lutter avec une rivale pour obtenir un pouvoir réel (dans le cas d'Ottawa, avec au moins deux rivales). Depuis leur création, la plupart de ces villes ont eu à jouer un rôle politique.

La ville de Fredericton (fondée en 1784) est construite bien en amont de la rivière Saint-Jean dans la nouvelle colonie du Nouveau-Brunswick, à la fois pour des raisons de défense et pour favoriser le peuplement du centre de la province. Comme la rivière Saint-Jean n'est pas accessible aux navires de haute mer, la porte d'entrée du Nouveau-Brunswick reste le port de SAINT-JEAN (1785), la plus grande ville de la province. Le déclin du transport maritime au profit du transport routier a permis à Moncton (constituée en 1855) de croître rapidement au cours des dernières décennies.

Les capitales de la Saskatchewan et de l'Alberta sont choisies en 1905 parmi de nombreuses candidates qui désirent avoir l'honneur (et les privilèges) d'accueillir les gouvernements des deux nouvelles provinces. Encore aujourd'hui, la ville de Regina (fondée en 1882), capitale des anciens Territoires du Nord-Ouest (de 1883 à 1905), sur la ligne ferroviaire transcontinentale, partage le pouvoir réel avec SASKATOON (1882), qui est à l'origine un port fluvial mais est demeurée sans lien transcontinental pendant plus de 20 ans. La ville d'Edmonton (fondée en 1796 comme poste de traite et constituée en 1892) rivalise avec la ville de CALGARY (fondée en 1875 comme fort de police et constituée en 1884). Ces quatre villes des Prairies sont implantées le long d'un corridor transcontinental très actif. La ville de Yellowknife (1789), choisie en 1967, est la capitale la plus récente, mais le chef-lieu des activités économiques du Nord-Ouest demeure Edmonton. La ville de Whitehorse (1898) est le point de convergence des voies de communication du Yukon, grâce à un lien routier avec Skagway (Alaska), sur la côte, et grâce à la ROUTE DE L'ALASKA, construite pendant la Deuxième Guerre mondiale pour relier les Prairies au centre de l'Alaska. Whitehorse devient le centre administratif du Territoire du Yukon en 1951. Il s'agit du seul transfert de capitale depuis la Confédération.

Ottawa

Le moment du choix de la ville d'Ottawa la place dans le deuxième groupe. Nommée capitale de la Confédération canadienne en 1867, Ottawa n'assume pleinement son rôle de capitale politique qu'après une longue lutte pour devenir le siège du gouvernement de la PROVINCE DU CANADA (la partie méridionale de l'Ontario et du Québec). Cette province unie est proclamée en 1841, mais en raison de disputes politiques entre les partisans de Toronto, de Kingston, de Montréal, de Québec et enfin d'Ottawa (à l'époque, Bytown), les quatre premières villes se partagent les fonctions de capitale pendant plus de 20 ans. Finalement, comme la décision sans appel revient au monarque régnant et à ses conseillers, la reine Victoria opte, en 1858, pour la ville d'Ottawa nouvellement constituée. Il faut attendre encore 6 ans avant que les ÉDIFICES DU PARLEMENT soient prêts à être occupés.

Par la suite, la CONFÉDÉRATION est instaurée et on lance le projet de réunir en une seule entité politique les côtes atlantique et pacifique de l'Amérique du Nord britannique. À l'époque, la ville d'Ottawa est considérée comme plus facilement défendable que Toronto ou Montréal (la question de la sécurité est importante à cause de la GUERRE DE SÉCESSION). Devenue prospère grâce au commerce du bois d'oeuvre, la ville est également d'accès facile pour les deux grandes communautés culturelles de l'époque, et elle est bien située dans la vallée de l'Outaouais, sur la route des territoires de l'Ouest. Toutefois, elle se trouve un peu trop près de Montréal et des voies de communication transatlantiques, ce qui l'empêche d'acquérir à l'échelle nationale un pouvoir qui soit à la mesure du pouvoir constitutionnel officiel qu'elle détient. Montréal et Toronto, de plus en plus, continuent de se partager le pouvoir national réel, même si les villes de l'Alberta et de la Colombie-Britannique en acquièrent également à cet égard. Entre 1951 et 1991, le pourcentage de la population canadienne vivant à Ottawa est passé de 2 p. 100 à seulement 3,4 p. 100. Ces chiffres ne permettent pas de représenter de manière adéquate la part de pouvoir politique qu'Ottawa détient, mais ils nous donnent néanmoins une idée de son pouvoir réel.

Le rôle symbolique d'Ottawa, cependant, transparaît dans presque tous les bulletins de nouvelles télévisés du réseau national. Les austères pierres grises des édifices néogothiques sur la colline du Parlement (assurément pas la « colline du Capitole » d'une république) dégagent un sentiment de permanence et de gravité éternelle. Quant à l'imposante tour centrale, un monument à la mémoire des Canadiens qui ont péri lors de la Première Guerre mondiale et dont les sacrifices ont permis de consolider l'identité nationale, elle inspire de grands principes, soulignant l'engagement du Canada à maintenir « paix, ordre et saine gestion publique ».

Voir aussi ÉDIFICES GOUVERNEMENTAUX.