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Kaska Dena

Les Kaska Dena ou Denek’éh (souvent appelés simplement Kaska) sont un peuple qui parle la langue dénée et qui vit dans le sud du Yukon et dans le nord de la Colombie-Britannique, principalement dans les communautés de Lower Post, Upper Liard (près de Watson Lake), Watson Lake et Ross River dans le bassin versant de Pelly. Lors du recensement de 2021, 980 personnes ont déclaré être d’ascendance Kaska.

Territoire et population

Les Kaskas sont un peuple déné (Athabascan). Les Dénés sont constitués de plusieurs groupes autochtones qui occupent la région subarctique occidentale du Canada, ainsi que les territoires en Alaska et le sud-ouest des États-Unis. Avant l’arrivée des Européens, les Kaskas Dena vivent et chassent dans une région d’environ 240 000 km2 située dans certaines parties des terres du sud des Territoires du Nord-Ouest, du sud-est du Yukon et du nord-ouest de la Colombie-Britannique. En 1964, l’anthropologue J. J. Honingmann identifie cinq groupes kaskas qui occupent historiquement les territoires situés près de ce qui est aujourd’hui Ross River (au Yukon), la ville de Faro (Yukon), Watson Lake (Yukon), Lower Post (en Colombie-Britannique) et Dease Lake (Colombie-Britannique) :

Tu tcogotena (Tu’tcogotena) : connus sous le nom de « habitants des grandes eaux », les Tu tcogotena occupent principalement les territoires de Tucho (lac Frances) et de Tucho Tue (rivière Frances) au Yukon. Le territoire des Tu tcogotena s’étend également jusqu’aux rivières Hyland et Smith.

Espatodena ou (E)spa’totena  : ces peuples Kaska Dena, nommés« ceux qui habitent parmi les chèvres sauvages », occupent principalement la région au nord de Tsa Tue (Beaver River au Yukon) et de la rivière Nahanni Sud (Territoires du Nord-Ouest). Selon le Kaska History and Cultural Research Training Project de 1997, un peuple déné connu sous le nom de Gata otena, « peuple qui chasse le lapin », vit également dans ces régions.

Naatitu a gotena (Natitu’a’gotena)  : connus sous le nom de « habitants de la (haute) montagne pointue où commence une petite rivière », les Naatitu a gotena vivent principalement autour des sources de la rivière Liard au Yukon jusqu’aux régions situées au-dessus de Lower Post, en Colombie-Britannique. À l’ouest de leur territoire se trouvent les monts Cassiar, et à l’est, le chainon Simpson.

Ki stagotena (Ki’stagotena)  : connus sous le nom des « habitants de la montagne », les Ki stagotena occupent traditionnellement les vallées de la rivière Dease et la partie nord de Dease Lake en Colombie-Britannique.

Tse lona (Tse’lona)  : le peuple « du sommet de la montagne » (également connu sous le nom de peuple du « point où se trouve le bout du monde ») vit principalement dans les sources et les vallées des Rocheuses, ainsi que dans les chainons Kechika jusqu’aux régions de Toad River et de Flat River en Colombie-Britannique.

Malgré ces divisions, les Kaskas se considèrent comme une seule nation (et toujours aujourd’hui). Les frontières territoriales respectives sont fluides; les chasseurs kaskas d’un groupe se déplacent vers les ressources d’un autre groupe et les utilisent aussi souvent que nécessaire. Ce n’est qu’avec l’arrivée des Européens que les frontières traditionnelles sont redessinées pour créer des villes et des provinces qui séparent les communautés kaskas (Voir aussi Territoire autochtone).

De nos jours, il existe cinq Premières Nations Kaskas, toutes représentées par l’organisation politique du Conseil des Kaska Dena :

  • Dease River (Good Hope Lake, en Colombie-Britannique)
  • Conseil des Dénés Daylu (Daylu [Lower Post], en Colombie-Britannique)
  • Nation Kwadacha (Fort Ware, au nord de Prince George, en Colombie-Britannique)
  • Première Nation Liard (Watson Lake, au Yukon)
  • Conseil des Déné de Ross River (Ross River, au Yukon)

Lors du recensement de 2021, 980 personnes déclarent être d’ascendance Kaska.

