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Communications au Québec

Les communications au Québec se distinguent par l'existence de deux médias souvent en opposition, servant des cultures différentes et par la façon dont les médias francophones ont toujours exprimé ou renforcé la nature du Canada français.

Communications au Québec

Les communications au Québec se distinguent par l'existence de deux médias souvent en opposition, servant des cultures différentes et par la façon dont les médias francophones ont toujours exprimé ou renforcé la nature du Canada français. Un différend constitutionnel entre Québec et Ottawa sous-tend le développement des communications au Québec. Le gouvernement québécois, s'appuyant sur sa compétence en matière de langue, d'éducation et de culture, a toujours revendiqué une autorité pleine et entière dans le champ des communications sur son territoire. La bataille politique elle-même ne prend tout son sens que par rapport à la situation linguistique et culturelle du Québec dans le contexte nord-américain. L'évolution des médias est par ailleurs intimement liée au processus de modernisation entrepris au Québec depuis la Deuxième Guerre mondiale, plus particulièrement au bouillonnement politique et culturel des années 60 et 70.

La bataille fédérale-provinciale des communications s'amorce dès 1929, année de la publication du rapport Aird. Le gouvernement TASCHEREAU adopte alors une première « loi relative à la radiodiffusion en cette province ». En 193l, une seconde loi du gouvernement québécois sur la radio entraîne une contestation juridique du gouvernement fédéral. Le jugement de la Cour suprême donne raison au gouvernement central. Le Québec en appelle auprès du comité judiciaire du Conseil privé de Londres qui, en 1932, confirme le verdict de la Cour suprême. Le raisonnement invoqué à l'appui de la thèse fédérale se fonde sur une interprétation du paragraphe 10 de l'article 92 de la LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867 qui fait référence au télégraphe, seul moyen moderne de communications connu à l'époque de la Confédération. La radiocommunication est assimilée au télégraphe, car on considère que les ondes hertziennes peuvent difficilement être contenues à l'intérieur des limites des provinces.

Les médias constituant des outils privilégiés de promotion et de diffusion de l'information, les gouvernements québécois successifs ont revendiqué la responsabilité du développement culturel. En 1945, Maurice DUPLESSIS fait adopter une « loi autorisant la création d'un service provincial de radiodiffusion ». Il faudra toutefois attendre 1968 pour que Radio-Québec voie le jour. En 1972, le réseau éducatif de Radio-Québec présente une programmation de quelques heures sur le câble. En 1975, il inaugure sa diffusion en UHF.

En 1969, le gouvernement de Daniel JOHNSON crée le ministère des Communications. Trois ans plus tard, le gouvernement de Robert BOURASSA élargit le mandat de la Régie des services publics à « l'émission, la transmission ou la réception de sons, d'images, de signes, de signaux, de données ou de messages par fil, câble, ondes ou tout moyen électrique, électronique, magnétique, électromagnétique ou optique ». Le contrôle de la CÂBLODISTRIBUTION constitue l'enjeu majeur, et le CRTC et la Régie se disputent la préséance pour la délivrance des permis. En 1977, la Cour suprême met fin à la guerre du câble, tranche en faveur du fédéral et reconnaît sa compétence exclusive en la matière.

Montréal a connu les débuts de la radiodiffusion en 1919 avec l'inauguration de la station XWA (devenue CFCF). En 1932, CKAC devient la première station de radio de langue française. L'avènement de la télévision et son développement rapide dans les années 50 comptent au nombre des facteurs qui ont préparé la RÉVOLUTION TRANQUILLE, notamment l'émission Point de mire, animée par René LÉVESQUE. Des JOURNAUX, des MAGAZINES, des romanciers et des chansonniers francophones y ont aussi contribué. Le secteur publicitaire francophone, jusque-là un simple service de traduction, échappe dans les années 60 à la maîtrise anglophone pour embraser le milieu canadien-français. Les médias s'alimentent à cette effervescence créatrice qui marque tous les secteurs de la culture à partir de la fin du régime duplessiste. La réponse du public fait la fortune de certaines émissions radiophoniques et télévisuelles (voir RADIO, THÉÂTRE DE LANGUE FRANÇAISE À LA; PROGRAMMATION RADIOPHONIQUE; PROGRAMMATION TÉLÉVISUELLE). Au début des années 70, les tribunes téléphoniques ont une popularité rarement égalée ailleurs. Les adaptations de romans pour la télévision (la recette québécoise type pour réaliser des séries dramatiques) connaissent une popularité durable (voir TÉLÉVISION, DRAMATIQUES DE LANGUE FRANÇAISE À LA). Des émissions de variétés faisant appel à la participation de l'auditoire ont également la faveur du grand public.

