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Médias et le droit, Les

Les médias constituent le mécanisme qui nous permet de recevoir l'information que nous cherchons et dont nous avons besoin. Avec le temps, l'imprimé a fini par supplanter les crieurs publics et les tablettes d'argile.

Médias et le droit, Les

Les médias constituent le mécanisme qui nous permet de recevoir l'information que nous cherchons et dont nous avons besoin. Avec le temps, l'imprimé a fini par supplanter les crieurs publics et les tablettes d'argile. Aujourd'hui, toute une variété d'information audio et visuelle nous est transmise sous forme numérique par de nombreux intermédiaires.

Les démocraties reposent sur le principe de la libre circulation de l'information. Cette liberté est généralement reconnue dans leurs constitutions. En 1967, la Constitution canadienne a importé de la Constitution britannique non écrite le principe de la liberté de la presse. Aujourd'hui, selon l'alinéa 2b) de la CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS, la « liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication » est une de nos libertés constitutionnelles fondamentales.

Alors qu'au Canada on a toujours souscrit à l'idée de la « liberté régie par le droit », les libertés fondamentales garanties par la Charte sont assujetties aux « limites qui sont raisonnables et dont la justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique ». Au cours des dernières années, la COUR SUPRÊME DU CANADA s'est prévalue de la Charte pour abolir un certain nombre de limites d'origine législative et reformuler d'autres libertés issues du droit prétorien. C'est ainsi que, en 1989, elle a déclaré inconstitutionnelle l'interdiction par l'Alberta de diffuser le contenu d'un exposé de la demande (un document judiciaire disponible pour le public et par lequel s'introduit une poursuite civile). L'autre exemple est la reformulation de la règle de common law relative à l'examen des interdictions de publication des procédures judiciaires.

Limites à la liberté

Les limitations sont multiformes. Certaines s'appliquent à tous les organes de presse, d'autres, à des médias en particulier et d'autres, enfin, à des particuliers communiquant de leur propre chef.

Les lois relatives à la diffamation imposent une limite générale au caractère absolu de la liberté de parole (voir DIFFAMATION). À l'exception du Québec, où s'applique le Code civil, la personne qui écrit ou enregistre d'une autre manière et distribue un message qui a pour effet d'abaisser une autre personne dans l'estime que peut lui porter la communauté, doit être prête à prouver devant un tribunal, au moyen d'une preuve admissible, que le message est plus susceptible d'être vrai que faux. Les expressions d'opinion peuvent être invoquées, au contraire, comme étant des commentaires loyaux sur une question d'intérêt public.

Des messages diffamatoires peuvent aussi être transmis, même s'ils ne sont pas entièrement vrais, s'ils sont contenus dans des comptes rendus justes et fidèles des débats d'un organisme auquel le public est normalement admis, tels que les débats publics des organismes gouvernementaux et les assemblées publiques. Ces comptes rendus bénéficient de l'« immunité relative ». On peut faire échec aux moyens de défense fondés sur le commentaire loyal et sur l'immunité relative par la production d'une preuve établissant que l'intention du journaliste ou de l'orateur était de nuire, ce qui, en droit canadien, signifie mauvaise volonté, malveillance, insouciance délibérée quant à la véracité ou à la fausseté de la déclaration faite. Les excuses ont pour effet de reconnaître la responsabilité et d'atténuer les dommages-intérêts.

À la différence des États-Unis, au Canada, on ne peut opposer la défense d'immunité relative à une accusation de diffamation d'un dignitaire public ou d'une personnalité à condition que l'orateur n'ait eu aucune connaissance réelle de la fausseté du message transmis. Aux États-Unis, on entend par « malveillance » la connaissance réelle de la fausseté. Au Canada, les individus peuvent se prononcer sur les faits publics à propos d'un dignitaire public en se prévalant du moyen de défense fondé sur le commentaire loyal, à condition que les faits soient réputés prouvables, qu'ils soient fidèlement énoncés (s'ils le sont), qu'ils se rapportent au commentaire, que le commentaire soit exprimé honnêtement et qu'il porte lui-même sur une question d'intérêt public. La philosophie qui sous-tend ce moyen de défense est celle-ci : si le public connaît les faits et comprend que le message transmis en constitue un commentaire, il peut alors décider pour lui-même de l'accepter comme étant loyal ou de le rejeter. Dès lors, le moyen de défense fondé sur le « commentaire loyal » protège les commentaires que beaucoup estimeraient outrageants, ridicules ou opiniâtres.

Au Québec, les journalistes peuvent invoquer la vérité comme moyen de défense sur des questions d'intérêt public. Règle générale, ils peuvent, dans cette province, défendre leurs reportages en démontrant qu'ils se conformaient à la norme de diligence dont un « journaliste raisonnable » ferait preuve dans l'exercice de son travail. La liberté d'expression est par ailleurs limitée par des mesures législatives en matière de protection de la vie privée et par le droit criminel (le libelle criminel, la propagande haineuse, l'OBSCÉNITÉ et la LOI SUR LE DROIT D'AUTEUR). Chacun de ces régimes juridiques comporte des dispositions particulières distinctes relatives aux éditeurs et aux particuliers. Toutes les lois provinciales canadiennes en matière de protection de la vie privée (celles de Terre-Neuve, du Québec, du Manitoba, de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique) prévoient, par exemple, qu'il est permis d'opposer à une action pour atteinte à la vie privée l'existence de motifs raisonnables de croire que la publication était d'intérêt public. En général, cet argument ne justifie pas l'atteinte à la vie privée par laquelle les documents ou les renseignements en question ont été obtenus.

