Hindouisme
L'hindouisme est une religion pratiquée par environ un milliard de personnes en Inde, en Afrique, en Indonésie et dans les Antilles. L'immigration en provenance de ces pays, et surtout de l'Inde, a permis de former le noyau de sa population, qui compte environ 300 000 adeptes au Canada, selon les plus récentes données (recensement de 2001). L'hindouisme compte environ 4 000 ans d'existence connue. Cette religion a atteint un haut degré de développement philosophique, religieux et psychologique vers 1500 av. J.-C. et l'a maintenu jusqu'à nos jours.
Religion dominante de l'Inde
L'hindouisme a conservé sa suprématie en Inde malgré de nombreuses vagues d'immigration et les tentatives de conversion d'autres religions, notamment le BOUDDHISME, l'ISLAM et le CHRISTIANISME. Grâce à la vitalité de la culture et de la religion hindoues, l'hindouisme est devenu le fondement des religions pratiquées par plus de la moitié de la population mondiale. Les peuples chinois, japonais, tibétains, birmans (du Myanmar), thaïlandais et ceylanais (sri lankais) considèrent tous l'Inde comme leur patrie spirituelle ancestrale.
Unicité du monde hindou
Pour les hindous, Dieu est l'esprit universel suprême et unique qui anime toute vie humaine, animale et matérielle, et vers lequel tendent tous les sentiments religieux et toutes les théologies. La manière dont chaque religion et chaque croyant conçoit Dieu représente, à leur avis, un aspect véritable de Dieu. Toutefois, l'unicité de la vision hindouiste du monde distingue quatre concepts centraux : l'anadi, l'absence d'un commencement; le karma, la loi morale de la vie; le samsâra, la renaissance; le moksha, la liberté ou la libération. Cette vision fondamentale du monde selon l'hindouisme postule un cycle de naissance, de mort et de renaissance, qui conduit le croyant au désir d'être libéré de ce cercle interminable de « souffrance », parce que vivre en ce monde signifie la souffrance d'être séparé du divin.
Cycles de création
Le concept de création de l'univers est absent de la pensée hindoue, selon laquelle toutes choses ont existé sans commencement, y compris l'univers, Dieu, les Écritures et l'humanité. Néanmoins, cette perception comporte en soi l'idée de cycles de création qui produisent des débuts relatifs. Chaque cycle s'amorce à partir d'un état préexistant contenu en germe, grandit, fleurit, se fane et meurt, mais, tout comme la fleur qui meurt, il laisse des graines pour sa reproduction. Chaque cycle laisse ainsi un germe qui est à l'origine du cycle suivant.
Destinée
Selon la croyance hindoue, l'univers que nous connaissons aujourd'hui est un tel cycle de création relative. Le concept du karma illustre bien la portée de cette vision. Le karma signifie que chaque personne est responsable de sa propre destinée. De bonnes actions et de bonnes pensées donnent lieu de croire en la probabilité d'un avenir heureux, même dans le prochain cycle de création. Selon cette doctrine, chaque action et chaque pensée laissent une trace dans la mémoire ou un germe dans l'inconscient, prédisposant ainsi la personne à agir ou à penser de la même façon dans l'avenir. La vie de chaque personne est une suite de renaissances (réincarnation) en fonction de son karma.
Doctrine de la réincarnation
Beaucoup de pensées et de désirs que nous découvrons en analysant nos impulsions inconscientes découlent des pensées et des actions de nos vies antérieures. Les expériences de notre vie présente sont dans une certaine mesure la conséquence des actions bonnes et mauvaises et des pensées survenues dans les vies antérieures. Socialement, la doctrine de la réincarnation s'exprime par le système des castes qui comporte quatre échelons auxquels la personne renaît, selon ses mérites karmiques : brâhmana (prêtre ou docteur), kshatriya (guerrier ou politicien), vaiçya (marchand ou professionnel) et shûdra (serviteur ou ouvrier). Longtemps après la formation de ces castes, certains shûdras ont été appelés intouchables ou « sans caste ».
Comment atteindre le niveau des dieux
Le poids du karma présent dans l'inconscient au moment de la mort détermine l'état ou l'échelon auquel renaîtra une personne. Par un nombre infini de vies, on peut se hisser pour atteindre enfin l'échelon des dieux. La personne y reçoit l'honneur de tenir la place d'une divinité, exerçant sa fonction cosmique jusqu'à ce que les mérites de sa bonté soient épuisés. Si quelqu'un, pour avoir mené une mauvaise vie, se réincarne en animal, il suivra simplement ses instincts et connaîtra la souffrance qu'ils engendrent. Tel est le cycle de la renaissance, le samsâra. Le moyen de sortir de ce cycle est une question primordiale pour les hindouistes et les bouddhistes. La réponse hindouiste est le moksha.
