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Mennonites

Pendant le XVIe siècle, le mouvement anabaptiste se répand en Europe et connaît plusieurs chefs. Dans les États d'Allemagne du Nord et les Pays-Bas, Menno Simons est un chef influent. À l'origine, il est prêtre de l'Église catholique romaine, mais a des doutes quant au baptême des enfants.
Mennonite, église
Église mennonite, à Kitchener, en Ontario (avec la permission de Malak, Ottawa).
Les Mennonites
Certificat d'exemption du service militaire d'un jeune Mennonite du sud du Manitoba (avec la permission des Mennonite Heritage Centre Archives).

Les premiers mennonites à arriver au Canada s’installent vers la fin du XVIIIe siècle dans le sud de l’Ontario. Aujourd’hui, on compte plus de 200 000 mennonites au pays. Plus de la moitié d’entre eux habitent les villes, en particulier Winnipeg. Certains, comme le Vieil Ordre amish et le Vieil Ordre mennonite, tournent encore le dos à toute technologie et vivent de façon traditionnelle. D’autres acceptent d’utiliser les machines et les appareils modernes, et de s’intégrer à la vie en société.

Premiers mennonites en Europe

Les mennonites sont un groupe religieux et culturel fondé au XVIe siècle pendant la Réforme protestante, au moment où un certain nombre de chrétiens se séparent de l’Église catholique romaine. Les mennonites datent leur séparation de l’identité chrétienne au mouvement anabaptiste de la Réforme du début du XVIe siècle. L’ordination des anabaptistes (mot qui signifie « rebaptisés ») et des mennonites diffère de celle des catholiques en ce sens que, pour eux, le baptême est un choix fait par le fidèle à l’âge adulte (et non à l’enfance). Pour eux, la communion inclut parfois le lavement des pieds comme symbole d’humilité et de dévouement.

Pendant le XVIe siècle, le mouvement anabaptiste se répand en Europe et connaît plusieurs chefs. Dans les États du nord de l’Allemagne et les Pays-Bas, Menno Simons est un chef influent. À l’origine, il est prêtre de l’Église catholique romaine, mais il se questionne quant au baptême des enfants. En 1536, il quitte l’Église catholique et devient vite le chef des anabaptistes de la région. Les fidèles de sa communauté se font connaître en tant que mennistes et, plus tard, mennonites. Bourreau de travail, il écrit beaucoup, prêche et organise le mouvement; Menno Simmons lui donne un nouveau souffle.

Les paisibles « mennistes » sont persécutés et s’éparpillent par conséquent en Europe et en Amérique du Nord. Les mennonites du sud de la Suisse se déplacent vers l’ouest et s’installent en Alsace et au Palatinat. À la fin du XVIIe siècle, ils sont nombreux à s’être installés en Pennsylvanie. Les mennonites allemands et hollandais, eux, se déplacent principalement vers l’est et s’installent dans ce qui est aujourd’hui la Pologne, puis, à la fin du XVIIIe siècle, en Russie. Le relatif isolement des mennonites et leur autosuffisance, combinés à leur conviction que la religion est un mode de vie, produisent une culture socioreligieuse unique.

Migration au Canada

Les mennonites arrivent d’abord au Haut-Canada vers 1776. Originaires de régions germaniques, ils parlent tous la langue allemande, ce qui les distingue du reste de la population. Ainsi, au début, les mennonites sont perçus comme un groupe minoritaire présentant des caractéristiques à la fois linguistiques, religieuses et ethniques.

La première vague migratoire au Canada, pendant et après la Révolution américaine, amène quelque 2000 mennonites suisses de la Pennsylvanie vers le Haut-Canada. Ils acquièrent des terres de propriétaires privés dans la péninsule du Niagara, et dans les comtés de York et de Waterloo. Ils sont suivis par les mennonites amish (ainsi nommés en l’honneur de l’évêque Jacob Ammon, chef conservateur de la fin du XVIIe siècle). De 1825 au milieu des années 1870, ils sont près de 750 à s’installer sur les terres de la Couronne dans le comté de Waterloo et dans les alentours.

Dans les années 1870, les politiques de russification du gouvernement russe forcent quelque 18 000 mennonites hollandais, un tiers des mennonites de la Russie, à émigrer en Amérique du Nord. La promesse d’une terre, de l’autonomie culturelle et éducative, et la garantie d’exemption du service militaire attirent quelque 7000 d’entre eux dans le sud du Manitoba. La concession de lots de colonisation (voir Peuplement des terres) dans les Territoires du Nord-Ouest attire, de 1890 à la Première Guerre mondiale, des mennonites de Prusse, de Russie et des États-Unis. Beaucoup de nouveaux immigrants déménagent au Manitoba et dans les Prairies, et fondent des communautés mennonites en Saskatchewan; d’autres fondent des congrégations en Ontario.