Vie avant le contact avec les Européens

Les Kaskas chassent le caribou, l’orignal et le mouflon de Dall (voir Mouflon) dans tout leur territoire traditionnel. Les baies sauvages et les corégones complètent leur alimentation.

Les Kaskas vivent dans des tentes ou des huttes de terre qui peuvent facilement être démontées puis reconstruites à mesure qu’ils se déplacent d’un territoire de chasse à l’autre. (Voir aussi Histoire de l’architecture des peuples autochtones au Canada.) Ils se déplacent souvent pour la traite et la chasse en canot durant les mois chauds, et en raquette et en toboggan pendant l’hiver.

Organisation sociale

L’unité principale de la société kaska est la bande locale, qui est composée d’une famille élargie et d’un chef masculin. La plupart des Kaskas appartiennent également à l’un de deux groupements (des groupes de parentés ou des clans), soit le Loup et le Corbeau. Ces groupements sont matrilinéaires, ce qui signifie que l’ascendance est retracée par la lignée féminine (par exemple, si une mère appartient au groupe des Loups, ses enfants en sont également membres). De plus, les groupements kaskas sont exogames, ce qui signifie qu’un membre du groupe du Corbeau ne peut pas épouser un autre membre du groupe du Corbeau; cette règle s’applique de même chez les Loups. Malgré ces affiliations claniques, les règles régissant le mariage et les autres coutumes sociales ne sont pas toujours systématiquement respectées. Aujourd’hui, les Premières Nations Kaskas sont régies par la Loi sur les Indiens. Un chef et un conseil élus représentent chaque nation kaska, en plus du chef héréditaire de chacune des nations.

Jeune fille kaska
Jeune fille kaska photographiée à Lower Post, C.-B., 1945
Deux hommes kaskas dena
Deux hommes kaskas dena à Lower Post, C.-B., 1945

Culture

L’art kaska s’inspire de la nature, de l’histoire du peuple et de son héritage. La plupart de l’art des Kaskas est créé avec des matériaux naturels comme des peaux, du bois et des bois de cerfs. Leurs masques de cérémonie ont une importance spirituelle et sont fréquemment utilisés pendant les prières et les rituels.

Le tambour et les percussions occupent également une place importante dans les cultures kaska et dénée. Le battement du tambour représente le battement du cœur de leur nation, et il unit les personnes dans la chanson et la prière. Formé vers la fin des années 1980, Kaska Dena Drummers est un groupe localement reconnu qui interprète des chants traditionnels.

Historiquement, les Kaskas participent également aux potlatchs, des cérémonies culturelles de remise de cadeaux. Le potlatch est banni par la Loi sur les Indiens jusqu’en 1951. Depuis, plusieurs communautés autochtones ont repris cette coutume.


Langue

Le kaska est une langue dénée (athabascane) parlée principalement dans les communautés de Ross River, Watson Lake, Upper Liard, Lower Post, Fireside, Good Hope Lake (voir aussi Fort Good Hope), Dease Lake et Muncho Lake. Leur langue est étroitement apparentée à celle des nations voisines (parlant le déné), notamment les Tahltans, les Tagish et les Sékanis. Les locuteurs de la langue kaska peuvent souvent comprendre ceux qui parlent ces langues voisines, tout comme eux peuvent souvent comprendre le kaska.

Selon Statistique Canada (2021), 115 personnes déclarent le kaska comme leur langue maternelle. De plus, le recensement indique que 225 personnes ont une connaissance de la langue kaska. Étant donné que la plupart des locuteurs de la langue kaska sont des aînés, cette langue est en voie d’extinction. De 1942 jusqu’en 1958, l’anglais supplante le kaska comme langue principale d’enseignement dans les pensionnats indiens, les communautés et les entreprises. Depuis, les Kaskas participent activement aux efforts de revitalisation de leur langue. En 1997, le Conseil tribal kaska (aujourd’hui le Conseil Kaska Dena) travaille de concert avec le linguiste Patrick Moore pour produire un dictionnaire des noms communs intitulé Guzagi K’uge’, une initiative pour préserver la langue. Le Centre des langues autochtones du Yukon offre un soutien à l’apprentissage de la langue, notamment des ateliers, des brochures, du contenu multimédia, et plus. (Voir aussi Langues autochtones au Canada.)