En 1987, le CRTC accorde des permis à 71 stations de radio sur la bande AM et 82, sur la bande FM, et à 34 stations de télévision, dont 6 appartiennent ou sont affiliées à Radio-Canada et les autres sont affiliées aux Télédiffuseurs associés, à Radio-Québec et à CTV Television Network. S'y ajoutent deux stations indépendantes (y compris Quatre Saisons), une station éducative, une station communautaire et six stations en région éloignée ou dans les communautés autochtones, ainsi que 6 chaînes de TÉLÉVISION PAYANTE. La presse écrite compte alors 12 quotidiens, 102 périodiques régionaux, 122 périodiques spécialisés et 120 publications diverses.

Les cinéastes québécois, malgré de constantes difficultés de financement et de distribution, contribuent à l'évolution de leur art de façon intéressante, notamment dans le développement d'un genre qu'on a appelé cinéma-vérité ou CINÉMA direct. Quelques-uns se font remarquer par leurs recherches sur le langage cinématographique.

Depuis 1960, le Québec est le théâtre d'une série d'expériences originales d'utilisation des médias à des fins d'éducation et d'animation sociale et culturelle. Il en tire une réputation internationale de véritable laboratoire d'expérimentation sociale des communications. Au début des années 60, dans le cadre des travaux du Bureau d'aménagement de l'Est du Québec (BAEQ) et de l'Aménagement rural et développement agricole (ARDA), des films documentaires sont produits pour constituer des outils d'animation dans des rencontres de groupes. L'OFFICE NATIONAL DU FILM, surtout dans son programme « Société nouvelle », est actif au Québec et dans tout le Canada vers la fin des années 60 et le début des années 70. Depuis quelques années, le Groupe de recherches sociales rassemble les pionniers de ce cinéma d'intervention. Ce courant compte maintenant des groupes d'intervention vidéo (voir VIDÉO, ART) qui alimentent de leurs productions divers mouvements sociaux.

En 1967-1968, le ministère de l'Éducation du Québec met sur pied, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, un audacieux projet pilote d'éducation populaire par les médias (TEVEC). Le succès de TEVEC conduit au lancement d'un programme encore plus vaste et plus ambitieux, desservant plusieurs régions du Québec (Multi-Média).

Les années 70 voient fleurir diverses expériences de médias communautaires : des télévisions communautaires, tout d'abord, qui diffusent sur le câble une programmation quantitativement et qualitativement variable. Des difficultés de financement, de recrutement et d'organisation conjuguées à des querelles idéologiques amènent plusieurs d'entre elles à fermer leurs portes après une brève période d'opération. De plus, le jugement de la Cour suprême sur la câblodistribution en 1977 refroidit l'ardeur du ministère des Communications et diminue son intérêt à soutenir financièrement ces expériences par l'intermédiaire de son programme d'aide aux médias communautaires.

Les radios communautaires ont connu un début plus lent, mais elles sont actuellement en pleine expansion. On en compte 19 en opération, et chaque année de nouvelles entrent en ondes (sur bande FM). Moins onéreuses en termes d'investissement et de fonctionnement, elles comblent des lacunes sur le plan de l'information locale et régionale. L'association qui les regroupe, l'ARCQ, organise à Montréal, en août 1983, la première assemblée mondiale des radios communautaires.

Aujourd'hui, le Québec tente de faire face aux défis que pose le développement des nouvelles technologies des communications. La multiplication des canaux de télévision disponibles accentue la menace d'américanisation culturelle. L'expansion rapide de la câblodistribution, de l'informatique et des services de bureautique et de télématique exige une réaction prompte des Québécois pour le développement d'une industrie locale de matériel et de logiciels. Comme pour les médias antérieurs, la petitesse du marché intérieur rend la tâche difficile.