Le Canada a une histoire longue et compliquée en rapport avec les armes de destruction massive. Des soldats canadiens ont été attaqués avec des armes chimiques, et les ont aussi utilisées de manière offensive. (Voir Le Canada et la guerre des gaz.) Le Canada a mené des recherches pour mettre au point des armes chimiques, biologiques et nucléaires, mais aussi pour s’en défendre. Certaines armes chimiques ont été testées au Canada et sur des Canadiens, entraînant des conséquences à long terme. Le Canada a également joué un rôle important dans le développement des armes nucléaires. (Voir Le Canada et le Projet Manhattan.) Le pays a employé des armes nucléaires, dans un but principalement défensif, pendant la Guerre froide. Le Canada a signé des accords internationaux afin de limiter l’utilisation de ces armes. Aujourd’hui, le Canada ne possède plus d’armes de destruction massive. Cependant, le pays est membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord et de NORAD, des alliances qui utilisent des armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive.
Définitions
Arme de destruction massive : Toute arme susceptible d’entraîner un nombre extrêmement élevé de victimes et/ou une destruction à grande échelle. Il s’agit typiquement d’armes chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires. L’acronyme
CBRN est utilisé pour désigner ce type d’armes.
Arme chimique : Arme qui utilise un produit chimique toxique, le plus souvent diffusé sous forme de gaz, pour tuer ou blesser. Les armes chimiques ont été beaucoup utilisées durant la Première Guerre mondiale.
Arme biologique : Arme qui utilise un agent infectieux comme un virus, une bactérie ou une toxine biologique pour tuer ou blesser. La diffusion délibérée d’une maladie comme arme de guerre serait un exemple de guerre biologique.
Arme radiologique : Arme conçue spécifiquement pour tuer en utilisant l’empoisonnement par les radiations. Ce type d’arme peut aussi entraîner une contamination radiologique dans de vastes zones.
Arme nucléaire : Arme qui provoque une explosion massive grâce à une réaction nucléaire (fission, fusion ou une combinaison des deux réactions). Les armes nucléaires créent de gigantesques boules de feu et de puissantes ondes de choc. Elles entraînent aussi une contamination radiologique, dont le résultat est habituellement un accroissement des taux de cancer et de mortalité.
Ère coloniale
Le général britannique Jeffery Amherst propose d’utiliser une forme d’arme biologique durant la rébellion de Pontiac en 1763. (Voir Obwandiyag.) Il suggère de faire parvenir des couvertures infectées par la variole aux guerriers autochtones qui assiègent Fort Pitt (aujourd’hui Pittsburgh). À l’époque, on sait que les Autochtones sont davantage sujets à être infectés et à mourir que les Européens. (Voir maladie.) En fait, un négociant du fort a la même idée que lui. Il donne aux émissaires autochtones des couvertures infectées venant de l’hôpital du fort.
Jeffery Amherst voudrait éliminer complètement les peuples autochtones. C’est ce que nous appellerions aujourd’hui un nettoyage ethnique ou un génocide. (Voir Génocide et peuples autochtones au Canada.) On ignore si son plan s’est réalisé, mais il est clair que cela était dans ses intentions. Jeffery Amherst a longtemps été considéré comme un héros au Canada pour sa campagne victorieuse de la conquête de Nouvelle-France. Aujourd’hui, son héritage est remis en question.
Première Guerre mondiale
Durant la Première Guerre mondiale, des armes chimiques sont utilisées par tous les principaux belligérants, incluant le Canada. (Voir Le Canada et la guerre des gaz.) L’Allemagne utilise le gaz de chlore pour la première fois durant la deuxième bataille d’Ypres contre les troupes françaises et algériennes, mais aussi contre des soldats canadiens. (Voir Corps expéditionnaire canadien.) Les premières armes chimiques doivent être manipulées par des soldats spécialisés et nécessitent des vents assez forts pour les répandre sur le champ de bataille. Par la suite, on utilise des systèmes de diffusion comme des obus ou des projecteurs de gaz. Le chlore a une couleur et une odeur bien identifiables. Cependant, il est bientôt remplacé par de nouveaux gaz sans odeur et sans couleur, ce qui rend leur détection plus difficile. Pour répondre à la menace des gaz toxiques, des masques à gaz et autres équipements de défense sont mis au point.
À la fin de la Première Guerre mondiale, l’utilisation des gaz toxiques est devenue routinière. Les soldats vont régulièrement au combat équipés de masques à gaz. On fabrique même des masques à gaz pour les chevaux. Les soldats canadiens utilisent le
gaz durant la campagne des Cent-Jours, vers la fin de la guerre.
Deuxième Guerre mondiale
À l’approche de la Deuxième Guerre mondiale, les nations craignent que les armes chimiques soient utilisées à grande échelle. Avant la guerre, l’Italie utilise des gaz mortels contre l’Abyssinie (Éthiopie). Le Japon recourt aussi aux armes chimiques et biologiques durant son invasion de la Chine, à partir de 1937. Ni l’Abyssinie ni la Chine ne disposent d’armes chimiques pour répliquer. Ceci encourage l’Italie et le Japon à utiliser les gaz toxiques.
