En 1950, l'Assemblée générale des Nations Unies a proclamé le 10 décembre Journée des droits de l'homme. Cette journée vise à mieux faire connaître le rôle de la Déclaration universelle des droits de l'homme en tant que « norme commune pour l'exercice de ces droits par tous les peuples et toutes les nations ».
Pour souligner la Journée des droits de l'homme, nous présentons le témoignage remarquable de personnes qui ont trouvé refuge au Canada pour fuir une situation où on violait leurs droits fondamentaux. Il s'agit de Vilien Chen (Vietnam), Marie‑Denise Douyon (Haïti) et Claudia Covalciuc (Roumanie).
Certaines de ces personnes ont été déplacées en raison d'un conflit armé, d'autres à cause de leur activisme politique ou de leur origine ethnique. Dans la majorité des cas, leur témoignage porte sur leur vie avant et après ce déplacement forcé. Tous ces témoignages font référence à des expériences vécues par plusieurs Canadiens.
Ces histoires sont tirées des archives de Passages Canada. Dans le cadre de cette initiative d'Historica Canada, des bénévoles livrent leur témoignage personnel sur l'identité culturelle, le patrimoine et l'immigration à des écoles et à des groupes communautaires.
Vilien Chen
J’aimerais pouvoir vous raconter mes premiers moments au Canada, mais je n’en ai gardé aucun souvenir. C’était à l’été 1979. J’avais trois ans. Mes parents m’ont toujours demandé de ne pas dire aux gens que nous étions des réfugiés du Viêt Nam. Ils croyaient que les Chinois nous regarderaient avec mépris s’ils le savaient. Ils tenaient également à ce que je sache qu’ils n’avaient pas accepté d’aide financière du gouvernement. C’était important pour eux.
Encore aujourd’hui, le mot « réfugié » a un sens péjoratif pour moi. On m’a enseigné à ne pas trop parler de mon passé. Aux gens qui me demandaient où j’étais née, je répondais que j’avais grandi au Canada. C’était important que je ne discute pas du passé de ma famille, probablement parce que les gens auraient deviné d’où on venait. Et cela aurait attiré la honte sur nous.
Il y a 10 ans, j’ai terminé mes études. Mes parents ont alors décidé d’aller au Viêt Nam, et ils m’ont demandé si je voulais les accompagner. « Ce serait l’occasion pour toi de voir l’endroit où tu es née », m’ont-ils dit. Je n’en voyais pas l’intérêt et je n’en avais pas envie. Je préférais rester avec mes amis. Ce voyage aurait pu être un cadeau pour l’obtention de mon diplôme. Je me souviens qu’à l’époque, mon grand-père me demandait sans cesse si j’avais du temps. Il souhaitait m’amener à Hokkien, d’où viennent mes ancêtres. Je n’ai pas eu la chance d’y aller en sa compagnie.
Cet été, 10 ans exactement après leur première visite au Viêt Nam, ma mère et mon père ont eu envie d’y retourner. Cette fois, j’ai vraiment souhaité y aller aussi. J’ai senti que c’était le bon moment. Dès le premier coup d’œil à la maison de mon grand-père, j’ai compris que ce n’était plus chez nous. Mon père pense que le gouvernement a loué l’endroit. Alors que j’étais devant l’immeuble bleu pâle et gris, il y avait un jeune enfant assis sur le balcon du dernier étage et j’ai pensé : « Si mes parents ne s’étaient pas réfugiés au Canada, ma vie et mon avenir auraient probablement été semblables à ceux de cet enfant ».
Droits de la personne
Après la Première Guerre mondiale, une série de traités imposent à plusieurs pays européens l’obligation de protéger les minorités raciales, religieuses et nationales créées par la Société des nations et de surveiller l’exécution de ces obligations. En 1948, l’Assemblée générale de l’Organisation des nations unies proclame la Déclaration universelle des droits de l’homme) comme « l’idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations afin que tous les individus et tous les organes de la société, ayant cette Déclaration constamment à l’esprit, s’efforcent, par l’enseignement et l’éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d’en assurer, par des mesures progressives d’ordre national et international, la reconnaissance et l’application universelles et effectives ». Y sont inclus les libertés fondamentales et les droits juridiques (appelés sur la scène internationale libertés ou droits civils et politiques) ainsi que les droits à l’égalité et les droits économiques, sociaux et culturels. La Déclaration est adoptée par un vote unanime, avec l’abstention de six membres du bloc soviétique, de l’Arabie Saoudite et de l’Union sud-africaine.
Le Canada joue un rôle important dans la rédaction de la Déclaration. L’un des membres du comité est John Peters Humphrey, professeur de droit international et expert en droits de la personne. [En 1946, John Humphrey devient directeur de la Division des droits de l'homme des Nations Unies.]