Hardial Bains | l'Encyclopédie Canadienne

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Hardial Bains

Hardial Bains, dirigeant communiste, chargé de cours en microbiologie (né le 15 août 1939, dans le village de Chak 6, en Inde britannique; décédé le 24 août 1997, à Hull, au Québec). Hardial Bains a été le premier secrétaire du Parti communiste du Canada (marxiste‑léniniste) de 1970 à 1997. Il a participé à un certain nombre de mouvements politiques de gauche, au Canada et dans d’autres pays. C’était un communiste « antirévisionniste » qui a rejeté les changements doctrinaux apportés par le dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev, après la mort de Joseph Staline. Le leadership de Hardial Bains a aidé le Parti marxiste‑léniniste du Canada à devenir l’organisation communiste ayant connu le plus de succès au Canada dans les années 1970 et 1980.

Jeunesse

Hardial Bains est le plus jeune de sept enfants. Né dans une famille sikhe, au Pendjab, en 1939, il grandit principalement à Mahilpur. Sa famille, politiquement engagée, fait l’objet de persécutions pour ses convictions communistes et anticoloniales. Son père est perçu comme un communiste endurci et emprisonné fréquemment pour son opposition virulente à l’impérialisme britannique en Inde. Compte tenu des fréquents séjours en prison de son père et de ses activités politiques secrètes, Hardial ne rencontre ce dernier, pour la première fois, qu’à l’âge de neuf ans. Sa mère subvient aux besoins de la famille nombreuse, avec des moyens limités, tout en veillant à ce que tous ses enfants soient scolarisés. Les sœurs de Hardial auraient été les premières femmes de Mahilpur à entreprendre des études supérieures. Le jeune garçon rejoint le Parti communiste indien, à l’âge de neuf ans, pour libérer son pays de la domination britannique. Pendant une longue période, il aurait été le plus jeune membre du parti communiste en Inde. Tout au long de sa jeunesse en Inde, il maintient son activité politique et est respecté comme un leader naturel.

Immigration au Canada

Hardial Bains immigre au Canada en 1959, arrivant tout d’abord à Victoria, en Colombie‑Britannique, avant de déménager à Vancouver, en 1960. Il entreprend des études supérieures en microbiologie, à l’Université de la Colombie‑Britannique, de 1960 à 1965. Au cours de cette période, il est politiquement actif sur le campus, tout en menant des activités de bénévolat dans des organisations étudiantes. Il occupe également des postes de responsabilité au sein de l’India Students Association et met sur pied l’Academic Action Committee. Il souhaite promouvoir un renforcement du militantisme et une multiplication des discussions chez les étudiants de tous âges. En 1962, il organise une manifestation étudiante contre le blocus de Cuba par les États‑Unis. (Voir aussi Crise des missiles cubains.)

Début des activités politiques

Hardial Bains est à l’origine, en 1963, de la création d’un groupe de réflexion sur le campus de l’UBC, appelé The Internationalists, visant à donner aux étudiants progressistes l’occasion de discuter de politique et de mettre en place des activités collaboratives, sans être, nécessairement, membres de partis politiques établis et sans s’inscrire dans des écoles de pensée politique existantes. Hardial Bains restera, tout au long de sa vie, attaché à ce thème. Il s’est constamment efforcé de créer de nouvelles organisations politiques, plutôt que d’inscrire ses convictions dans des organisations ou des modes de pensée existants.

En 1965, Hardial Bains est invité à enseigner la microbiologie au Trinity College de Dublin, ce qu’il fait pendant deux ans. Lors de son séjour en Irlande, il fonde à Dublin The Irish Internationalists, un mouvement ayant une vocation similaire à celle du groupe du même nom qu’il avait établi à Vancouver, qui donnera naissance au Parti communiste d’Irlande (marxiste‑léniniste). Toujours en Irlande, il met également sur pied le Necessity for Change Study Program, une initiative visant à contribuer à l’éducation politique des jeunes, tout en travaillant à des solutions réellement constructives. Hardial Bains est convaincu que les manifestations et le militantisme politique sont insuffisants pour faire évoluer les structures politiques prévalant dans un monde capitaliste et impérialiste. Il estime que ces structures sont trop profondément ancrées dans le psychisme humain. C’est pourquoi il préconise une réévaluation complète des structures de pouvoir existantes par la jeunesse, en repartant de zéro. Il cible les jeunes, car il pense qu’ils sont d’ores et déjà prêts à adopter des idées progressistes et à changer.

De retour au Canada, en 1967, il crée et dirige l’Ideological Studies Centre, poursuivant l’élaboration et l’amélioration de sa philosophie de la « nécessité du changement ». Il participe à diverses luttes de libération, au pays et à l’étranger. Sur la scène nationale, il appuie le droit des Autochtones à l’autodétermination et le droit à l’indépendance du Québec. Sur la scène internationale, il soutient les droits des peuples du monde entier à la sécurité et à l’autodétermination, notamment dans des régions victimes de ce qu’il considère être l’impérialisme américain, comme Cuba, la Corée et le Vietnam. (Voir  : Crise des missiles cubains; Guerre de Corée; Guerre du Vietnam.) C’est dans ce contexte qu’il se rapproche du dirigeant communiste chinois Mao Zedong.

