Instituts d'artisans
Mechanics' Institutes EstD'abord établis en Angleterre durant les années 1820, les instituts d'artisans (mechanics' institutes) sont au début des associations volontaires de travailleurs désireux de se perfectionner par l'instruction. Les instituts communautaires offrent des cours du soir et fournissent des bibliothèques de prêt et des salles de lecture de périodiques. On veut que les membres apprennent à connaître les principes scientifiques de leur travail de même que la valeur générale de l'information rationnelle. Ce concept se répand rapidement ailleurs, notamment en Amérique du Nord britannique où on assiste à l'ouverture du Montreal Mechanics' Institute en 1828 et au York Mechanics' Institute en 1830. D'autres établissements voient le jour, surtout en Ontario, mais aussi en Nouvelle-Écosse et en Colombie-Britannique. En 1895, l'Ontario compte 311 instituts et 31 195 membres. Toutefois, des tiraillements internes, conjugués à l'essor du mouvement ouvrier, des bibliothèques publiques et de l'ENSEIGNEMENT AUX ADULTES, empêchent les instituts de conserver une identité viable pour entrer dans le XXe siècle.
Contrairement à ce que l'appellation des établissements peut donner à entendre, les principaux acteurs du développement de ces instituts d'artisans au Canada sont rarement des travailleurs manuels. Les instituts sont plutôt dirigés par des commerçants, des médecins, des membres du clergé et de petits manufacturiers à la recherche d'activités pour eux-mêmes, et, aspect plus important encore, pour le nombre croissant de salariés des milieux urbains. Les instituts privilégient la discipline et la moralité victoriennes, mais refusent d'aborder les questions sociales, économiques et politiques. Le fait que les salles de lecture et les bibliothèques sont plutôt fréquentées pour leurs journaux et romans populaires que pour leurs ouvrages sur la science, l'art et la religion comme le souhaitent les directeurs des instituts, suscite beaucoup de débats. En Ontario, ces débats s'étendent à l'ensemble de la collectivité lorsque, en 1895, le gouvernement provincial adopte une loi pour transformer les instituts en bibliothèques publiques. Les instituts d'artisans sont donc le reflet de caractéristiques importantes du Canada du XIXe siècle, à savoir le souci constant des dirigeants locaux d'assurer l'ordre social et la stabilité, la volonté générale de s'autoperfectionner par l'instruction et l'engouement populaire grandissant pour la lecture.