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Ella Cora Hind

Ella Cora Hind, journaliste, experte agricole, militante et suffragette (née le 18 septembre 1861 à Toronto, en Ontario ; décédée le 6 octobre 1942 à Winnipeg, au Manitoba). Véritable pionnière tout au long de sa vie, Ella Cora Hind a été une experte reconnue en matière de céréales, une championne des droits des femmes et une militante pour le droit de vote.

E. Cora Hind, chroniqueuse
L'une des premières suffragettes, à 75 ans, Hind voyage dans le monde entier pour observer les techniques agricoles.

Premières années

Ella Cora Hind naît à Toronto de l’union entre Edwin Hind et Jane Carroll. À la mort de leur mère, Cora Hind, deux ans, et ses deux frères emménagent avec des parents dans une ferme du comté de Grey, en Ontario, au nord-ouest de Toronto. Lorsque leur père meurt trois ans plus tard, leur grand-père, Joseph Hind, et leur tante, Alice, leur offrent un foyer chaleureux.

Cora Hind aide son grand-père à la ferme, où elle apprend à s’occuper du bétail, à semer le blé et à juger quand les cultures sont prêtes à être récoltées. Elle reçoit d’abord une éducation à domicile, mais commence à suivre des cours à 11 ans, lorsqu’une école est construite à proximité.

À l’école secondaire, Cora Hind envisage une carrière dans l’enseignement et passe l’examen. Cependant, après avoir échoué à la section d’algèbre, elle décide de se tourner vers le journalisme.

Déménagement à Winnipeg

Avec sa tante, Ella Cora Hind monte à bord d’un train pour le Manitoba en 1882, voyageant vers l’ouest pour y trouver de meilleures occasions de carrière. Munie d’une lettre d’introduction d’un oncle, Cora Hind entre avec confiance dans les bureaux du Manitoba Free Press à Winnipeg. Le rédacteur en chef William Fisher Luxton l’accueille chaleureusement, mais est étonné qu’elle réclame un emploi de journaliste.

William Luxton lui refuse le poste : le personnel ne compte aucune femme et il n’a pas l’intention de changer cette politique. Le travail, lui dit-il, est « dur, souvent ardu, avec des heures tardives, et implique parfois de rencontrer des gens pas très sympathiques ». Cora Hind part donc déçue.

Cela étant dit, elle ne s’avoue pas encore vaincue. Elle a en effet entendu parler d’une machine de bureau toute neuve, la machine à écrire, et en loue immédiatement une. Elle s’initie à la frappe à un seul doigt et, après un mois d’entraînement intensif, rend la machine et repart avec une perspective d’emploi.

Peu de temps après, Cora Hind obtient un emploi chez un avocat nommé Hugh John Macdonald (futur premier ministre du Manitoba et fils du premier ministre Sir John A. Macdonald). C’est le cabinet d’avocats de Macdonald qui achète la première machine à écrire à Winnipeg. Cora Hind, seule dactylographe à l’ouest des Grands Lacs, est engagée sur-le-champ avec un salaire de six dollars par semaine.

Rédactrice agricole

En 1893, Ella Cora Hind crée le premier bureau public de sténographie de l’Ouest canadien. À la même époque, elle suit de près l’évolution de l’agriculture dans les Prairies. Elle compte parmi ses clients des agriculteurs, des éleveurs bovins aux céréaliers, ainsi que des courtiers. Ces hommes aiment travailler avec Cora Hind, qui possède une compréhension approfondie de l’agriculture grâce à son éducation. Cora Hind envoie souvent aux journaux des articles sur l’agriculture sous son nom de plume préféré, E. Cora Hind. Rapidement, on la reconnaît comme une experte en céréales.

En 1901, le rédacteur en chef du Manitoba Free Press, John W. Dafoe, propose à Cora Hind un poste de rédacteur agricole. À force de parcourir les champs pour examiner les récoltes, elle se forge une réputation internationale de journaliste agricole et est même surnommée « l’oracle du blé » pour ses prévisions précises sur le rendement des récoltes. Elle est également réputée pour ses habits de travail non traditionnels, composés de culottes d’équitation, de bottes en cuir et d’un chapeau Stetson. Plus tard, Cora Hind est amenée à voyager à travers le Canada et même au-delà de ses frontières pour effectuer ses inspections agricoles. Rien qu’en 1924, elle parcourt plus de 10 000 kilomètres pour inspecter les récoltes.

Cora Hind est membre fondatrice de la branche winnipegoise du Canadian Women’s Press Club. À l’époque, les femmes journalistes ne sont pas autorisées à devenir membres du Canadian Press Club. Cora Hind utilise donc son statut pour défendre les femmes dans le monde du journalisme et dans la communauté.

Tempérance et droit de vote

Peu après son arrivée à Winnipeg en 1882, Cora Hind s’engage dans les mouvements de tempérance. Dans le cadre de son emploi de dactylographe pour l’avocat Hugh John Macdonald, elle rencontre toutes sortes de personnes et de situations, qui pointent vers un besoin criant de réforme sociale. En effet, les conditions de vie sont insupportables à Winnipeg, et l’alcoolisme, la criminalité et la violence conjugale et infantile y sont monnaie courante.

Cora Hind et sa tante rejoignent donc la Women’s Christian Temperance Union (WCTU) à Winnipeg pour faire pression en faveur de la prohibition. En 1894, elle devient membre fondatrice de la Manitoba Equal Franchise Association avec l’éminente suffragette Dre Amelia Yeomans, qui en devient la première présidente. Cora Hind, quant à elle, compose et tape des discours enflammés en faveur du droit de vote pour les femmes.

En 1912, Cora Hind cofonde la Political Equality League (PEL) avec ses amies suffragettes Nellie McClung et Lillian Beynon Thomas. Luttant pour les droits de toutes les femmes, les principaux membres de la PEL sont des professionnelles, telles que des journalistes et des médecins.

À force d’éducation, de discours et de satire, la PEL attire l’attention du public en organisant un « simulacre de parlement » en janvier 1914. Cora Hind fait partie de la distribution de la pièce, aux côtés de Nellie McClung et LillianThomas.

Patrimoine

Le travail de Cora Hind et d’autres suffragettes déclenche un changement historique au Canada. En 1916, le Manitoba est la première province à accorder aux femmes le droit de vote et le droit d’exercer un poste de fonction publique (voir Vote des femmes au Manitoba). En 1935, l’Université du Manitoba décerne à Cora Hind un doctorat honorifique en droit. Sept ans plus tard, E. Cora Hind décède à l’âge de 81 ans. En 1997, une plaque commémorative est érigée à Winnipeg, donnant à la journaliste et suffragette le titre de personne historique nationale.