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Participation politique au Canada

Les Canadiens participent au système politique chaque fois qu’ils tentent de façon volontaire d’influencer les résultats d’une élection ou les politiques d’un gouvernement ou d’un parti. Cela peut se faire de diverses façons, du vote à la campagne pour une cause politique, en passant par la candidature aux élections. Le taux de participation le plus élevé à une élection fédérale a été de 79,4 % en 1958. Le taux de participation des électeurs a diminué pendant les années 1990 et 2000, atteignant 58,8 % en 2008. Les chiffres ont ensuite commencé à augmenter, atteignant 68,3 % en 2015, et 67 % en 2019. Les femmes, qui ont obtenu le droit de vote au fédéral en 1918, ont un taux de vote légèrement plus élevé que les hommes. Les citoyens plus âgés sont plus politiquement actifs que les jeunes, bien que le taux de vote parmi les personnes âgées de 18 à 34 ans a rapidement augmenté entre 2011 et 2019. 

Façons de participer

La participation politique peut être aussi simple que de déposer un bulletin de vote, ou aller plus loin et se présenter comme candidat pour un poste politique. L’action politique peut viser à changer les grandes lignes de la politique publique, ou elle peut être très précise (par exemple rechercher un avantage personnel comme une nomination par favoritisme). L’action politique peut même être illégale ; par exemple la vente des relations politiques en échange d’argent (voir aussi Corruption et Conflit d’intérêts).

Payer ses impôts n’est pas normalement considéré comme un acte politique en soi, mais refuser de les payer peut l’être. Faire la grève pour régler des questions salariales ou pour améliorer des conditions de travail n’est pas considéré en général comme une forme de participation politique, même si certaines grèves sont plus politiques que d’autres, surtout lorsqu’elles se transforment en protestation contre une politique en particulier ou contre des conditions de travail dans la société (voir aussi Relations de travail).

Activités faciles et difficiles

La participation dépend de la facilité ou de la difficulté de l’action. Durant les campagnes électorales au Canada, environ une personne sur cinq essaie de persuader un ami de voter pour un parti ou une personne en particulier, selon des sondages de l’Étude sur l’élection canadienne. Mais seulement environ une personne sur six participe à un rassemblement ou à une réunion, ou encore place une affiche sur son terrain ou pose un autocollant sur sa voiture. Environ un seul Canadien sur 20 fait du porte-à-porte, aide à afficher de la publicité électorale, fait des appels téléphoniques liés à la campagne ou agit comme conducteur ou scrutateur pour les partis politiques le jour des élections. Un pourcentage similaire de personnes affirme avoir fait un don à un parti politique ou à un candidat, ou être membre d’un parti. Moins nombreux encore sont ceux qui se présentent aux élections comme candidats.

Coûts et bénéfices

Le coût de la participation politique constitue un facteur important. Certaines actions politiques entraînent des dépenses et les gens à l’aise financièrement sont plus susceptibles de s’engager. D’autres actions exigent d’avoir du temps libre. De nombreuses actions politiques requièrent des compétences sociales et bureaucratiques, une bonne maîtrise de la langue et une habileté à traiter de l’information ; elles sont donc fortement influencées par le niveau d’éducation. Toutefois, une éducation supérieure ne se traduit pas toujours par une plus grande participation. Quel que soit leur niveau d’éducation, les citoyens plus âgés sont plus actifs en politique que les plus jeunes. Les compétences développées grâce à des activités non politiques (par exemple dans la bureaucratie, dans du travail pour les églises ou au sein d’associations bénévoles) se révèlent souvent utiles sur le plan de la participation politique.

Les femmes n’ont obtenu le droit de vote aux élections fédérales qu’en 1918. Elles étaient donc traditionnellement moins actives en politique que les hommes (voir aussi Droit de vote au Canada). Cependant, le taux de participation des femmes aux scrutins est aujourd’hui un peu plus élevé que celle des hommes. Des études démographiques suggèrent que cette tendance s’étendra à d’autres champs d’activités politiques.

