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Chanie Wenjack

Chanie « Charlie » Wenjack (né le 19 janvier 1954; décédé le 23 octobre 1966 près de Redditt en Ontario). À l’âge de 12 ans, Chanie Wenjack, un garçon anishinaabe de l’Ontario, s’est enfui de son pensionnat indien près de Kenora, et est par la suite mort de faim et d’exposition aux conditions climatiques extrêmes. Sa mort, en 1966, a déclenché une attention nationale et a donné lieu à la première enquête sur le traitement des enfants autochtones dans les pensionnats indiens au Canada.

Chanie Wenjack

Jeunesse

Chanie Wenjack grandit à Ogoki Post sur la réserve de Marten Falls avec ses parents, ses sœurs et de leurs deux chiens. Ogoki Post n’a pas d’externat indien. À l’âge de neuf ans, Chanie Wenjack et trois de ses sœurs sont envoyés au pensionnat indien Cecilia Jeffrey, situé à plus de 600 km, où on lui donne le nom « Charlie ».

Pensionnat indien Cecilia Jeffrey

Situé près de Kenora en Ontario, le pensionnat indien Cecilia Jeffrey est géré par la Women’s Missionary Society de l’Église presbytérienne du Canada, et il est financé par le gouvernement fédéral. Au cours des années 1960, 150 étudiants vivent à Cecilia Jeffrey et suivent des cours dans des écoles de Kenora.

Chanie Wenjack entre au pensionnat indien Cecilia Jeffrey à l’âge de neuf ans, et il est placé en classe de première année. Après deux ans, il est placé dans des classes de rattrapage avec un enseignement spécialisé en anglais et en arithmétique.

Le directeur de l’école de Kenora se souvient de Chanie Wenjack comme d’un garçon doté d’un bon sens de l’humour, et particulièrement habile à déceler les jeux de mots. Cependant, il meurt avant d’apprendre à lire l’anglais.

Évasion

Le 16 octobre 1966, Chanie Wenjack et deux de ses amis s’enfuient du pensionnat indien Cecilia Jeffrey pendant leur récréation d’après-midi dans la cour de récréation. Ils ne portent alors que des vêtements légers en coton. Il s’agit de la première et dernière tentation d’évasion de Chanie Wenjack.

Les enfants s’enfuient fréquemment des pensionnats indiens. Au pensionnat indien Cecilia Jeffrey, le directeur Colin Wasacase, un membre de la Nation crie, instaure les coups de sangle comme punition pour les élèves qui tentent de s’enfuir. Le jour de la fuite de Chanie Wenjack et de ses amis, neuf autres élèves s’échappent également de Cecilia Jeffrey. La fuite est dangereuse; les enfants risquent de perdre des membres en raison d’engelures ou d’accidents. Beaucoup d’entre eux, comme Chanie Wenjack, meurent.

Les enfants s’enfuient des pensionnats indiens pour de nombreuses raisons. Chanie Wenjack dit à ses amis qu’il veut voir son père. Lors de l’enquête sur sa mort, le journaliste et juré Ian Adams conclut que Chanie Wenjack s’est enfui parce qu’il se sentait seul. La sœur de Chanie Wenjack, Pearl (Wenjack) Achneepineskum, croit qu’il s’est possiblement enfui en raison d’agressions sexuelles. Dans les pensionnats indiens, de nombreux élèves sont victimes d’abus sexuels et physiques.

Lors de sa fuite, Chanie Wenjack suit ses deux amis jusqu’à la cabane de leur oncle, Charles Kelly, près de Redditt en Ontario. Le premier jour de leur évasion, ils marchent pendant plus de huit heures avant de passer la nuit chez des gens qui les accueillent. Après leur arrivée à la cabane de l’oncle Charles Kelly, ce dernier emmène ses neveux sur son terrain de piégeage. Chanie Wenjack marche près de cinq kilomètres avec eux, et il part ensuite à la recherche de son père. Charles Kelly conseille à Chanie Wenjack de suivre la voie ferrée et de demander de la nourriture aux cheminots. Chanie Wenjack n’a en sa possession qu’un bocal en verre contenant quelques allumettes.

Chanie Wenjack survit pendant les 36 heures qui suivent. Le temps devient rude, avec des bourrasques de neige et de la pluie verglaçante. La température chute entre -1 et -7 °C. Vêtu seulement d’un coupe-vent de coton et sans nourriture, Chanie Wenjack parcourt 19 km à pied. Lorsqu’il est retrouvé, son corps est meurtri par des chutes répétées.

