Design d'environnement
Le design d'environnement peut s'appliquer à l'ensemble d'une ville (comme à KITIMAT), à des secteurs bien définis d'une ville (comme à Don Mills, à Toronto) ou à certaines rues et à certains groupes d'édifices. Les premiers modèles de design d'environnement qui subsistent encore au Canada sont ceux touchant l'ensemble d'une ville. Québec est une ville compacte, fortifiée, dont le design respecte l'Église et l'État, et elle doit son existence à la présence du fleuve Saint-Laurent. Dans le Vieux-Montréal, en dépit des nombreuses démolitions et reconstructions, les rues conservent la même structure qu'au XVIIIe siècle et convergent vers la Place d'Armes sur la ligne de crête, en son centre. Halifax doit son caractère visuel à la disposition orthogonale de ses rues, conçue par des ingénieurs militaires britanniques.
Design du tissu urbain
À la fin du XIXe siècle, au moment où les villes connaissent une expansion rapide, l'urbanisme fait son apparition de sorte que le design d'environnement se limite aux quartiers où l'accent est mis sur l'aspect visuel des rues et les grands espaces. Ottawa est peut-être la seule ville canadienne où, au XXe siècle, on a pratiqué le design du tissu urbain sur une grande échelle. Du point de vue visuel, chaque nouvelle ville de l'Ouest mise sur l'hôtel de ville et les ÉDIFICES GOUVERNEMENTAUX. La rue constitue un élément important du design d'environnement. La plupart des villes ont leur grande rue : la rue Sherbrooke à Montréal et l'avenue University à Toronto sont l'artère principale de chacune.
Après la Deuxième Guerre mondiale, lors de la croissance rapide des villes, la conception de l'habitat urbain cède la place à la conception des immeubles. Cependant, dans les nouveaux quartiers résidentiels, on procède à d'importants essais pour concevoir l'environnement dans son ensemble. Don Mills est un exemple de ce genre avec ses rues courbes et bordées d'arbres et ses immeubles bien espacés, selon les principes prônés par le mouvement de la cité-jardin. Ce quartier intègre les lieux de travail, les magasins et les écoles dans un design qui insiste sur l'accès piétonnier et sur un environnement ressemblant à un parc. Plus tard, Flemingdon Park, à Toronto, répond à un besoin de plus grande densité par des immeubles plus serrés et des bords de rues plus précis. Grâce au stationnement souterrain, il y a plus de place au sol pour les allées de piétons et les terrains de jeu, sur lesquels donnent les groupes de maisons construites tout alentour.
La conception des quartiers commerçants du centre-ville entre dans une nouvelle ère avec la construction, de 1956 à 1965, de la PLACE VILLE-MARIE à Montréal. Ce projet, qui regroupe des magasins de détail, des sièges sociaux et un important centre bancaire, fait naître l'idée d'un complexe immobilier où la circulation et l'accès du public sont tridimensionnels, les entrées étant à plusieurs niveaux. En outre, il permet aux piétons d'accéder directement au métro et il renferme une place publique. Contrairement à ce que l'on craignait, à savoir que les affaires s'éloigneraient des rues traditionnelles du centre-ville, la Place Ville-Marie fait concurrence aux villes de banlieue et contribue à revitaliser le coeur de Montréal.
Fonctions des espaces publics
Historiquement, les espaces publics pavés ne sont pas des éléments importants dans les villes canadiennes, sauf dans les vieilles villes françaises du Québec. Au début des années 60, tant dans les projets privés que publics, on commence à reconnaître leur fonction, qui est très différente de celle des parcs. Pour les repas du midi, les rassemblements publics, les fêtes, les expositions et les manifestations, ces places ou squares ouvrent de nouvelles perspectives sur la ville et l'intégralité des immeubles. L'HÔTEL DE VILLE DE TORONTO, au square Nathan Phillips, et Robson Square à Vancouver sont des exemples de tels édifices publics. À cette même époque, des mouvements populaires se forment dans les villes pour réclamer que certaines rues soient fermées à la circulation automobile afin de créer des mails piétonniers, comme la rue Sparks à Ottawa (1967).