Les bénéfices que l’on peut tirer de l’action politique influencent aussi la participation. La population est plus susceptible de voter et de participer aux activités des campagnes électorales lorsque la lutte est serrée que lorsqu’un parti détient une avance considérable. Certains groupes professionnels sont davantage touchés par les décisions gouvernementales que d’autres, ils sont donc plus sujets à s’engager politiquement. Les employés de la fonction publique, dont les revenus sont liés à des décisions politiques, ont un taux de vote plus élevé que celui de la population générale. Les revenus des agriculteurs sont affectés par les décisions du gouvernement en matière de gestion des prix et de l’offre, ils sont donc plus actifs que d’autres groupes dont les revenus et la scolarité sont comparables.

Certaines actions politiques procurent des avantages sociaux aux citoyens. La sollicitation et le travail en salle de comité sont populaires parmi les participants qui aiment la compagnie des autres. Les dons en argent ne requièrent que peu de compétences sociales. L’affichage d’une pancarte sur sa pelouse ou la pose d’autocollants sur sa voiture ne requiert ni argent ni grandes habiletés sociales, mais cela exige un engagement envers un parti ou un candidat. Les sondages suggèrent que les gens sont plus susceptibles de s’engager dans une même action politique à la fois aux élections provinciales et fédérales, plutôt que dans plusieurs actions dans l’un ou l’autre type d’élection.

Taux de participation électorale

La fréquence de participation à laquelle les gens prennent part à des activités politiques dépend du type d’activité et de l’endroit où ils vivent au Canada. Selon les sondages de l’Étude sur l’élection canadienne, environ 90% des Canadiens ayant le droit de vote ont voté au moins une fois.

Les résidents de l’Île-du-Prince-Édouard tendent à voter davantage que ceux du reste du pays, tant aux élections provinciales que fédérales; le taux de vote a atteint un sommet avec 86 % lors des élections fédérales de 2015, et 82 % en 2019. À l’opposé, l’Alberta est la province qui présente en général les plus faibles taux de participation (52 % en 2011). Les taux de participation sont encore plus faibles dans les territoires (39 % au Nunavut en 2011).

Taux de participation

Les taux de participation aux élections fédérales et provinciales diminuent de façon abrupte dans les années 1990 et au début des années 2000. Ceci suscite des préoccupations quant à leur impact sur la démocratie canadienne. Depuis la Deuxième Guerre mondiale, le plus haut taux de participation au fédéral est enregistré lors des élections de 1958 ; 79,4 % des électeurs admissibles votent (voir Élections de 1957 et 1958). Le taux oscille ensuite autour de 70 % jusqu’en 1997, lorsqu’il tombe à 67 %. Il tombe à 64,1 % en 2000 et à 60,9 % en 2004, selon Élections Canada. Le taux de participation remonte à 64, 7% lors des élections de 2006, mais chute à 58,8 % en 2008, soit son niveau le plus bas depuis la fin de la guerre.

Le taux de participation varie selon les groupes d’âge, et il est pire chez les jeunes électeurs, un fossé qui se creuse depuis les années 1990. Seulement 5 5% des Canadiens âgés de 18 à 24 votent en 2011, comparativement à 84 % chez ceux âgés de 65 à 74 ans. Selon Statistique Canada, le taux de participation est également plus faible chez les chefs de familles monoparentales et chez les nouveaux immigrants (qui ont obtenu la citoyenneté canadienne).

Le taux de participation aux élections provinciales suit une tendance semblable aux élections nationales. Par exemple, le taux de participation en Colombie-Britannique est de 77,7 % en 1983 et de 51 % en 2009. Au Québec, il est de 85,3 % en 1976 et de 57,4 % en 2008. Enfin, il est de 78,2 % en 1978 et de 58 % en 2009 en Nouvelle-Écosse.

