Lionel B. (Leo) Clarke, soldat, arpenteur ferroviaire, récipiendaire de la Croix de Victoria (né le 1er décembre 1892 à Waterdown en Ontario; décédé le 19 octobre 1916 en France). Durant la Première Guerre mondiale, le caporal Leo Clarke a été l’un des trois soldats, habitant tous sur la même rue à Winnipeg, à recevoir la Croix de Victoria (C.V.), la plus haute distinction pour actes de bravoure au combat parmi les troupes de l’Empire britannique. Les trois Croix de Victoria reçues par les hommes de Pine Street, rue renommée plus tard « Valour Road », ont été un exploit jamais égalé dans toute autre partie de l’Empire britannique.
Jeunesse
Bien qu’il soit né à Waterdown en Ontario, Leo Clarke conserve des liens étroits avec ses proches d’Essex en Angleterre, où la famille Clarke retourne vivre durant la jeune enfance de Leo. La famille revient pendant l’ère de Wilfrid Laurier (1896 — 1911), tout comme un million d’autres immigrants britanniques à la recherche d’une nouvelle vie au Canada. Les Clarke s’installent à Winnipeg en 1903, où les portes de la ville promettent « prospérité » et « progrès ». Leo devient un athlète vedette, reconnu pour son côté aventureux, pour sa beauté et pour son audace. La famille Clarke habite au 785 rue Pine et fréquente l’Église anglicane Saint Patrick à proximité.
Expérience de la guerre
Lorsqu’éclate la Première Guerre mondiale en 1914, Leo Clarke est employé comme arpenteur ferroviaire dans le nord de la Saskatchewan. Son père Harry, originaire d’une famille de militaires britanniques, envoie un message à son fils l’informant que la Grande‑Bretagne et l’Empire sont en guerre. Lorsqu’il reçoit ce message, Leo travaille sur un ranch en Saskatchewan. Il rentre chez lui, s’enrôle dans le 27e Bataillon de Winnipeg, et part pour l’Angleterre à la mi‑mai 1915. Leo Clarke arrive en France avec la 2e Division du Corps expéditionnaire canadien en septembre 1915 et il est affecté au saillant d’Ypres en Belgique, au mois d’octobre.
Lorsqu’il apprend que son frère Charlie occupe un poste de bombardier, Leo Clarke demande à être transféré pour le rejoindre dans le 2e Bataillon. Les bombardiers sont spécialisés dans l’utilisation des grenades Mills no 5 et des grenades à fusil. Les deux frères deviennent des soldats d’élite dans une fonction extrêmement dangereuse. Leo Clarke est blessé le 8 décembre 1915, mais il reprend du service à temps pour participer à d’audacieux raids nocturnes de tranchées au début 1916. Remarqué pour son courage et ses compétences en tant que tireur d’élite, il devient sous‑officier subalterne.
Bravoure sur la crête de Pozières
Le matin du 9 septembre 1916, le 2e Bataillon de Leo Clarke se joint à l’attaque des Alliés dans la bataille de la Somme en France. Le caporal Leo Clarke porte avec lui des grenades Mills et des munitions d’armes légères, et il s’avance dans une charge à la baïonnette soutenue par des tirs de barrage d’artillerie. La bataille s’intensifie alors que les Allemands ripostent avec de l’artillerie lourde et des mitrailleuses. Les Canadiens mettent tout en œuvre pour renforcer les tranchées ennemies détruites qu’ils occupaient durant l’assaut, repoussant plusieurs contre‑attaques allemandes dans un déluge frénétique de tirs.
L’eau et les munitions commencent à manquer et il devient vital pour Leo Clarke et les bombardiers de sécuriser les deux extrémités d’une tranchée ennemie sur la crête de Pozières à proximité de Courcelette, afin de protéger la zone capturée par les forces alliées. Le flanc de Leo Clarke subit le pire du combat, obligeant les soldats à repousser les ennemis dans des combats rapprochés.
Après avoir protégé leur flanc, mais avec ses compagnons blessés ou tués, Leo Clarke continue de fortifier la tranchée capturée, lorsqu’un groupe ennemi de 20 hommes et de deux officiers fait soudainement irruption dans la tranchée. Leo Clarke les repousse, ciblant un ou deux Allemands à la fois derrière sa barricade. Malgré une blessure de baïonnette à la jambe qui saigne abondamment, il continue à se battre seul, tuant et blessant tous ses assaillants à l’exception du dernier, qu’il capture afin de le ramener dans ses propres rangs en tant que prisonnier. Après cet exploit spectaculaire, Leo Clarke est promu au grade de sergent intérimaire.
Croix de Victoria
Pour sa persévérance dans une défense désespérée et dans des conditions inimaginables, le jeune homme de 23 ans recevra plus tard la Croix de Victoria, la plus prestigieuse médaille attribuée à des soldats de l’Empire britannique pour des actes de bravoure sur le champ de bataille.
Toutefois, quelques semaines après ses exploits héroïques, Leo Clarke est enseveli par les débris d’un obus d’artillerie ayant explosé à proximité du bastion allemand de Regina Trench. Comme il est recouvert de boue, son frère Charlie doit le déterrer, mais il réussit à l’en extraire vivant. Il est toutefois trop tard, Leo Clarke est paralysé et il souffre de graves blessures internes. Il meurt des suites d’un traumatisme le 19 octobre 1916, le jour même où l’armée britannique annonce qu’elle lui attribue la Croix de Victoria. La citation indique : « pour la bravoure la plus remarquable sur la crête de Pozières ».
En février 1917, le père de Leo Clarke, Harry, reçoit la Croix de Victoria de son fils lors d’une présentation tenue au coin des rues Portage et Main à Winnipeg. La médaille est une simple croix de bronze estampillée de la devise For Valour (pour bravoure). Pour la première fois, le gouverneur général du Canada, le duc de Devonshire, se déplace pour présenter personnellement le prix lors d’une cérémonie à laquelle assistent près de 30 000 personnes. Harry Clarke reçoit également une lettre du roi George V, félicitant son fils pour ses actes courageux.
Leo Clarke est le deuxième de trois hommes, avec le sergent ‑major Fred Hall et le lieutenant Robert Shankland, de la rue Pine à Winnipeg à recevoir la Croix de Victoria durant la guerre. En leur honneur, la rue est renommée « Valour Road ». Aujourd’hui, la mémoire de Leo Clarke est commémorée sur une plaque à Valour Road; ses restes sont enterrés au cimetière militaire d’Étretat dans le nord de la France. Sa Croix de Victoria, ainsi que celles de Fred Hall et de Robert Shankland, est détenue par le Musée canadien de la guerre. Leur héroïsme est présenté dans la Minute du patrimoine sortie en 1991 intitulée « Le chemin de la bravoure ». Postes Canada a émis un timbre en l’honneur des trois hommes, en octobre 2021.