Contexte
Les Balkans sont une grande région montagneuse dans le sud-est de l’Europe. De 1929 jusqu’au début des années 1990, la partie du centre-ouest forme une seule nation : la Yougoslavie, créée par la fédération de plusieurs pays distincts après la Première Guerre mondiale.
Les désaccords entre les différents États de la République fédérale de Yougoslavie (RFY) conduisent éventuellement à son éclatement. Tout commence en juin 1991, lorsque la Slovénie et la Croatie déclarent leur indépendance. D’autres États suivent peu après, ce qui entraîne des années de combats marquées par la violence ethnique. Finalement, la RFY se scinde en six pays indépendants, soit la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, Monténégro, la Macédoine du Nord, la Serbie et la Slovénie, et un territoire toujours disputé aujourd’hui, le Kosovo.
Réponse internationale
Après l’éclatement de la RFY, les Nations Unies (ONU), l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et l’Union européenne (UE) s’impliquent dans des efforts de maintien de la paix.
Mission de surveillance de la Communauté européenne
La Mission de surveillance de la Communauté européenne (MSCE) est établie en 1991 afin de superviser l’accord de cessez-le-feu entre la Slovénie et ce qui reste de la République yougoslave. De 1991 à 1994, le Canada fournit à la mission des officiers et du personnel de soutien.
Force de protection des Nations Unies
La Force de protection des Nations Unies est établie en février 1992 dans la foulée des déclarations d’indépendance de la Croatie et de la Slovénie. Son mandat est de s’assurer que les trois zones protégées des Nations Unies en Croatie soient démilitarisées et que tous les gens qui y vivent soient protégés des attaques armées.
En avril 1992, le Canada envoie un groupe tactique d’infanterie de 860 personnes pour participer à la Force de protection. En juin 1992, le mandat et les effectifs de la Force sont étendus pour s’ajuster au conflit qui non seulement s’est intensifié, mais s’est étendu jusqu’en Bosnie-Herzégovine. La Force de protection devient responsable de la sécurité et du fonctionnement de l’aéroport de Sarajevo ainsi que de la distribution de l’aide humanitaire dans la capitale et partout en Bosnie-Herzégovine.
Le groupe tactique canadien sécurise l’aéroport de Sarajevo le 2 juillet et l’occupe pendant les 30 jours suivants. C’est le brigadier général canadien Lewis MacKenzie qui commande les forces de l’ONU dans la ville. En septembre 1992, la mission de la Force de protection est officiellement étendue à la Bosnie-Herzégovine, et un deuxième bataillon canadien, celui-ci comptant 800 soldats, est envoyé dans la région.
En mars 1993, un groupe tactique des FAC de 875 personnes arrive en Croatie, où il doit faire face à l’hostilité des Croates. La bataille de la poche de Medak, qui a lieu les 15 et 16 septembre, représente l’une des expériences de combat les plus brutales qu’ont connues les forces canadiennes depuis la guerre de Corée. Quatre Canadiens sont blessés, et plus de 27 Croates sont tués.
Les FAC fournissent aussi un régiment d’ingénieurs, 12 contrôleurs aériens et un bataillon logistique à la Force de protection de l’ONU. Pendant 3 ans, environ 1600 Canadiens œuvrent dans les Balkans.
Le 31 mars 1995, la Force de protection est divisée en trois opérations distinctes : la Force de protection en Bosnie-Herzégovine, l’Opération de restauration de la confiance en Croatie (UNCRO) et la Force de déploiement préventif de l’ONU (UNPREDEP) en Macédoine.
Opération de restauration de la confiance en Croatie (UNCRO)
En mars 1995, un groupe-bataillon d’infanterie canadien commence à travailler au sein de l’UNCRO. Les Croates, cependant, sont d’avis que la présence de l’ONU les empêche de réclamer l’ancien territoire croate maintenant détenu par les Serbes. Lorsqu’ils attaquent et envahissent la région de la Krajina, ils ordonnent aux forces de l’ONU de partir. Vers la mi-octobre, tous les Canadiens sont retirés de la région.
Force de mise en œuvre de l’OTAN (IFOR)
En décembre 1995, les présidents de la Croatie, de la Serbie et de la Bosnie signent l’Accord de Dayton, qui met fin à la guerre en Bosnie et jette les bases d’un cadre de paix. Selon cet accord, une force de maintien de la paix nombreuse et lourdement armée serait responsable d’appliquer les conditions entourant le cadre de paix. L’OTAN crée donc la Force de mise en œuvre (IFOR), composée de 60 000 soldats, et, en décembre 1995, lance l’opération Joint Endeavor. Il s’agit alors de la plus importante opération militaire jamais organisée par l’organisation. Contrairement aux autres missions de maintien de la paix, le personnel de l’IFOR a la permission d’utiliser la force mortelle lorsque nécessaire.
Les FAC fournissent à l’IFOR plus de 1000 soldats en rotation pendant deux périodes de six mois. On y compte des soldats d’infanterie, des troupes blindées, des ingénieurs, du personnel médical et des membres de la police militaire. Leur mandat consiste notamment à établir une liberté de mouvement dans la région et à superviser le retrait et la séparation des factions auparavant en guerre.