Cependant, les taux de participation aux élections fédérales commencent à augmenter dans les années 2010. En 2011, le taux de participation est de 61,1 %, de 68,3 % en 2015, et de 67 % en 2019. Étonnamment, les gains les plus importants en 2019 sont enregistrés parmi les jeunes électeurs. Selon Statistique Canada, le taux de vote chez les personnes âgées de 18 à 24 ans passent de 55 % en 2011 à 68 % en 2019. Chez les personnes âgées de 25 à 34 ans, le taux passe de 59 % à 74 %. Au cours de cette même période, les gains les plus importants parmi les provinces sont réalisés en Alberta et Saskatchewan, où le taux de participation passe de 66 % à 80 %, et 69 % à 81 % respectivement.

Certains observateurs soutiennent que les taux de participation actuels sont suffisants. La majorité des Canadiens qui ne votent pas ne s’intéresse pas à la politique ou ne connaît que très peu sur le sujet, et souvent ils ont une faible compréhension des valeurs démocratiques. D’autres affirment que le droit de vote est précieux et que tous devraient être encouragés à voter, peu importe le niveau de conscience politique de l’électeur. Certains avancent que la participation est la meilleure école de valeurs démocratiques, et que ceux qui ne participent pas se sentent exclus ou aliénés de la vie politique. Dans certains pays, comme l’Australie, l’Argentine, la Belgique et la Grèce, le vote est obligatoire pour la plupart des citoyens.

L’une des conséquences du déclin du taux de participation est que les partis politiques ont besoin du soutien d’une plus petite proportion de la population pour remporter l’élection. Par exemple, lors des élections fédérales de 2011, le Parti conservateur remporte un gouvernement majoritaire (plus de la moitié des sièges à la Chambre des communes) avec moins de 40 % (5,8 millions de votes) du total des votes exprimés (14,8 millions). Cependant, plus de 9 millions de Canadiens se sont abstenus de voter. Lorsqu’on considère que le pays compte 24,3 millions d’électeurs admissibles, la majorité gagnante a été atteinte grâce au soutien de moins de 25 % des électeurs admissibles. Ce phénomène est parfaitement constitutionnel, mais il soulève des questions sur la légitimité de la démocratie du Canada et celle des gouvernements qui sont élus.

Participation électorale aux élections fédérales et aux référendums

Date des élections/
référendum

Population

Nombres des
électeurs sur leslistes

Total des bulletins de vote déposés

Taux de participation (%)

