Le premier gardien de but à porter un masque dans une partie de hockey sur glace était en fait une gardienne : Elizabeth Graham, de l’Université Queen’s, en 1927. Le premier gardien de la Ligue nationale de hockey (LNH) à porter un masque à temps plein a été Jacques Plante, des Canadiens de Montréal, qui s’est présenté à partir de 1959 avec un masque en fibre de verre épousant la forme de son visage, une création de Bill Burchmore. D’un perfectionnement à l’autre, on en est venu à intégrer une grille au niveau des yeux et du nez. Ce style de masque hybride en fibre de verre a été adapté au baseball par le receveur Charlie O’Brien, des Blue Jays de Toronto, en 1996. Des préoccupations sont toutefois apparues au sujet de la sécurité des masques, au baseball comme au hockey, notamment en ce qui concerne leur degré de protection contre les commotions cérébrales.
(à partir du haut à gauche, dans le sens horaire) Le masque original de 1959, le masque de 1969, le masque d’entraînement de 1956 à 1959 et le masque de 1965.
Premiers gardiens masqués
Elizabeth Graham
Le premier gardien de but à porter un masque dans une ligue de hockey organisé est une jeune femme de 21 ans, Elizabeth Graham, de l’Université Queen’s. Le 7 février 1927, elle porte un masque d’escrime dans une victoire de 3-2 contre l’Université de Toronto. D’après son fils, elle le fait parce que « c’est une question de bon sens », d’autant plus qu’elle vient de subir des traitements de dentisterie et tient à protéger ses dents.
Clint Benedict
Le 20 février 1930, Clint Benedict devient le premier gardien de but à porter un masque dans la LNH. Lors d’un match de son équipe, les Maroons de Montréal, contre les Americans de New York au Madison Square Garden, il étrenne un masque protecteur en cuir épais parce qu’il a eu la joue et le nez fracturés par un lancer d’Howie Morenz le 7 janvier précédent. L’historien du hockey Stephen Smith écrira qu’il « avait l’air d’un visiteur venu de la planète Mars ». Mais le port du masque est temporaire pour Clint Benedict, qui trouve que le protège-nez nuit à sa vision du jeu.
Le gardien de but Clint Benedict, des Maroons de Montréal, avec son masque temporaire en 1930.
Teiji Honma
Le premier gardien de but à porter un masque aux Jeux olympiques d’hiver est le Japonais Teiji Honma en 1936. Il porte une cage métallique par-dessus une armature faciale en cuir, semblable au masque de receveur au baseball, afin de protéger ses lunettes.
Jacques Plante
Le 1er novembre 1959, le gardien de but des Canadiens de Montréal Jacques Plante subit une coupure au visage en bloquant un lancer frappé d’Andy Bathgate. Jacques Plante refuse de retourner au jeu à moins de porter un masque, celui qui a été confectionné sur mesure pour lui par Bill Burchmore et qu’il utilise régulièrement à l’entraînement. Bill Burchmore est un entraîneur de hockey dans une ligue pour enfants et un partisan des Canadiens qui travaille chez Fiberglas Canada à Montréal. Plus tôt la même année, il a écrit à Jacques Plante pour lui proposer le masque. À ce moment-là de sa carrière, le gardien compte sept saisons dans la LNH et a reçu 150 points de suture au visage.
Le plus difficile à convaincre chez les Canadiens est l’entraîneur-chef Toe Blake, qui craint que Jacques Plante ne voie pas les lancers bas. Même après la blessure, il force son gardien à jouer sans masque. Jacques Plante obtempère jusqu’au 8 mars 1960, où son équipe subit une défaite de 3‑0 contre les Maple Leafs de Toronto. Après cela, il portera toujours un masque sur la glace. Il jouera encore 11 saisons dans la LNH et une de plus dans l’Association mondiale de hockey (AMH).
Jacques Plante a été critiqué de toutes parts pour sa décision. Le gardien Gump Worsley a dit un jour : « Celui qui joue avec un masque est un peureux. Mon masque, c’est mon visage. » Pourtant, lors de la saison 1973-1974, lui-même en porte un chez les North Stars du Minnesota. Le dernier gardien de but de la LNH à jouer sans masque est Andy Brown, des Penguins de Pittsburgh, en 1974.
Types de masque courants
Le type de masque initial porté par Jacques Plante est un moulage qui épouse la forme du visage. Il couvre le visage entier sauf les yeux et parfois la bouche. Outre Jacques Plante, il a été porté par Jim Rutherford, Gerry Cheevers, John Davidson, Bernard Parent et Grant Fuhr. Le problème avec ce type de masque est qu’il ne protège pas suffisamment les yeux. La carrière de Bernard Parent a pris fin lorsqu’un bâton l’a touché à l’œil lors d’un match contre les Rangers de New York en 1979.
L’entraîneur des Bruins de Boston John «Frosty» Forristall dessinait des points de suture sur le masque de Gerry Cheevers chaque fois qu’une rondelle le frappait au visage.
En 1978, Dave Dryden et Greg Harrison inventent un masque en fibre de verre muni d’une grille au niveau des yeux et du nez. Dave Dryden, le grand frère du gardien Ken Dryden, qui a été intronisé au Temple de la renommée du hockey, étrenne cette pièce d’équipement en 1978-1979 alors qu’il joue pour les Oilers d’Edmonton, de l’AMH. Le nouveau masque gagne en popularité après que Patrick Roy l’adopte au cours de la saison 1985-1986, et que Grant Fuhr troque son masque moulant pour un autre conçu par Greg Harrison.