Des navires de guerre canadiens participent aussi à l’opération Sharp Guard, un blocus maritime organisé par l’OTAN. En outre, des pilotes canadiens aident à assurer le respect de la zone d’exclusion aérienne de l’OTAN au cours de l’opération Decisive Endeavour. Le mandat de l’IFOR prend fin en décembre 1996.
Force de stabilisation de l’OTAN (SFOR)
L’IFOR est immédiatement remplacé par la Force de stabilisation de l’OTAN (SFOR) en décembre 1996. Son rôle est de créer un environnement sécuritaire pour les autorités locales et les agences internationales pendant que la Bosnie-Herzégovine devient un pays démocratique. L’OTAN fournit environ 12 000 soldats, dont approximativement 1200 Canadiens. Les FAC fournissent des éléments d’infanterie, des troupes blindées, des ingénieurs, des hélicoptères et du personnel de soutien sur une base rotationnelle de six mois.
À mesure que la situation s’améliore, l’OTAN réduit ses effectifs. En avril 2004, le contingent des FAC a diminué à 650 personnes. Lorsque la SFOR devient une mission européenne (EUFOR) à la fin de 2004, le Canada réduit sa contribution à une équipe d’observation et de liaison de moins de 85 personnes. À partir de mars 2007, le Canada met fin à son implication dans l’EUFOR, la situation s’étant grandement améliorée en Bosnie-Herzégovine.
Opérations Determined Force et Allied Force de l’OTAN
Dans le cadre de l’opération Determined Force, des aéronefs provenant de 12 nations de l’OTAN établissent dès octobre 1998 une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine. Le Canada fournit six CF-188 Hornet. Malgré tout, la Yougoslavie ignore les avertissements de l’OTAN et continue ses attaques au Kosovo.
Conséquemment, le 23 mars 1999, l’OTAN lance l’opération Allied Force, une campagne de bombardement de 78 jours visant à forcer la Serbie à cesser ses actions militaires au Kosovo. Le Canada augmente sa contribution à 18 Hornets.
Force pour le Kosovo (KFOR)
En mars 1999, l’OTAN crée la KFOR afin d’établir et de maintenir la sécurité au Kosovo, ainsi que pour soutenir la mission d’administration intérimaire de l’ONU au Kosovo (MINUK). Les premières unités des FAC, soit environ 800 militaires, dont des ingénieurs, du personnel blindé et 8 hélicoptères, arrivent en juin 1999. En juillet, les FAC envoient 500 autres soldats d’infanterie, ainsi que des chars d’assaut. Deux rotations de troupes ont lieu avant que le Canada mette fin à sa contribution militaire, en juin 2000. Aujourd’hui, on trouve encore 5 officiers canadiens dans les quartiers généraux de la KFOR.
Opération Essential Harvest de l’OTAN
Dans l’ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), le pays est divisé entre la majorité slave (les Macédoniens) et la minorité ethnique albanaise. Lorsque les Albanais lancent une vaste attaque contre les forces gouvernementales en place à l’été 2001, l’ARYM demande l’aide de l’OTAN.
Le 27 août 2001, l’OTAN lance une opération de 4500 troupes nommée Essential Harvest. Son mandat, d’une durée de 30 jours, vise à confisquer les armes des groupes paramilitaires albanais et à superviser la situation après leur désarmement. Les FAC fournissent 200 militaires à la mission, qui prend fin le 26 septembre.
Autres missions
Les FAC détachent des officiers d’état-major et d’autres spécialistes auprès de diverses missions dans les Balkans, notamment pour la Mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine (MINUBH) ; la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) ; le quartier général de la Force opérationnelle de l’OTAN pour l’opération Amber Fox ; la Mission européenne de maintien de la paix dans l’ancienne République yougoslave de Macédoine (EUFOR), la Force de déploiement préventive (UNPREDEP), la Force européenne en Bosnie-Herzégovine (EUFOR) et le siège de l’OTAN à Sarajevo (NHQSA).
Police civile
La GRC et plus de 20 autres agences policières canadiennes participent à la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) de juin 1999 à mars 2004. Jusqu’à 92 policiers servent au sein de la mission chaque année afin de maintenir l’ordre et la loi au Kosovo, et d’aider à y fonder un service de police démocratique.
De 1996 à 2005, le Canada envoie également des policiers à la Mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine (MINUBH) et à sa successeure, la Mission de police de l’Union européenne (MPUE). Le rôle de cette dernière est d’aider à développer une force policière civile efficace en Bosnie-Herzégovine.
Importance
Dans les Balkans, les Casques bleus canadiens sont confrontés à une tâche difficile et dangereuse. Les guerres des Balkans sont en effet marquées par la violence et le nettoyage ethniques. Il y a donc peu de « paix » à maintenir entre les différentes factions en guerre. Au cours de la bataille de la poche de Medak, les Canadiens vivent leur affrontement le plus important depuis la guerre de Corée. Dans les Balkans, les Casques bleus trouvent et consignent également des preuves de crimes de guerre atroces et bon nombre d’entre eux sont touchés par le trouble de stress post-traumatique au cours des années qui suivent leur service. Les missions dans les Balkans démontrent les difficultés et les coûts, tant financiers qu’humains, que représente le maintien de la paix moderne.