Religion et spiritualité

Les rituels et les croyances des Kaskas sont semblables à ceux d’autres peuples dénés, dont les Dénésulines (Chipewyans) et les Esclaves. Bien que de nombreux Kaskas sont convertis au christianisme par les missionnaires aux 19e et 20e siècles, les Kaskas conservent leur spiritualité autochtone. Le système de croyances des Kaskas est centré sur une figure de Créateur tout-puissant, généralement appelé Denetia, qui signifie « bonne personne ». Les Kaskas croient également en des entités spirituelles qui peuvent apporter le bien ou le mal. Les chamans, connus sous le nom nedete (« rêveurs »), sont des guides spirituels sages, des guérisseurs et des clairvoyants qui conseillent les Kaskas sur les questions relatives à leur bien-être spirituel, émotionnel et physique.

Récits des origines

La tradition orale est un élément important de la culture et de la spiritualité des Kaskas. Les histoires racontent le passé et offrent des leçons ou des morales sur la manière de mener une bonne vie. Les légendes expliquent les origines du monde et de toutes les créatures qui y vivent. Ces histoires sont encore transmises de génération en génération.

Les différentes communautés ont chacune différents récits et différentes histoires des origines, mais il existe entre elles certains points communs. Par exemple, le Castor et le Corbeau sont des personnages récurrents dans de nombreuses légendes kaskas. Le Castor et le Corbeau sont tous deux des métamorphes, c’est-à-dire qu’ils ont le pouvoir de passer de la forme d’animal à celle d’être humain et vice-versa. Bien qu’ils soient généralement décrits dans les légendes comme étant des personnages qui sont utiles pour les humains, le Corbeau est également connu comme étant un filou qui s’attire souvent des ennuis. (Voir aussi Symbolisme du Corbeau.)

De même, les histoires kaskas au sujet de l’origine de la Terre diffèrent légèrement entre elles, mais elles décrivent généralement un monde où la Terre est immergée sous l’eau. Les animaux, dont le Castor, le Rat musqué et les oiseaux, veulent atteindre la terre située sous l’eau, alors ils plongent le plus profondément possible en tentant de s’y rendre. Aucun d’entre eux n’y parvient. Un jour, un oiseau (qu’on appelle le Plongeur) s’aventure sous l’eau en quête de la Terre et y demeure pendant six jours. Lorsqu’il refait surface, ses amis animaux voient des traces de terre sous ses talons. Les animaux utilisent donc cette terre humide pour modeler la Terre telle qu’on la connait aujourd’hui. Des arbres et des plantes se mettent à pousser sur cette terre humide à mesure qu’elle sèche, et les animaux et les humains prospèrent sur ce nouveau monde.

Histoire coloniale

En 1821, la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) commence la traite avec les Nahanni, un terme aujourd’hui désuet qui est à l’époque utilisé pour désigner les peuples kaskas (et potentiellement d’autres marchands autochtones, comme les Tutchonis du Sud).

La présence d’étrangers sur le territoire kaska augmente en 1873 après la ruée vers l’or du district de Cassiar, lorsque d’autres Premières Nations, des Métis, des Européens et des Chinois arrivent dans la région. Environ trois ans plus tard, la CBH établit des postes de traite à Lower Post et McDame Creek. En 1888, le nombre de chercheurs d’or diminue, mais plusieurs peuples autochtones, que l’on appelle alors les Cascars, demeurent dans la région. Les origines ethniques des familles associées aux postes de traite de Lower Post et de McDame Creek sont diverses, bien que les locuteurs de la langue dénée soient en majorité, mais les mariages mixtes entre les descendants d’immigrants représentent un premier pas vers l’intégration de ces communautés. Alors que les possibilités de travail salarié diminuent, la chasse et le trappage d’animaux à fourrure fournissent les ressources les plus stables. Obligés de partager leurs terres avec les colons pendant cette période, les Kaskas sont confinés dans certaines communautés et réserves, surtout dans le district de Cassiar, au nord-ouest de la Colombie-Britannique.

Pendant la première moitié du 20e siècle, les influences euro-canadiennes sur les peuples kaskas augmentent. Lower Post est intégré à la voie aérienne entre Edmonton et Whitehorse après les années 1920, ouvrant cette communauté aux influences extérieures. Durant la période de la Deuxième Guerre mondiale, les économies du trappage d’animaux à fourrure et du travail salarié s’améliorent puisque Watson Lake devient une station d’approvisionnement pendant la construction de la route de l’Alaska, et Lower Post devient un dépôt. Les services gouvernementaux augmentent considérablement, et les interactions avec les Euro-Canadiens continuent d’être canalisées vers les fonctions administratives et éducatives, ainsi que les opérations minières.