Le moksha
Il s'agit de la libération du sempiternel cercle de naissance-mort-renaissance. Les trois voies vers la libération sont le yoga de la connaissance, le yoga de l'action et le yoga de la dévotion. Le premier comporte des techniques intellectuelles et psychologiques élaborées par des sages hindous afin de contrôler leurs actions et d'analyser leur inconscient. Ces techniques éliminent les barrières du karma de leurs vies précédentes pour permettre de retrouver la nature du vrai moi, qui s'avère n'être rien d'autre que le Brahman ou Dieu. Le but de toute connaissance est donc l'expérience de l'union avec le divin.
Le yoga de l'action exige qu'on accomplisse son devoir sans aucune pensée pour soi-même ni pour les avantages ou les souffrances que peut apporter son accomplissement. En faisant de l'accomplissement de son devoir une offrande au Créateur, on obtient une purification intérieure qui procure l'union avec le divin. Le yoga de la dévotion, la voie la plus couramment suivie, demande que les prières, la psalmodie des Écritures et la méditation sur l'image du Créateur atteignent une intensité telle, que les barrières internes du karma se consument et que le Créateur se révèle à la conscience. L'unique condition est de consentir à s'abandonner totalement à la dévotion envers Dieu. Peu importe la voie choisie, le but reste le même : la découverte en soi de la vraie nature de l'âme spirituelle (âtman), laquelle ne fait qu'un avec Dieu.
Hindouisme au Canada
L'immigration de gens venus de l'Inde ou d'origine indienne au Canada commence en 1903-1904 (voir ASIATIQUES DU SUD). Le recensement de 1911 considère d'un bloc les sikhs et les hindous, au nombre de 1758. La majeure partie des communautés hindoues installées au Canada au cours de la première moitié du XXe siècle professent la religion sikhe (voir SIKHISME), et l'immigration massive d'hindous ne débute que dans les années 60. Lors du recensement de 2001, 297 200 personnes se déclarent hindous. Les premiers hindous arrivent du Pânjâb en même temps que les premières vagues d'immigrants sikhs. La vague d'immigration suivante est de langue hindi et vient de l'Uttar Pradesh et des régions avoisinantes du Nord de l'Inde. Il s'agit surtout de gens de classe moyenne venus en même temps que de nombreux professionnels de l'Asie du Sud arrivés au Canada au cours des années 60. Des hindous tamouls et bengalis commencent à arriver vers la même époque. Au cours des années 70, beaucoup d'hindous arrivent d'anciennes colonies britanniques (pays du Sud et de l'Est de l'Afrique, îles Fidji, île Maurice, Guyane et Trinité) qui accèdent à l'indépendance et prennent des mesures discriminatoires contre les Asiatiques du Sud. Ils s'établissent surtout dans les grandes villes. Au Canada, comme ailleurs dans la diaspora hindoue, les structures de la vie religieuse ont subi de profonds changements.
La vie de castes se conforme généralement à celle de l'Inde (on marie surtout des membres de sa propre caste), mais cette pratique est tempérée par la mentalité égalitaire de la société canadienne.
Temples
Les rôles traditionnels du temple, de l'autel familial, du festival de village et du PÈLERINAGE aux lieux sacrés ont en grande partie cédé le pas à des temples qui fonctionnent à peu près comme les églises locales chez les chrétiens. D'Halifax à Vancouver, des temples ont été construits dans les grandes villes canadiennes. Un service religieux régulier se tient le dimanche. Les célébrations suivent souvent le calendrier sacré hindou en commémorant les saints et en observant les fêtes saisonnières ou religieuses, mais les célébrations ont lieu le dimanche, car il est plus difficile de se réunir pendant la semaine ouvrable.
Là où la communauté indienne est assez importante, plusieurs temples répondent aux besoins respectifs des diverses cultures et ethnies. L'un des plus anciens temples de Toronto (fondé en 1976) dessert surtout la communauté hindoue des Antilles, tandis que les Indiens d'Afrique et de l'Inde en fréquentent d'autres. L'Ontario compte maintenant plus de 50 temples hindous, surtout dans la région de Toronto. Le plus ancien temple de la ville, le Prârthanâ-Samâj, a été fondé en 1967 à la suite de l'achat d'une église désaffectée. En 1981, les immigrants de Guyane et de Trinité ont acheté un édifice qui est devenu leur temple, le Vishnu Mandir, situé sur la rue Yonge. Un nouveau temple a été construit en 1984 et un autre, en 1990. De 600 à 700 personnes viennent au service dominical qui y est célébré en sanskrit, en hindi et en anglais. Ce temple renferme diverses images et son maître-autel porte des statues des dieux Durgâ, Hanumân, Ganesha et Râma. Des discussions sont en cours pour pouvoir y ajouter le Bouddha et le dieu des jaïns, Mahâvîra le Jina. Ce temple très populaire se distingue par son éclectisme.