7 August -20 September 1867

3 230 000

361 028

268 387

73.1

20 July - 12 October 1872

3 689 000

426 974

318 329

70.3

22 January 1874

3 689 000

432 410

324 006

69.6

17 September 1878

3 689 000

715 279

534 029

69.1

20 June 1882

4 325 000

663 873

508 496

70.3

22 February 1887

4 325 000

948 222

724 517

70.1

5 March1891

4 833 000

1 113 140

778 495

64 4

23 June 1896

4 833 000

1 358 328

912 992

62.9

29 September 1898 (ref.)

4 833 000

1 236 419

551 405

44.6

7 November 1900

4 833 000

1 167 402

958 497

77.4

3 November 1904

5 371 000

1 385 440

1 036 878

71.6

26 October 1908

5 371 000

1 463 591

1 180 820

70.3

21 September 1911

7 204 527

1 820 742

1 314 953

70.2

17 December 1917

7 591 971

2 093 799

1 892 741

75.0

6 December 1921

8 760 211

4 435 310

3 139 306

67.7

29 October 1925

8 776 352

4 608 636

3 168 412

66.4

14 September 1926

8 887 952

4 665 381

3 273 062

67.7

28 July 1930

8 887 952

5 153 971

3 922 481

73.5

14 October 1935

10 367 063

5 918 207

4 452 675

74.2

26 March1940

10 429 169

6 588 888

4 672 531

69 9

27 April 1942 (ref.)

11 494 627

6 502 234

4 638 847

71.3

11 June 1945

11 494 627

6 952 445

5 305 193

75.3

27 June 1949

11 823 649

7 893 629

5 903 572

73.8

10 August1953

14 003 704

8 401 691

5 701 963

67 5

10 June 1957

16 073 970

8 902 125

6 680 690

74.1

31 March1958

16 073 970

9 131 200

7 357 139

79.4

18 June 1962

18 238 247

9 700 325

7 772 656

79.0

8 April 1963

18 238 247

9 910 757

7 958 636

79.2

8 November 1965

18 238 247

10 274 904

7 796 728

74.8

25 June 1968

20 014 880

10 860 888

8 217 916

75.7

30 October 1972

21 568 311

13 000 778

9 974 661

76.7

8 July 1974

21 568 311

13 620 353

9 671 002

71.0

22 May 1979

22 992 604

15 233 653

11 541 000

75.7

18 February 1980

22 992 604

15 890 416

11 015 514

69.3

4 September 1984

24 343 181

16 774 941

12 638 424

75.3

21 November 1988

25 309 331

17 639 001

13 281 191

75.3

26 October 1992 (ref.)

20 400 896

13 725 966

9 855 978

71.8

25 October 1993

27 296 859

19 906 796

13 863 135

69.6

2 June 1997

27 296 859

19 663 478

13 174 698

67.0

27 November 2000

28 846 761

21 243 473

12 997 185

61.2

28 June 2004

30 007 094

22 466 621

13 683 570

60.9

23 January 2006

30 007 094

23 054 615

14 908 703

64.7

14 October 2008

31 612 897

23 677 639

13 929 093

58.8

2 May2011

33 476 688

24 257 592

14 823 408

61 1

19 October 2015

33 476 688

25 939 742

17 711 983

68.3

21 October 2019

35 151 728

27 373 058

18 350 359

67.0


Comment encourager la participation électorale

Les efforts en vue d’accroître la participation devraient porter sur l’augmentation des bénéfices de l’action politique, la réduction des coûts de cette dernière, ou sur l’augmentation du contact personnel entre les partis et les électeurs. En ce qui a trait aux bénéfices, le sentiment que les votes individuels ne comptent que très peu dans les circonscriptions où un parti domine de façon nette pourrait être évité en adoptant un système électoral de représentation proportionnelle. Dans ce système, les partis se voient attribuer des sièges au Parlement selon le pourcentage total des votes. La représentation proportionnelle, ou une combinaison de celle-ci et du système actuel uninominal majoritaire à un tour pourrait stimuler le taux de participation des électeurs (voir aussi Réforme électorale).

Du côté des coûts, l’accès facile au vote par anticipation et aux bulletins de vote spéciaux pourrait augmenter le taux de participation. Mais les preuves à cet effet ne sont pas suffisantes. La tenue des élections lors des fins de semaine aurait sans doute un effet positif sur le taux de participation. La hausse des crédits d’impôt offerts à ceux qui versent des contributions aux partis ou aux candidats pourrait également stimuler la participation politique, et peut-être même le taux de participation.

Les sondages démontrent que les citoyens sont plus susceptibles de voter si on leur demande de le faire, en particulier si on les rencontre en personne et surtout si on leur offre de les conduire au bureau de vote ou leur rappelle où se trouve celui-ci.

Rôle des partis politiques

Les partis politiques sont les agents principaux pouvant encourager et faciliter la participation politique. Selon les données recueillies dans les sondages, il y a davantage de citoyens prêts à travailler pour les campagnes électorales que de citoyens à qui on demande de le faire. Les partis politiques ont remplacé le travail des bénévoles par des investissements en publicité télévisée, en diffusion en ligne et en messagerie numérique. Ceci a contribué au déclin du taux de participation. Le regain d’intérêt pour les stratégies visant à faire sortir le vote, qui comprennent des mesures allant des appels téléphoniques aux partisans connus du parti au transport des électeurs aux bureaux de vote, pourrait être bénéfique. Cependant, il risque également de mettre davantage l’accent sur les bases électorales.

Voir aussi : Sytème de partis; Systèmes électoraux canadiens; Directeur général des élections; Financement des partis politiques au Canada; Campagne électorale; Comportement électoral.

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