Contrôle des médias

S'il est vrai qu'ils s'opposent au contrôle judiciaire préalable de leurs publications, il reste que les médias n'ont pas toujours gain de cause. Il est presque impossible d'interdire à l'avance une publication diffamatoire. Il est difficile de prouver à l'avance ce qu'une personne dira et le droit préfère permettre la libre expression, quitte à en mesurer les conséquences plus tard. Il est arrivé que les atteintes à la vie privée, les abus de confiance ou les ruptures de contrat ont été limités par anticipation.

Certaines formes de renseignements ne peuvent être publiées, même si on peut les débattre librement (voir PUBLICITÉ DES DÉBATS EN JUSTICE ET INTERDICTIONS DE PUBLICATION). D'autres ne peuvent même pas être mentionnées. Manifestement, si les médias ne peuvent avoir accès à l'information, ils ne peuvent la publier. Par exemple, à quelques exceptions près, constitue un crime le fait pour les jurés de parler publiquement de leurs délibérations dans la salle des jurés. Aux États-Unis, ce genre d'information est publié de façon régulière.

Les lois fédérales et la plupart des lois provinciales en matière d'ACCÈS À L'INFORMATION touchent les médias. Chacune de ces lois comporte des dispositions protégeant le caractère confidentiel des renseignements personnels détenus par l'État. Ainsi, si, dans le passé, les renseignements détenus par l'État étaient communiqués ou refusés aux médias de façon arbitraire par les fonctionnaires, aujourd'hui, leur communication est réglementée. Certains renseignements que l'on refusait de communiquer autrefois peuvent maintenant être obtenus; d'autres, qui étaient disponibles, ne sont plus communiqués.

Il arrive souvent que les médias recueillent des renseignements qu'ils ne publient pas, mais que d'autres désirent obtenir. Aussi doivent-ils souvent chercher à protéger leur produit journalistique inédit, ainsi que leurs sources confidentielles de renseignements, contre la divulgation forcée en justice. Dans plusieurs provinces, la protection des sources a été reconnue à l'étape de l'interrogatoire préalable en matière de diffamation, selon une règle de pratique dite « règle relative aux journaux ». L'alinéa 2b) de la Charte protège implicitement la collecte des nouvelles, mais le plus loin que la Cour suprême soit allée pour rendre cette protection explicite a été d'exiger qu'une attention particulière soit portée à l'équilibre entre les préoccupations des médias et celles des organismes d'application de la loi, dans le contexte des demandes de mandat de perquisition contre les médias.

Réglementation des médias

Afin de faire face au problème de la limitation du spectre radio et, plus récemment, du potentiel limité de transmission par câble et par satellite, le Canada réglemente la radiodiffusion et les télécommunications depuis de nombreuses années. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a établi des règlements régissant le contenu des émissions. Par exemple, les diffuseurs ne peuvent diffuser « des propos offensants ou des images offensantes qui, pris dans leur contexte, risquent d'exposer une personne ou un groupe ou une classe de personnes à la haine ou au mépris pour des motifs fondés sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge ou une déficience physique ou mentale » ou « tout langage ou image obscène ou blasphématoire » ou toute « nouvelle fausse ou trompeuse ». La publicité commerciale et l'information électorale politique partisane sont, elles aussi, réglementées.

Le CRTC exige en outre que les diffuseurs se conforment à des lignes directrices élaborées et administrées par des organismes de l'industrie, relatives aux stéréotypes sexuels, à la violence, à la publicité des boissons alcoolisées et à la publicité qui s'adresse aux enfants, en respectant la réglementation, condition nécessaire à l'obtention d'un permis. Dans la plupart des cas, ces lignes directrices ont été élaborées à la demande du CRTC lui-même.

De plus, le CRTC décide qui peut être un diffuseur canadien, oblige les diffuseurs canadiens à se conformer à des normes de contenu canadien dans l'établissement des horaires de diffusion et détermine quels sont les services de télévision non canadiens qui peuvent être distribués aux Canadiens par des câblodistributeurs, par des entreprises de distribution par satellite et par d'autres entreprises du genre.

À l'exception des lois d'application générale, la presse écrite n'est soumise à aucune réglementation équivalente. Cependant, les services canadiens d'information sur Internet distribuent non seulement du texte, mais également du matériel audiovisuel, et ne sont pas encore réglementés à cet égard. L'apparition de nouvelles technologies de distribution soulève des questions au sujet de la nécessité de maintenir la réglementation et de la capacité d'assurer cette réglementation. La réglementation du contenu d'INTERNET par d'autres pays peut influencer la création et la distribution du contenu au Canada.

Par ailleurs, de nombreuses dispositions légales visent à encourager la création et les industries culturelles canadiennes, notamment la télévision, les longs métrages, les vidéos, la musique, les livres, les magazines et les journaux. Des fonds d'encouragement à la production, des incitatifs fiscaux et des dispositions associées aux traités internationaux, notamment des protections culturelles spéciales inscrites dans l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis et dans l'Accord de libre-échange nord-américain, ont été établis. De plus, d'autres régimes juridiques ont été institués pour appuyer les collectifs d'artistes de scène, d'écrivains, de compositeurs, de musiciens et d'autres groupes d'artistes.