
Enfance et éducation
Charlotte Edith Anderson naît et grandit sur la réserve des Six Nations à Ohsweken, près de Brantford, en Ontario. De descendance mohawk, Edith est la cadette d’une fratrie de huit enfants (voir aussi Haudenosaunee). Elle fréquente l’externat situé sur la réserve et obtient son diplôme d’études secondaires au Brantford Collegiate Institute. On la considère comme une élève douée. À l’époque, il est rare qu’une femme canadienne, autochtone ou non, termine ses études secondaires.
Au début de la vingtaine, Edith n’est admise dans aucune école de soins infirmiers en Ontario. En effet, la plupart des programmes de soins infirmiers au Canada excluent les autochtones ; la Loi sur les Indiens constitue un frein à leur éducation supérieure (voir aussi Émancipation). Conséquemment, Edith se tourne vers les États-Unis, où elle est acceptée à la New Rochelle Nursing School à New York. En 1914, elle termine première de sa classe et devient ainsi la première infirmière autochtone diplômée du Canada.
Carrière d’infirmière dans l’armée
Avant que les États-Unis s’engagent dans la Première Guerre mondiale en 1917, Edith travaille comme infirmière dans une école privée à New Rochelle, New York. À 27 ans, elle se porte volontaire pour intégrer le service infirmier de l’armée américaine avec 14 autres infirmières canadiennes. Elle est l’une des rares femmes autochtones qui ont servi outre-mer dans ce service.
Avant de partir pour la France, Edith retourne sur sa réserve des Six Nations. C’est là qu’on lui aurait remis des vêtements cérémoniaux mohawks à porter en cas de décès outremer. Sa communauté ne s’attend pas à la voir revenir, car la guerre fait de nombreuses victimes.
Pendant plus d’un an, Edith travaille comme infirmière à l’hôpital de la base 23 à Vittel, en France, soignant les soldats blessés dans des attaques au gaz ou dans les combats de tranchées. Parfois, elle sert dans d’autres centres médicaux en France, et arpente même des champs de bataille à la recherche de blessés. Son travail est à la fois épuisant sur le plan émotif et exténuant sur le plan physique.
Dans son journal, elle a décrit ses quarts de travail de 14 heures et son chagrin suivant le décès d’Earl King, un patient qui voit Edith comme sa grande sœur. On s’attend à ce que le soldat de 20 ans, atteint d’un projectile au cou, se rétablisse, mais une hémorragie survient tôt un matin, et il décède quatre heures plus tard. Edith a écrit : « J’ai le cœur brisé. J’ai pleuré presque toute la journée et j’ai été incapable de dormir. »
L’infirmière, accablée par le deuil, écrit donc à la mère de King aux États-Unis, lui disant qu’elle était aux côtés de son fils quand il est décédé. Après la guerre, Edith retourne sur sa réserve. Les parents de King la contactent et l’invitent à les visiter en Iowa, invitation qu’Edith accepte. Plus tard, les parents du jeune homme visitent Vittel et, à leur retour en Amérique, rendent visite à la jeune infirmière.
En 1983, un journaliste du Grand River Sachem, quotidien local, interviewe l’infirmière et ancienne combattante de 93 ans. Elle évoque son choc à la suite du décès d’Earl King et décrit ses expériences à titre d’infirmière en temps de guerre : « Nous nous approchions des lieux où on s’était battu. C’était une vision terrible : des immeubles en ruine, des arbres calcinés, partout des obus, des villes entières soufflées. »
Droit de vote
Edith devient la première femme autochtone et membre en règle d’une bande à obtenir le droit de vote à des élections fédérales (voir aussi Indien). La Loi du service militaire (1917) permet en effet aux infirmières de voter en temps de guerre. Toutefois, les femmes autochtones en général n’obtiennent pas ce droit au fédéral avant 1960 (voir aussi Les femmes autochtones et le droit de vote).
Carrière d’infirmière d’après-guerre
Après la Première Guerre mondiale, Edith continue de militer pour qu’on offre de meilleurs soins de santé aux Autochtones et est élue, en 1939, présidente honoraire de la Croix-Rouge d’Ohsweken. À l’hôpital de la réserve, elle travaille comme infirmière et sage-femme sur une base régulière jusqu’à 65 ans, soit en 1955 (voir aussi Santé des Autochtones).
Vie personnelle
Edith retourne sur sa réserve après la Première Guerre mondiale et épouse Claybran Monture. Le couple a quatre enfants : Bud, Helen, Ron et Don. Un cinquième enfant, Gilbert, meurt en bas âge en 1929.
Décès
Edith meurt sur la réserve des Six Nations en 1996, une semaine avant son 106e anniversaire. Elle a eu 14 petits-enfants et de nombreux arrière-petits-enfants. Elle est enterrée au cimetière anglican St. John’s, sur la réserve.