Au début des années 1940, de nombreux enfants kaskas sont envoyés au pensionnat indien de Lower Post, et ce jusque dans les années 1980 environ. Il est interdit aux enfants de parler leur langue maternelle ou de pratiquer une religion autochtone. Beaucoup d’entre eux sont victimes d’abus physiques, verbaux et sexuels. Des survivants des pensionnats indiens se concentrent maintenant à sensibiliser les autres Canadiens au sujet de ce moment sombre de l’histoire, dans une démarche vers la réconciliation. (Voir aussi Commission de vérité et réconciliation du Canada.)

Traités et revendications territoriales

Dès 1994, le Conseil Kaska Dena entame un processus de négociation de traités avec les gouvernements du Canada et de la Colombie-Britannique. L’objectif est d’établir les termes d’un traité qui précise les droits sur les terres ancestrales et les ressources traditionnelles, les structures gouvernementales, les relations fiscales, et plus. Ces groupes en sont actuellement à la quatrième étape d’un total de six. En 2013, le Conseil Kaska Dena signe le Incremental Treaty Agreement (ITA), un accord progressif, avec la province de la Colombie-Britannique pendant que les négociations en vue d’un traité officiel se poursuivent. Le ITA n’est pas un traité, mais il offre aux Premières Nations des avantages liés au traité pendant que se poursuit le processus de négociations du traité.

Depuis 2006, les Kaska Dena sont impliqués dans un conflit territorial au sujet des limites occidentales définies par le Traité n° 8. Les Premières Nations du Traité n° 8 de West Moberly, Halfway River, Saulteau, Prophet River, Doig River et Fort Nelson soutiennent que la véritable frontière occidentale définie par le Traité n° 8 se situe le long du bassin versant Arctique-Pacifique. En 2005, ces nations intentent une poursuite judiciaire devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique afin d’obtenir une déclaration de leur territoire. Bien que le gouvernement fédéral est d’accord avec les revendications des nations concernant la frontière, le gouvernement de Colombie-Britannique et le Conseil Kaska Dena ne le sont pas. Tous deux soutiennent que les limites du Traité n° 8 se situent plus à l’est. La majorité du territoire ancestral de Kaska Dena se trouve dans la partie ouest contestée du Traité n° 8; par conséquent, la résolution de ce conflit est d’une grande importance pour les nations kaskas. Le procès commence en 2014, mais le litige est toujours en cours.

En 2012, le Conseil Kaska Dena et la province de la Colombie-Britannique signent le Strategic Land Use Planning Agreement, un accord d’utilisation stratégique du territoire. Cet accord offre des possibilités d’emploi, d’investissement et de développement au sein des communautés kaskas. Le Conseil Kaska Dena est également impliqué dans d’autres négociations avec la province de la Colombie-Britannique, dont le Daylu Dena Council Forest Consultation and Revenue Sharing Agreement (2014), le Dease River Forest Consultation and Revenue Sharing Agreement (2014), le Kwadacha Forest Consultation and Revenue Sharing Agreement (2014) and le Kaska Dena Council Strategic Engagement Agreement (2015).

Vie contemporaine

Membres des Premières Nations Kaska Dena
Des représentants du gouvernement de la C.-B. et des Premières Nations Kaska Dena adoptent une attitude célébratoire après la signature de l'Entente d'utilisation stratégique du territoire au lieu de rassemblement de Rapid River (2012)
 Joueurs de tambour Kaska Dena
Prestation de joueurs de tambour Kaska Dena pendant la signature de la nouvelle entente d'engagement stratégique avec les Premières Nations Kaska Dena (2012)

Depuis 1981, le Conseil Kaska Dena représente les Kaskas dans les négociations de traités avec les gouvernements fédéral et provinciaux. Le Conseil a également pour mission de protéger la culture, la langue et l’héritage des Kaskas et il vise à offrir des services sociaux et communautaires. Le Conseil compte neuf dirigeants, dont trois directeurs généraux élus.

Guide pédagogique perspectives autochtones

Collection des peuples autochtones

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