Les armes chimiques ne sont pas utilisées contre des pays qui disposent d’armes équivalentes. Aucun des pays alliés ou des puissances de l’Axe n’utilisera de telles armes contre leurs adversaires. La crainte qu’elles ne soient utilisées conduit toutefois les deux côtés à produire des armes chimiques et de l’équipement de protection.
En 1925, le Canada signe le protocole de Genève qui a pour but de mettre un terme à l’utilisation des armes chimiques. Malgré tout, le pays reste actif dans la recherche et la production d’armes chimiques et biologiques. La station expérimentale de Suffield, en Alberta, est financée conjointement par le Canada et l’Angleterre. (Voir Le Canada et la guerre des gaz.)
Des scientifiques canadiens participent au développement d’armes biologiques, notamment l’anthrax. Le programme canadien d’armes biologiques est situé sur la Grosse-Île, près de Québec. ( Voir aussi Lieu historique national de la Grosse-Île-et-le-Mémorial-des-Irlandais.) L’établissement est fermé à la fin de la guerre. Toutefois, le Canada continue à travailler à des armes biologiques pendant la Guerre froide. Ces essais ont lieu principalement dans les installations de Suffield.
Le Canada contribue aussi au développement de l’arme la plus destructrice jamais conçue : l’arme nucléaire. La plus grande partie de la recherche britannique sur les armes nucléaires est transférée au Canada en 1942. La recherche britanno-canadienne est ensuite fusionnée avec la l’effort des États-Unis pour créer le projet Manhattan. (Voir Le Canada et le projet Manhattan.) L’objectif de ces recherches est de réaliser une arme nucléaire fonctionnelle. De l’uranium extrait par les peuples dénés de Déline, dans les Territoires-du-Nord-Ouest, pourrait avoir été utilisé à cette fin; toutefois, cela n’a pas été prouvé de manière conclusive. Néanmoins, le Canada fournit de l’uranium au programme nucléaire des États-Unis de 1945 jusqu’aux années 1960 au moins. La participation du Canada au projet Manhattan conduira plus tard à la création de l’industrie canadienne de l’énergie nucléaire.
Guerre froide
Le Canada utilise différents types d’armes nucléaires durant la Guerre froide, soit approximativement de 1964 à 1984. Certaines de ces armes sont déployées par l’armée canadienne en Europe de l’Ouest. Elles sont destinées à servir contre les forces militaires du pacte de Varsovie en cas d’attaque. D’autres armes nucléaires sont utilisées au Canada pour la défense contre les avions et les missiles soviétiques. Le Canada possède des fusées à ogives nucléaires, des missiles sol-air armés d’ogives nucléaires et des bombes atomiques transportées par des chasseurs à réaction, et des roquettes d’artilleries équipées d’ogives nucléaires. (Voir aussi La crise des missiles Bomarc.)
Les États-Unis déploient des bombardiers à longue portée et une douzaine de bombes atomiques au Canada. Ils sont stationnés dans une base aérienne au Labrador pendant une courte période au début des années 1950. Des charges nucléaires sous-marines sont aussi installées dans une base navale à Terre-Neuve jusqu’au début des années 1970.
L’utilisation des armes nucléaires par le Canada est régie par un système à « double clé ». Les armes nucléaires du Canada ne seront utilisées qu’avec l’autorisation des États-Unis, et seulement en cas d’engagement nucléaire complet. Ce type d’arrangement est fréquent parmi les nations composant l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) pendant la Guerre froide.
Le Canada collabore avec les États-Unis pour protéger l’Amérique du Nord d’une éventuelle attaque nucléaire. Ensemble, ils créent NORAD et mettent au point des lignes de radars avancés. Des stations de radar et de renseignement sur les transmissions sont installées dans l’Extrême Arctique. Elles doivent permettre au Canada et aux États-Unis de détecter des avions ou des missiles soviétiques avec un délai suffisant pour permettre, théoriquement, de les neutraliser.
Désarmement
Le premier ministre Pierre Elliott Trudeau ne cache pas son opposition aux armes nucléaires. Le Canada signe le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 1968. Le Canada élimine ses armes nucléaires de 1968 à 1984. (Voir Désarmement.)
Le Canada ratifie la Convention sur l’interdiction des armes biologiques en 1972, et la Convention sur l’interdiction des armes chimiques en 1995. Depuis 1990, le Comité d’examen du Programme de défense biologique et chimique (CEPDBC) supervise la destruction des armes chimiques et biologiques testées sur le sol canadien. On croit que le Canada ne possède aucune arme de destruction massive. Toutefois, le pays continue à maintenir sa capacité de se défendre contre celles-ci. En outre, le Canada est toujours protégé par le parapluie nucléaire des États-Unis, et est allié avec d’autres puissances nucléaires au sein de l’OTAN.