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Manon Massé

Manon Massé, femme politique, militante féministe, partenaire active du milieu communautaire, travailleuse sociale (née le 22 mai 1963 à Windsor, au Québec). Elle est cofondatrice du mouvement politique Option citoyenne, puis de Québec solidaire. Elle est députée à l’Assemblée nationale du Québec de la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques depuis avril 2014. En mai 2017, elle devient co-porte-parole de Québec solidaire avec Gabriel Nadeau-Dubois.

Manon Massé

Racines

Née en Estrie, dans une famille catholique pratiquante de la ville de Windsor, Manon Massé se définit comme une ouvrière de cœur et de sang. Le milieu ouvrier est la trame de fond de son enfance, son père, son oncle et presque l’entièreté de la ville travaillent à la papeterie Domtar. Sa mère occupe aussi un emploi industriel dans une manufacture de sacs de papier.

À l'âge de 7 ans, elle quitte l’Estrie avec sa famille pour s’installer à Boucherville, en banlieue de Montréal. Manon Massé conserve tout de même un sentiment d’appartenance, une fierté pour la région qui l’a vue naitre : « Windsor, ce sont mes racines. Une bonne partie de la famille de mon père et de ma mère vivent encore là. ».

Au secondaire, elle est attirée par les activités de la pastorale. À cette époque, le service d’animation pastorale scolaire réunit les élèves qui veulent discuter ensemble des divers enjeux de société à travers le prisme de la foi catholique. Elle découvre un monde très éloigné de la pratique religieuse de ses parents, de la culpabilité et la morale chrétienne. Elle apprécie cette nouvelle approche humaniste de la foi, où on ne prononce même pas le nom de Jésus.

La pratique de la pastorale sociale lui permet d’explorer le rapport à soi et à l’autre. En effet, la facette philosophique de la foi l’interpelle. Dans son livre Parler vrai, publié en 2018, elle se souvient qu’à cette époque, le clergé québécois abritait un mouvement progressiste puissant. Selon elle, celui-ci aurait été influencé par les principes de la théologie de la libération. Il existait donc un espace permettant d'examiner attentivement les dynamiques de pouvoir qui caractérisent la société, en s'appuyant sur les enseignements des Évangiles.

Politique appliquée

C’est au Cégep Édouard-Montpetit qu’elle développe ses qualités d’organisatrice. Les retraites et autres camps organisés par la pastorale sociale seront autant d’occasions de confirmer sa vocation. Mettre sur pied ces retraites lui permet, entre autres, de toucher à l’animation et à l’élaboration de contenu pour ses ateliers. Le volet social de ces séjours la stimule.

En 1983, Manon Massé s’inscrit en théologie à l’Université de Montréal où elle complète une majeure. C’est en étudiant cet extrait de l’Évangile selon Matthieu qu’elle réalise la direction qu’elle souhaite donner à son désir d’engagement :

Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli; j’étais nu, et vous m’avez vêtu; j’étais malade, et vous m’avez visité; j’étais en prison, et vous êtes venus vers moi. […] Ce que vous avez fait aux plus petits d’entre vous, c’est à moi que vous l’avez fait.

Elle prend conscience que son chemin n’est pas en théologie, mais bien auprès du monde des exclus, ceux et celles qui subissent en permanence les iniquités sociales. C’est auprès de ces gens qu’elle s’implique en tant qu’organisatrice communautaire au Comité social Centre-Sud, le premier emploi professionnel qu’elle occupe en 1986.

À l’époque, les conséquences de la crise économique de 1981 se font encore sentir et les petits salariés sont les plus touchés. Plusieurs manufactures du quartier de l’est de Montréal mettent la clé sous la porte, c’est tout le marché de l’emploi qui se transforme. Elle affirme dans son livre Parler vrai que « Dans un tel milieu, s’entraider, ce n’est pas un choix, c’est une nécessité. »

En marche

Le 17 mars 1994, Manon Massé rencontre pour la première fois Françoise David, nouvellement présidente de la Fédération des femmes du Québec. Cette dernière prépare une grande marche contre la pauvreté. C’est lors de cette journée que se tient la première réunion pour l’organisation de l’événement. Manon Massé est invitée à y prendre part par sa conjointe de l’époque, une collègue de Françoise David. Forte de ses précédentes implications, elle est nommée coordonnatrice, à titre bénévole, du groupe de travail chargé de la logistique.

Nommée Du pain et des roses, la grande manifestation est un hommage à la grève des travailleuses du textile de Lawrence, au Massachusetts, en 1912. Neuf revendications sont au programme : la hausse du salaire minimum, la mise en forme d’une législation sur l’équité salariale et la perception automatique des pensions alimentaires en font partie.

Pendant 10 jours, du 26 mai au 4 juin 1995, beau temps, mauvais temps, des centaines de marcheuses convergent vers la ville de Québec.

À la suite de cet évènement, Manon Massé dit avoir compris ce qui animera dorénavant son implication sociale et politique. Elle prend conscience que le féminisme est synonyme d’humanisme. Plus tard, elle écrit que : « Pour comprendre la pauvreté, le racisme, l’exclusion et l’homophobie, on ne peut pas se passer de l’analyse féministe […] ». (Voir aussi Intersectionnalité.)

Carrière politique

Après avoir cofondé le collectif non partisan D’abord solidaires en 2002, Manon Massé participe, en 2003, à la naissance du mouvement politique Option citoyenne. Ses activistes veulent passer de la parole aux actes. On priorise les enjeux liés au féminisme, à l’écologie, la pauvreté et la mondialisation. En mai 2004, parait le manifeste Bien commun recherché : Une option citoyenne. Ce manifeste, signé par Françoise David, met la table pour une convergence des forces progressistes de gauche. Les valeurs inscrites dans ce manifeste prendront la forme d’un nouveau parti politique fondé le 4 févier 2006 : Québec solidaire qui est issu d’une fusion entre Option citoyenne et l’Union des forces progressistes.

La même année, Manon Massé devient la toute première candidate de Québec solidaire (QS) dans le cadre d’une élection partielle dans la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques. C’est seulement en 2014, après cinq tentatives, qu’elle est élue. Elle devient ainsi la troisième députée de QS à faire son entrée au Parlement, après Amir Khadir en 2008 et Françoise David en 2012. Co-porte-parole de QS avec Gabriel Nadeau-Dubois depuis 2017, elle est également cheffe parlementaire du parti jusqu’en septembre 2021.

En mai 2023, Manon Massé annonce qu’elle ne sollicitera pas de nouveau mandat comme co-porte-parole féminine de Québec solidaire. Elle veut prioriser son rôle de députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Avec cette annonce, Manon Massé interpelle les femmes de la relève progressiste, pour lui succéder dans cette fonction. Elle croit que le moment est bien choisi pour passer le relais puisque Québec solidaire a gagné en maturité.