Par contre, les immigrants tamouls du Sud de l'Inde, de l'Afrique du Sud, de Singapour et de la Malaisie ont adopté une pratique très différente : ils insistent sur la pureté du bâtiment et des rites qui s'y déroulent en observant strictement les pratiques traditionnelles du Sud de l'Inde. Au lieu de s'adapter au style des assemblées canadiennes, comme l'a fait le Vishnu Mandir, le temple Tamil Ganesha pratique le culte des dieux individuels comme Ganesha, Çiva, Durgâ, Murugan ou de tout autre dieu à un autel distinct où chacun peut l'adorer avec ou sans l'intervention d'un prêtre. Ainsi, plusieurs fidèles et plusieurs prêtres peuvent s'adonner en même temps à diverses pratiques du culte consacrées à plusieurs dieux, ce qui produit le genre de cacophonie caractéristique des temples du Sud de l'Inde. Contrairement au temple Vishnu Mandir, le temple Ganesha ne considère pas le dimanche comme un jour spécial, mais les jours de fête y sont célébrés spécialement et peuvent attirer de 10 000 à 15 000 personnes.
Avec son important bassin de près de 200 000 Hindous en date de 2001, la région de Toronto illustre à plus grande échelle les tendances qui se manifestent de façon plus ou moins marquée dans d'autres villes canadiennes. Si des communautés comptant un petit nombre d'hindous peuvent se satisfaire d'un temple à usages multiples, où l'on pratique un culte public dont le style s'apparente à celui des protestants canadiens, lorsque la population hindoue s'accroît, des différences ethniques et confessionnelles semblent se manifester pour engendrer des divisions fondées sur ces caractères si le nombre d'adeptes le justifie.
Traditions et culte
Ailleurs qu'à Toronto ou à Vancouver, dans les villes où l'on ne trouve qu'un temple, celui-ci se rattache souvent soit au courant Ârya-samâj, soit au courant de Sanâtana. Les deux utilisent les Védas, Écritures hindoues anciennes, comme fondement de leurs rites. Le culte de l'Ârya-samâj comprend le rituel des agnihotras, qui comprend une série de purifications, la psalmodie des mantras (incantations) et des Écritures, et des offrandes à Agni, le dieu du feu qui porte les sacrifices à Dieu.
Bien que l'art hindou soit reconnu pour ses magnifiques représentations des dieux, les groupes de l'Ârya-samâj n'utilisent aucune image des divinités hindoues dans la pratique de leur culte. Le culte de Sanâtana s'organise autour d'un ensemble analogue de purifications, de psalmodies et d'offrandes, mais on procède à de longues oblations aux divinités en recourant à leurs images. Les dieux les plus souvent invoqués sont Ganesha, Vishnu, Shiva, Sûrya-Nârâyan et Deva.
Les services durent plusieurs heures et requièrent un prêtre érudit qui connaît bien les complexités du rituel. Le culte de l'Ârya-samâj et le culte de Sanâtana se pratiquent de façon à refléter le contexte canadien et la diversité des croyances parmi les hindous du pays.
La plupart des temples du Canada sont dirigés par des conseils d'administration suivant les lignes de la pratique confessionnelle particulière et ont à leur service un ou deux célébrants non initiés. Un temple du culte de Sanâtana de Toronto et un temple Sâmaj de Vancouver comptent les services de prêtres formés et initiés, les pândits, comme ministres du culte. Un certain nombre de programmes linguistiques sont parrainés par des temples dans tout le Canada. Dans certaines communautés, les enfants peuvent acquérir une connaissance élémentaire du sanskrit, la langue ancienne des Écritures hindoues et des rituels, et de langues comme l'hindi, le panjabi, le gujarâtî et le tamoul, utilisées pour raconter des mythes et des légendes ou chanter des hymnes.
La pratique traditionnelle exige une série de 12 rites initiatiques (samskâras), ou cérémonies religieuses personnelles. Ce cycle s'est radicalement modifié dans le contexte canadien, même si la plupart des hindous canadiens se marient et sont incinérés selon la tradition. Certains d'entre eux pratiquent des rites associés à la conception, à la naissance, à la première coupe de cheveux et à l'initiation qui fait des garçons des membres à part entière de la caste (cérémonie de l'upanayana ou du « fil sacré »).
Les communautés de la diaspora hindoue reçoivent régulièrement la visite de gourous et de swâmîs (moines). Ceux-ci peuvent être officiellement associés à un établissement ou à un mouvement nord-américain, comme la mission Râmakrishna, ou dépendre des divers ashrams (communautés religieuses) de l'Inde. La mission Srî Râmakrishna charge ses swâmîs de visiter régulièrement les sociétés des Vedânta du Canada. Bien que la pratique de l'hindouisme soit limitée au Canada en raison du manque de prêtres et de lieux sacrés ainsi que du contexte culturel très différent, de nombreux hindous demeurent en contact avec leurs gourous qui guident leur vie religieuse personnelle. La religion compte 62 temples, répartis entre la Nouvelle-Écosse et Vancouver.