Maintenant, on construit de nombreux immeubles commerciaux avec des places publiques qui donnent sur la rue ou qui sont entourées d'immeubles. Le complexe de la Banque Toronto-Dominion, à Toronto, est un modèle de tours à bureaux à façades droites construites autour d'une place pavée. Commerce Court, aussi à Toronto, est un groupement adroit d'immeubles modernes qui s'ajoutent au siège social ornementé d'une banque datant de 1931 et qui renferment une cour paisible. Ce concept a fait naître un nouvel élément dans le design d'environnement moderne : la place publique qui ne peut être qu'entrevue de la rue et qui offre une voie piétonnière permettant de traverser le pâté de maisons.
L'année 1967 marque de façon importante le design d'environnement au Canada. Les célébrations du centenaire de la Confédération canadienne favorisent les manifestations de fierté nationale et civique dans les nouveaux édifices et parcs publics et attirent l'attention sur un patrimoine architectural souvent négligé (voir PATRIMOINE, CONSERVATION DU; ART DES LIEUX PUBLICS). L'EXPO 67 tient aussi un rôle prédominant par la présentation, en un ensemble mémorable, de nouveaux éléments de design d'environnement et d'un élégant mobilier urbain et par l'intégration totale de sentiers, d'espaces et d'immeubles. En 1971, quand sont institués les prix Vincent Massey pour l'aménagement urbain, les catégories sont nombreuses et variées : plantation d'arbres, logements, conservation de rues historiques et promenades.
Nouveau coup d'oeil sur la ville
Le design d'environnement à différents niveaux (au sol, au-dessus et au-dessous) répond à la fois aux conditions climatiques difficiles et aux exigences de la circulation dans le centre des villes. Outre les voies piétonnières entre les édifices, le design d'environnement crée de grandes places de rassemblement intérieur ou atriums. Les nombreuses voies piétonnières souterraines à Montréal et à Toronto relient les atriums, comme les rues relient les squares. Le complexe Desjardins à Montréal est conçu comme lieu de rassemblement public. Le complexe HUB de l'U. de l'Alberta est en fait une rue intérieure surélevée, bordée de bureaux et de commerces au premier étage, les logements des étudiants se trouvant au-dessus et au-dessous. L'un des modèles de design d'environnement les plus grandioses est l'EATON CENTRE, à Toronto, une rue à plusieurs niveaux bordée de centres de services et de magasins et reliée au métro et aux autres rues de la ville sous un toit de verre. Les atriums ajoutent une autre dimension à la conception des villes, surtout lorsqu'ils comportent plusieurs liens avec la rue. Protégée des rigueurs climatiques, la ville intérieure change les perspectives de la ville extérieure et influence son apparence. À Calgary, le système de passerelles vitrées qui enjambent les rues entre les immeubles (Plus 15) devient une caractéristique de design de rues et propose un nouveau coup d'oeil sur la ville. Cependant, un mauvais usage de ce moyen de relier les édifices, soit en faisant fi du paysage de la rue et des vues, peut être désastreux en matière de design d'environnement. La passerelle à piétons qui traverse la rue Rideau à Ottawa en est un parfait exemple : elle réduit le prestige de cette rue importante, obscurcit la vue du Parlement et atténue l'effet que crée l'arrivée au centre de la Place de la Confédération.
La disposition de certaines petites villes du Nord découle du besoin de les protéger contre les rigueurs de l'hiver. Des villes comme Churchill, au Manitoba, ont pour point central l'édifice principal de la ville, où se trouvent la majorité des services communautaires publics et privés, et un espace public intérieur, qui tient lieu de square. Fermont, au Québec, est conçue pour atténuer le froid hivernal dans l'ensemble de la ville. Les services publics, les magasins de détail et les appartements se trouvent tous dans un seul édifice longiligne qui est situé de manière à protéger l'ensemble des petites habitations contre les vents froids.