Le masque hybride avec coquille en fibre de verre et grille faciale s’est popularisé après que Patrick Roy l’a adopté durant la saison1985-1986.
Dans les années 1980 et au début des années 1990, de nombreux gardiens portent une combinaison casque-grille (ou « cage à oiseau »), dont Mike Vernon, Glenn Healy, Dominik Hasek et Clint Malarchuk. Ils suivent les traces du gardien soviétique Vladislav Tretiak, le premier au début des années 1970 à porter ce type de masque, qui se répand ensuite en Europe.
Mais quel que soit le masque utilisé, il n’y en a encore aucun qui protège bien la gorge. Le 22 mars 1989, Clint Malarchuk se fait trancher la gorge par une lame de patin durant une partie. Il passe près d’en mourir et il faut 300 points de suture pour refermer sa blessure. Peu après, il n’est pas rare de voir des gardiens porter un protège-gorge en plexiglas attaché à leur masque. Ainsi protégés, ils peuvent s’étirer davantage sans craindre une blessure grave. C’est la solution qu’adoptent dans les années 1990 les gardiens Curtis Joseph, Chris Osgood, Kelly Hrudey et Bill Ranford, entre autres.
Les gardiens d’aujourd’hui portent un casque en fibre de verre avec grille faciale « qui absorbe mieux les chocs », au dire d’Alison Lukan, des Blue Jackets de Columbus. De nombreux gardiens ont conservé le protège-gorge, dont Braden Holtby, Marc-André Fleury et Devan Dubnyk.
Adaptation du hockey au baseball
Le 13 septembre 1996, Charlie O’Brien, des Blue Jays de Toronto, devient le premier receveur du baseball majeur à utiliser dans une partie un masque de style hockey conçu par O’Brien & Van Velden Mask Inc., d’Hamilton, en Ontario. Au début, la ligue a des réserves au sujet de la sécurité, mais Charlie O’Brien la convainc que les masques comme ceux des gardiens de but sont plus sûrs que les masques de receveur classiques. Le masque emprunté au hockey offre une meilleure vision, protège mieux les oreilles et le receveur n’a pas besoin de l’enlever pour capter les balles retroussées à l’avant-champ.
Depuis ce jour, de nombreux receveurs du baseball majeur l’ont adopté, dont Buster Posey, Martin Moldonado et Gary Sanchez. On se demande néanmoins s’il protège bien contre les commotions cérébrales, fixé fermement comme il l’est au visage. Les receveurs Alex Avila et David Ross, par exemple, sont tous deux revenus à l’ancien masque en acier (plutôt qu’au nouveau avec grille en titane) après avoir subi des commotions en portant un masque de style hockey.
Confection
Les masques de gardien de but sont faits de fibre de verre et de résines époxydes. La fibre de verre présente l’avantage d’être légère et robuste. Les masques peuvent aussi être faits de matériaux comme le kevlar, la fibre de carbone et la résine de nylon Capron. La plupart des fabricants préfèrent toutefois la fibre de verre à la fibre de carbone parce qu’elle est moins chère.
Pour confectionner un masque sur mesure, le fabricant prend d’abord un moulage de la tête du gardien de but. Une fois le moule séché à l’air, il y verse du plâtre pour créer un modèle sur lequel il pourra construire le masque. L’étape suivante est celle de la confection même, où il prend soin de bien sculpter les contours du nez, de la bouche et des oreilles. Il doit s’assurer ensuite que le masque est assez épais. Il y applique de la fibre de verre et des résines époxydes pour le rendre aussi lisse et durable que possible. Puis un rembourrage en caoutchouc ou en mousse est ajouté à l’intérieur pour plus de confort et de protection.
Une fois l’ouverture faciale pratiquée et le masque peint, une grille en acier ou en titane y est fixée par des attaches en acier inoxydable. Le titane est d’usage plus courant parce qu’il est plus léger et donc plus confortable. La grille en acier est plus lourde mais aussi plus solide et plus sûre, car elle ploie sous la pression et transmet moins à la tête l’énergie d’un coup reçu.
Enjeux de sécurité
En 2011, l’analyste de Hockey Night in Canada Glenn Healy, qui portait une combinaison casque-grille durant sa carrière de gardien, se dit préoccupé par les masques hybrides que portent maintenant les cerbères du hockey professionnel. Il fait valoir que la LNH ne teste pas les masques de ses gardiens, qui risquent des blessures à la tête si leur masque est mal construit. En 2015, l’équipementier Bauer rappelle trois types de masque du Canada et des États-Unis après qu’on a signalé neuf cas de bris de grille en titane.
Durant la saison 2017-2018 de la LNH, 13 gardiens de but subissent des commotions. La LNH n’a d’autre choix que d’accroître les tests, elle qui s’est contentée jusque-là d’un test standard de sécurité, établi en 2014-2015. Désormais, les scientifiques peuvent étudier les effets des lancers frappés venant de toutes les directions et analyser la résistance du masque. De plus, la LNH fournit maintenant aux joueurs les fiches techniques des différents styles et marques de masque, à l’exemple de la National Football League (NFL), qui distribue à ses joueurs des fiches d’information sur les casques.
Voir aussi Origines du hockey sur glace.