Parti communiste du Canada (marxiste‑léniniste)

Hardial Bains est surtout connu pour être le fondateur et le premier secrétaire du Parti communiste du Canada (marxiste‑léniniste) (PCC‑ML) qui, en dépit d’un nom similaire, n’a aucun lien avec le Parti communiste du Canada. Pour faire la distinction entre les deux organisations, la première est officiellement répertoriée par Élections Canada comme le Parti marxiste‑léniniste du Canada (voir aussi Directeur général des élections). Les deux partis se distinguent par l’approche antirévisionniste de Hardial Bains au communisme. Il obtient rapidement une reconnaissance internationale comme chef de file idéologique et philosophique des antirévisionnistes. On porte à son actif d’avoir contribué à la création de partis marxistes‑léninistes dans le monde entier, notamment au Royaume‑Uni, aux États‑Unis, à Trinité‑et‑Tobago et en Inde.

Après la mort de Mao Zedong et les réformes ultérieures initiées par Deng Xiaoping, au milieu des années 1970, le PCC‑ML rompt avec le Parti communiste chinois comme principal guide idéologique. Hardial Bains réoriente alors son parti, avec, comme nouveau modèle, le Parti communiste albanais et son chef stalinien, Enver Hoxha.

Au cours des années 1970, il fait porter l’essentiel de ses efforts pour transformer le PCC‑ML en une organisation viable. C’est au cours des années 1970 et 1980 qu’avec son parti, il déploie la plus grande activité, tant au Canada qu’à l’étranger. Au cours de cette période, le parti commence également à présenter des candidats aux élections fédérales (voir aussi Système électoral canadien). À ce jour, son meilleur résultat remonte à 1974, lorsqu’il obtient plus de 16 000 votes. Aux élections de 1980, le parti présente le plus grand nombre de candidats, soit environ 177. Hardial Bains lui‑même est candidat, à cinq reprises, en 1972 et en 1974 dans une circonscription de Toronto et de 1988 à 1997 dans une circonscription d’Ottawa, sans jamais obtenir plus de 150 voix.

Hardial Bains se déplace fréquemment, prononçant de nombreux discours et mobilisant la population contre l’impérialisme et l’autosatisfaction « bourgeoise ». Dans les années 1980, le PCC‑ML est également actif dans la lutte contre le racisme, s’attirant toutefois des critiques lorsqu’occasionnellement, ses membres manifestent violemment leur position. En 1975, Hardial Bains est pris à partie pour avoir proposé un groupe d’autodéfense sud‑asiatique pour combattre le racisme à Vancouver.

La GRC et la police locale arrêtent régulièrement des membres du parti, procédant à de nombreuses descentes dans les librairies qu’il gère. Hardial n’est jamais arrêté. Cependant, dans les années 1970, l’Inde annule son passeport, apparemment en raison de son opposition à la proclamation de l’état d’urgence par le gouvernement d’Indira Gandhi. Jusqu’en 1988, il se voit également refuser la citoyenneté canadienne. Il est également possible que le gouvernement fédéral ait tenté de l’expulser, dans les années 1970.

Certains opposants de gauche se sont demandé comment le parti était financé. Les reportages de l’époque qualifient souvent le PCC‑ML d’organisation « opaque », avec un noyau d’une centaine de membres, à Montréal et à Toronto. Certaines sources suggèrent même un financement par la GRC, en vue de délibérément déstabiliser l’action politique de gauche.

À la fin des années 1980, l’Union soviétique et le communisme international s’effondrent. L’orientation du Parti marxiste‑léniniste évolue, en s’alignant parfois sur la Corée du Nord, puis en tournant ses regards vers Cuba comme guide idéologique.

Au début des années 1990, la fin de l’URSS convainc Hardial Bains d’embrasser la cause du renouveau démocratique au Canada. Cette nouvelle orientation conduit à la création du Canadian Renewal Party, une organisation politique vouée à doter le peuple canadien des moyens de prendre son destin en main. Le parti fait de la réforme électorale un élément central de son programme, faisant valoir que les gens de la classe ouvrière rencontrent souvent des obstacles pour voter. Il critique, en outre, les lois sur le financement des partis, qui ne distribuent les fonds publics qu’à certains partis de manière inéquitable.

Hardial Bains s’oppose à l’Accord de Charlottetown de 1992. Il estime que les accords n’abordent pas de manière adéquate les problèmes de longue date liés à la situation du Québec au sein du Canada et à l’autodétermination des Autochtones. Il se montre critique vis‑à‑vis des amendements constitutionnels proposés, jugeant qu’ils maintiennent la division de l’État canadien, sous couvert d’un renouveau démocratique et constitutionnel.