Possibilités de changement
L'aspect visuel de la ville se transforme au rythme des changements économiques, des pratiques culturelles et des courants de la mode. Quand l'industrie a quitté le centre de la ville et que les chemins de fer et les ports ont été délaissés, l'existence de propriétés sous-utilisées et abandonnées crée une occasion de réaménager ces secteurs de la ville. Depuis 1970, la propriété des chemins de fer des centres-villes fait l'objet de concours de design, comme c'est le cas à Regina et à Toronto. Le fait que les gens ont de plus en plus de temps libre et qu'ils veulent des divertissements et des biens de consommation donne lieu à la transformation des vieux secteurs riverains ouvriers en des logements, boutiques et marinas, l'accent étant mis sur l'ouverture des espaces publics et l'accès des piétons au bord de l'eau. Halifax, Toronto et Québec sont des exemples à grande échelle de réalisations récentes en matière de design d'environnement des secteurs riverains visant à créer des espaces ouverts et des vues sans entrave. EXPO 86 à Vancouver s'est avérée une autre occasion de réaménager de façon semblable le bord de l'eau. Il reste encore aujourd'hui quelques grands édifices du secteur parapublic qui rappellent l'exposition. Même dans les petites villes, on cherche à avoir une « vue » sur l'eau.
Les changements culturels qui favorisent les mouvements populaires à la fin des années 60 joints à la prospérité subséquente des années 70 contribuent à changer l'attitude de la population envers les rues et les places publiques. Celles-ci ne sont plus simplement un endroit qu'on traverse, mais plutôt un lieu où l'on s'attarde. Les terrasses de café font leur apparition, agrémentées d'arbustes et de lampadaires. Bancs, arbres et jardinières trouvent leur place sur les trottoirs, et les petites bandes de terrains inutilisables entre les immeubles deviennent des parcs miniatures. Ces mesures servent à adoucir l'image de la ville contemporaine, mais, dans l'ensemble, elles n'ont pas l'envergure d'un design de rues digne de ce nom. Par exemple, les jardinières, les bancs et les lampadaires au charme vieillot et les arbres en pot de la rue Sherbrooke, à Montréal, donnent au trottoir l'allure d'un parcours à obstacles. Par contre, les majestueux arbres d'ombre qui autrefois la bordaient donnaient à la rue Sherbrooke l'importance et le prestige qui conviennent à la rue principale d'une grande ville.
Patrimoine naturel
Les mouvements populaires, la conservation du patrimoine naturel et, plus tard, l'importance accordée à la condition physique et à l'exercice suscitent un intérêt pour les boisés, la plantation d'arbres, les sentiers de promenade et les pistes cyclables. Cela entraîne l'aménagement, par exemple, du parc du Canal Lachine à Montréal, aussi une zone industrielle en déclin, et du réseau de promenades qui sillonne Toronto. Ces sentiers piétonniers ajoutent une autre dimension au design de la ville, car ils ne suivent pas le réseau routier, ce qui donne à la scène urbaine une vue différente. Le Wascana Centre à Regina est un exemple mémorable de design d'environnement des années 70 qui s'organise autour d'un lac artificiel et d'un parc, en bordure desquels sont regroupés des édifices publics selon la tradition du mouvement de la cité-jardin.
L'avènement des gratte-ciel, des mégaprojets, des places publiques et des atriums fait naître une plus grande préoccupation pour les vieilles parties de la ville, la conservation des monuments historiques et le logement. Ainsi, on conçoit, dans les années 80, un nombre de plus en plus grand de projets modestes qui permettent de revaloriser et de conserver le patrimoine confiné dans les rues familières. Qu'il s'agisse des rues escarpées et pittoresques de St. John's à Terre-Neuve ou du Bastion Square de Victoria, dans de nombreuses villes et le long d'innombrables artères principales, on reconnaît de plus en plus la valeur de l'image urbaine.
Dans les années 80, un mécontentement général causé par l'expansion des banlieues et la dépendance envers l'automobile suscite la conception d'enclaves résidentielles à densité élevée, comme False Creek à Vancouver. Dans les années 90, préoccupé par les questions d'ordre environnemental, le gouvernement de l'Ontario lance un concours relatif à la conception d'une nouvelle ville, Seaton, qui doit être une collectivité autonome où seraient préservées les caractéristiques naturelles comme les cours d'eau, les collines et la forêt.
Voir aussi ARCHITECTURE PAYSAGÈRE.