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Joe Trouillot

Joseph François André (surnom Joe Trouillot), chanteur, compositeur et musicien d’origine haïtienne de renommée internationale (né le 22 mars 1922 à Port-au-Prince, Haïti; mort le 29 octobre 2015 à Montréal, au Québec). Débutant très jeune dans la musique, Joe Trouillot se produit dans plusieurs pays à travers le monde. Il meurt à Montréal en 2015, au terme d’une brillante carrière de musicien.

Enfance

Né le 22 mars 1922, Joseph François André mieux connu sous le nom de Joe Trouillot est le benjamin d’une famille de trois enfants. Son père, d’origine cubaine, est médecin de campagne et sa mère, femme au foyer. Très jeune, il découvre la musique grâce à son grand-père maternel qui joue de l’hélicon, un instrument de musique à vent en cuivre. Le petit Joe grandit donc dans l’ombre de ce grand-père musicien, membre de l’Orchestre symphonique de Port-au-Prince.

À l’âge de huit ans, Joe Trouillot perd sa mère, décédée des suites d’une fausse couche. Cet événement traumatisant l’amène à se réfugier dans la musique. En 1934, alors qu’il n’a que 12 ans, il chante pour la première fois en public à l’église Saint-Gérard de Port-au-Prince. Il interprète la chanson Minuit, Chrétiens. Éblouie par la voix de l’adolescent, Lina Mathon Blanchet, musicienne célèbre, lui offre une bourse de trois ans pour fréquenter l’école de musique qu’elle dirige.

Début de carrière

À l’époque, la carrière de musicien est mal vue dans la société haïtienne. Néanmoins, son père adoptif découvre avec étonnement le talent de chanteur de Joe Trouillot et l’encourage à poursuivre dans cette voie.

À l’âge de 22 ans, Joe Trouillot fonde, avec quelques amis, un orchestre amateur appelé Les Gais Trouvères.

Peu après, la chance lui sourit. Il rencontre le fameux musicien et chef d’orchestre Issa El Saieh qui l’invite à faire partie de son groupe éponyme en tant que chanteur principal, interprétant des chansons en créole et en français sur des rythmes latins et jazz. Pour Joe Trouillot, c’est le véritable début de sa carrière. Dans l’orchestre d’El Saieh, il rencontre des musiciens de talent qui deviendront célèbres tels que Ernest Lamy, Raoul Guillaume, Guy Durosier et Emmanuel Duroseau.

Le public découvre un Joe Trouillot enthousiaste et est séduit par sa voix enchanteresse et voluptueuse. Il devient assez vite l’un des chanteurs les plus en vogue de sa génération.

L’Orchestre Issa El Saieh, dirigé à partir de 1953 par le pianiste Ernest Lamy, joue régulièrement au Casino International de Port-au-Prince. Joe Trouillot y rencontre le propriétaire qui l’engage en 1957, lui et certains membres de l’orchestre, pour faire une tournée en Europe. Pour le jeune chanteur, c’est un rêve devenu réalité. Il visite et chante dans plusieurs boites et casinos à Londres, Monaco, Paris, Barcelone et Milan. C’est en Italie qu’il compose son fameux morceau Oro basso, une de ses pièces les plus célèbres.

Dès son retour en Haïti, Joe Trouillot retourne chanter au Casino International. Le public est au rendez-vous et le réclame. Il en profite pour interpréter ses chansons favorites et faire connaitre ses nouvelles compositions. Peu de temps après, il décroche un nouveau contrat pour se produire, cette fois-ci, aux Antilles, notamment à Nassau, au Bahamas, à Porto Rico, en Martinique, en Guadeloupe et à Sainte-Croix, ainsi qu’au Venezuela.


Carrière en Amérique du Nord

Au cours de l’année 1961, sa carrière de chanteur professionnel connait une tournure importante. Sur l’invitation de Carlo D’Orléan-Juste, propriétaire du Perchoir d’Haïti à Montréal, Joe Trouillot et Ernest Lamy s’établissent dans la grande métropole québécoise et poursuivent leur carrière de musicien. Ouvert en 1957, le Perchoir d’Haïti est un lieu de rencontre pour la communauté haïtienne qui, fuyant la dictature de François Duvalier, s’établit à Montréal. Cette boite de nuit est un important centre culturel où se côtoient poètes, intellectuels, écrivains et musiciens d’origines haïtiennes et québécoises.

La réputation de Joe Trouillot dépasse, bien vite, les frontières du Québec. Plusieurs personnes d’origine haïtienne et américaine viennent de New York pour l’écouter et danser au Perchoir d’Haïti au rythme de l’orchestre dirigé par Ernest Lamy. Dans les mêmes années, Joe Trouillot se produit aussi au Café Copacabana où il est chanteur et contrebassiste au sein du quatuor Cuba Stars.

Les années 1960 sont fructueuses pour Joe Trouillot. On l’invite comme artiste dans plusieurs médias. Il prend part à l’émission Nous les amoureux de Télé-Métropole où il rencontre le chanteur bien connu Michel Louvain et la chanteuse Monique Gaube. Il participe également à l’émission télévisée Sous le ciel des Antilles de Radio-Canada. Il est accompagné par la troupe folklorique du Perchoir d’Haïti, qui effectue pour l’occasion une magnifique prestation. On retrouve Joe Trouillot aussi à Toronto, à l’occasion du Programme de Parade Latine, une émission télévisée diffusée en direct par la CBC.

Au cours des années 1970, Joe Trouillot fait une tournée triomphale à New York. Il se produit au Madison Square Garden et à l’Hôtel Continental. Au cours de la décennie, il fait plusieurs voyages à New York. Il chante dans différents clubs très fréquentés par la communauté haïtienne, ce qui lui permet ainsi de renforcer sa réputation.

À Montréal, Joe Trouillot poursuit avec fougue sa carrière de musicien. On le voit entre autres à la Place des Arts, à l’Hôtel Windsor et à l’Hôtel Queen-Élizabeth. Pendant huit ans, il est chanteur maison et maître de cérémonie au Café Saint-Jacques, un des clubs les plus fréquentés de Montréal. Il est également le chanteur vedette de la populaire salle de danse Do Ré Mi.

Décès

C’est à 91 ans que Joe Trouillot monte sur scène pour la dernière fois, clôturant une carrière de plus de 6 décennies et de près de 300 compositions. Il décède le 29 octobre 2015 à l’âge de 93 ans. Toute sa vie a été consacrée à la musique. Plusieurs membres de la communauté haïtienne sont présents lors de ses funérailles. Dans son cercueil, se trouvait entre ses mains un micro, symbole de sa passion pour la musique.