Formation et début de carrière
À cinq ans, Richard Grégoire s’intéresse déjà à la musique. L’accordéon est son premier instrument. Particulièrement doué et stimulé au départ par la musique populaire, il s’initie au répertoire classique à l’âge de 19 ans lorsqu’il entreprend des études en musique à l’Université de Montréal. Il y découvre aussi la musique contemporaine grâce à Serge Garant. Il obtient sa licence universitaire en 1968. En 1969, la Société Pro Musica et la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ) créent et enregistrent sa Cantate pour soprano solo, 12 voix, orgue, guitare et percussions.
Boursier du Conseil des arts du Canada et du gouvernement français, Grégoire effectue en 1969 et 1970 un stage au Groupe de recherches musicales (GRM), à Paris, sous la direction de Pierre Schaeffer. Il y explore la musique électroacoustique à l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF), suit des cours d’analyse et de composition avec Gilbert Amy et participe à la création d’une œuvre électroacoustique collective présentée au Festival d’Avignon en 1969. À partir de 1971, il travaille comme arrangeur, orchestrateur et directeur musical. Il fait alors sa marque dans les domaines du spectacle, de l’industrie du disque, de la télévision et de la publicité.
En 1974, sa pièce pour un ou plusieurs saxophones « Trajet » est jouée à l’Université de Montréal, où il enseigne à la Faculté de musique de 1971 à 1976. En tant qu’arrangeur, il travaille notamment pour Édith Butler, Jim et Bertrand (Jim Corcoran et Bertrand Gosselin), Pauline Julien, Diane Juster, Jacques Michel, Les Séguin (Richard et Marie-Claire), Fabienne Thibeault ainsi que la Société Radio-Canada (SRC). Il compose aussi de la musique pour le téléthéâtre. La pièce en quatre actes Le deuxième coup de feu, écrite par Robert Thomas et télédiffusée à la SRC, remporte en 1978 le grand prix du Conseil canadien de la musique pour la meilleure musique originale d’émission dramatique ou documentaire.
Compositions musicales pour le cinéma et la télévision
Après avoir travaillé avec Lewis Furey, pour qui il orchestre les trames sonores des films Night Magicet Maria Chapdelaine(Gilles Carle), Grégoire fait la rencontre du réalisateur Yves Simoneau, qui l’invite à composer la musique de son tout nouveau polar Pouvoir intime (1986). Cette proposition lui permet de réaliser un rêve, celui de créer des trames sonores pour longs métrages. Rapidement, la chimie s’installe entre les deux créateurs et il s’ensuit une collaboration féconde, tant au cinéma avec Les fous de Bassan (1987), Dans le ventre du dragon (1989), Perfectly Normal (1990) et Ignition (2001) qu’à la télévision avec 36 Hours to Die (1998), Nuremberg (1999-2002) et Napoléon (2002).
Au cours de sa carrière, Richard Grégoire a composé la musique de nombreux films québécois primés, dont : Exit (1986), T’es belle Jeanne (1988), Cruising Bar (1989) et L’enfant d’eau (1995) de Robert Ménard; Les Bottes (1987), moyen métrage de Michel Poulette, qui lui permet de décrocher son premier prix Gémeaux; Being at Home with Claude (1992), pour la musique duquel il remporte un prix Génie, Shehaweh (1992), qui lui vaut un autre Gémeaux, et Souvenirs intimes (1999) de Jean Beaudin; Léolo (1992) de Jean-Claude Lauzon; Octobre (1994) de Pierre Falardeau; C’était le 12 du 12 et Chili avait les blues (1994) et Le cœur au poing (1998) de Charles Binamé. Cependant, c’est avec la musique de la série Les filles de Caleb diffusée en 1990-1991 à la télévision de Radio-Canada (ainsi qu’en France, en 1992-1993, sous le titre Émilie, la passion d’une vie) qu’il se fait davantage connaître du grand public.
Dans une entrevue accordée en 1996, Grégoire raconte qu’au moment où la maison de production Cité Amérique l’a approché pour l’écriture du démo de cette télésérie, il était très pris par un projet musical l’obligeant à faire la navette entre Montréal et Toronto. Son épouse, qui avait lu le roman d’Arlette Cousture, a toutefois insisté pour qu’il se penche sur cette commande, évoquant l’importance des Filles de Caleb dans l’imaginaire québécois. Pour créer la maquette, Grégoire s’est donc inspiré du résumé et du portrait psychologique des personnages que lui a livrés sa compagne. Loin de chercher à plaire au jury à tout prix, il a présenté son démo sans attente particulière et à sa grande surprise, il a été sélectionné. La série réalisée par Jean Beaudin a remporté un énorme succès à la télévision québécoise et la trame musicale a valu au compositeur un prix Félix ainsi qu’un prix Gémeaux en 1991.
Dans son processus de création, Richard Grégoire a toujours accordé une grande importance à l’atmosphère, qu’il considère comme une maille centrale de la composition. S’inspirant de l’époque de l’œuvre (Marguerite Volant) ou du caractère psychologique (L’enfant d’eau), il a su manipuler et intégrer diverses ambiances sonores avec un remarquable talent.
Reconnaissance
À partir de la fin des années 1970, Richard Grégoire est devenu l’un des principaux compositeurs québécois de musique de film. À sa retraite en 2004, il a reçu le prix Jutra-Hommage (aujourd’hui prix du Gala du cinéma québécois) pour sa contribution à la production cinématographique québécoise. Depuis 2006, la Fondation de la Société professionnelle des auteurs et compositeurs du Québec (SPACQ) remet annuellement le prix Richard-Grégoire afin de récompenser un compositeur de musique sur image.