Décès

Chanie Wenjack meurt dans la matinée du 23 octobre 1966, une semaine après s’être enfui du pensionnat indien Cecilia Jeffrey. Il meurt d’exposition aux éléments et de faim. Un ingénieur des Chemins de fer nationaux du Canada passant à bord d’un train de marchandises aperçoit son corps au bord de la voie ferrée. Chanie Wenjack se trouve à plus de 60 km du pensionnat indien Cecilia Jeffrey.

Selon une lettre écrite par Colin Wasacase à son superviseur en novembre 1966, la mère de Chanie Wenjack demande que le corps de son fils soit retourné au domicile familial. Après avoir d’abord refusé en raison des coûts, le ministère des Affaires indiennes prend les dispositions nécessaires pour le voyage. Colin Wasacase, plusieurs des sœurs de Chanie Wenjack ainsi que sa mère accompagnent son corps en train jusqu’à Nakina, et ensuite par avion jusqu’à Ogoki Post.

La même lettre de Colin Wasacase adressée à son superviseur en 1966 affirme que le père de Chanie Wenjack ne sait pas que son fils est décédé. Colin Wasacase, la police et les responsables des Affaires indiennes tentent en vain de le contacter. Le père de Chanie Wenjack n’a reçu qu’une lettre auparavant qui l’assure que ses enfants se portent bien au pensionnat indien Cecilia Jeffrey. La famille Wenjack apprend plus tard les détails de l’enquête à la radio de la CBC et dans les journaux. Ils ne sont pas autorisés à assister à l’enquête.

Chanie Wenjack est enterré le 27 octobre 1966. Selon Colin Wasacase, sa famille examine son corps à la tombe. Voyant les marques d’autopsie, son père croit que son fils a été poignardé. Il demande à la Police provinciale de l’Ontario qu’elle confirme les circonstances de la mort de son fils avant d’autoriser son enterrement.


Enquête

Une enquête du coroner sur la mort de Chanie Wenjack a lieu le 17 novembre 1966. Le coroner et le procureur de la Couronne interrogent les témoins, y compris les garçons qui se trouvaient avec Chanie Wenjack lors de sa fuite, ainsi que les hommes chez qui ils ont séjourné.

Le jury est composé de cinq résidents locaux, dont aucun n’est d’origine autochtone. Leur rapport reconnaît que « le système éducatif indien provoque de graves problèmes émotionnels et d’ajustement pour ces enfants ». Ils recommandent qu’une « étude soit menée sur l’éducation et la philosophie actuelle imposées aux Autochtones. Est-ce juste? » Ceci suscite un questionnement éthique et moral sur les environnements culturellement oppressifs et abusifs des pensionnats indiens.

Le journaliste Ian Adams attire l’attention nationale sur l’histoire de Chanie Wenjack avec son article « The Lonely Death of Charlie Wenjack » dans le magazine Maclean’s en février 1967.

Legs

Chanie Wenjack devient un symbole de la résistance envers le pouvoir de la colonisation au Canada. En 1972, des étudiants autochtones et des membres de la faculté des études autochtones de l’Université Trent font pression sur l’université pour qu’elle nomme son nouveau collège en l’honneur de Chanie Wenjack. Finalement, c’est une salle de théâtre du collège qui est nommée « Wenjack Theatre ».

Chanie Wenjack inspire plusieurs hommages artistiques, y compris la chanson « Charlie Wenjack » du musicien mi’kmaq Willie Dunn (1978) et le tableau Little Charlie Wenjack’s Escape from Residential School du peintre anishinaabe Roy Kakegamic (2008). Il inspire également les œuvres de l’auteur Joseph Boyden et du cinéaste Terril Calder.

En octobre 2016, le chanteur principal du groupe The Tragically Hip, Gord Downie, sort The Secret Path, un projet multimédia qui comprend un album, un roman graphique (illustrations par Jeff Lemire) et un film d’animation (diffusé par la CBC le 23 octobre) basés sur l’histoire de Chanie Wenjack. Les recettes du projet sont versées au Gord Downie Secret Path Fund for Truth and Reconciliation par l’intermédiaire du Centre national pour la vérité et la réconciliation à l’Université du Manitoba.

En 2025, Chanie Wenjack est nommé personnage historique national par le gouvernement du Canada.

L’histoire de Chanie Wenjack ainsi que les nombreuses histoires tragiques semblables d’élèves des pensionnats indiens mènent éventuellement à des réformes législatives et à des recours collectifs, dont la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens et la Commission de vérité et réconciliation.

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Lecture supplémentaire

  • La Commission de vérité et réconciliation du Canada : Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir (2015).

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