En 1917, la conscription aux États-Unis attire de plus en plus de mennonites dans les Prairies. La plus grosse vague migratoire se produit dans les années 1920, lorsque 20 000 mennonites saisissent l’occasion de fuir la famine et les effets de la Révolution bolchévique pour s’installer au Canada. La plupart s’installent alors dans les Prairies. Puis, la Deuxième Guerre mondiale force plus de 12 000 mennonites à émigrer de l’Union soviétique et de l’Allemagne, qui s’installent, pour la plupart, dans les zones urbaines. Après la Deuxième Guerre mondiale, la troisième vague migratoire importante amène environ 8000 mennonites au Canada. Depuis, un grand nombre de mennonites immigrent des États-Unis, du Mexique et du Paraguay.

Le recensement de 2001 indique la présence de 191 000 mennonites au Canada. Plus de la moitié d’entre eux habitent les villes, et la transition des communautés rurales à la vie urbaine reflète celle du reste de la population. En 2010, les plus grandes concentrations urbaines de mennonites se trouvent à Winnipeg, à Vancouver, à Saskatoon et à Waterloo-Kitchener, toutes tributaires de grandes communautés mennonites rurales. Winnipeg abrite l’une des populations mennonites les plus importantes au monde, soit plus de 20 000 personnes et 45 églises.

Mode de vie mennonite

Les mennonites et leurs nombreuses congrégations réagissent différemment à l’innovation dans la vie religieuse et culturelle. Certains croient qu’une vie de discipline dans une communauté séparée du monde est essentielle et tentent toujours de contrôler le changement. D’autres soutiennent que l’adaptation et la participation au mouvement mondial sont essentielles au mandat chrétien.

Parmi les Suisses et les Hollandais, des groupements conservateurs ont su perpétuer les traditions des modes de vie ruraux et maintenir la mode vestimentaire d’une autre époque, aussi la langue et les formes liturgiques allemandes. Le Vieil Ordre amish et le Vieil Ordre mennonite, qu’on appelle parfois les mennonites « chevaux et charrettes », rejettent toujours l’utilisation de la technologie moderne (comme l’électricité et le transport motorisé) et pratiquent l’agriculture traditionnelle. Bien que la plupart utilisent aujourd’hui des tracteurs et de l’équipement mécanique, un petit nombre de mennonites très conservateurs appartenant au Vieil Ordre utilisent encore le cheval. Les communautés traditionnelles interdisent le permis de conduire, mais les véhicules motorisés sont parfois utilisés pour les longues distances.

En 2013, on compte de 10 à 20 communautés de la sorte au Canada, représentant environ 2 % de la population mennonite nationale. Les femmes et les hommes qui en font partie choisissent un style vestimentaire simple : les femmes portent le bonnet, et les hommes, des chapeaux noirs de paille ou de feutre. Les hommes du Vieil Ordre mennonite sont toujours rasés de près et ont des vêtements à boutons, contrairement à leurs compatriotes amish. La plupart des mennonites du Vieil Ordre ont le téléphone, l’eau courante et l’électricité, et utilisent des congélateurs et des machines à laver, mais pas de sécheuses. Les communautés permettent deux téléphones par famille, mais aucun accessoire pour téléphone. Les télécopieurs, les ordinateurs, la télévision et la radio sont interdits. Les jeunes se font la cour après la chorale ou les réunions de travail, et les mariages ont lieu au milieu de la semaine à la maison de la mariée. Les mennonites du Vieil Ordre refusent les soins de santé et l’éducation, financés par l’État. Parfois, les parents disciplinent les enfants avec la punition corporelle, ce qui, dans quelques cas, résulte en l’implication d’agences locales pour la protection des enfants.

Engagement et innovation

La vie politique est problématique pour les mennonites. D’un côté, ils découragent toute participation à un monde diabolique où la force et la violence sont des instruments de l’État. De l’autre, ils encouragent l’application de l’éthique de Jésus : amour, paix et justice dans toutes les sphères de la vie, y compris l’État. Aujourd’hui, la plupart des mennonites votent. Certains d’entre eux travaillent même en tant que députés ou fonctionnaires. Dans leur passé rural, les mennonites se voyaient comme les « silencieux du pays », mais James Urry (2006) suggère qu’ils sont devenus les « bruyants du pays ».

Les mennonites ne sont plus limités à leurs traditions suisses ou hollandaises et à leur appartenance ethnique. On compte de nombreux mennonites canadiens de souche française, chinoise, indienne et anglo-saxonne, et on observe un nombre grandissant de mariages mixtes. Les mennonites du Canada sont en train de changer rapidement. Un accent mis sur la famille et sur le rôle de la religion, des programmes visant à maintenir l’engagement des jeunes (organisations de jeunes, camps, chorales, programmes de services), des écoles spéciales et une vie religieuse dynamique renforcent les liens d’une communauté menacée par une population laïque bien plus nombreuse.

Organisation mennonite

En 1903, les congrégations mennonites du Manitoba et de la Saskatchewan fondent la Conférence des mennonites du Canada — le terme « conférence » renvoie aux dénominations protestantes « synode » et « district ». À mesure que diverses congrégations s’y joignent, la conférence change de nom et devient la Conférence générale des mennonites du Canada (1932), puis redevient la Conférence des mennonites du Canada.

En 2000, elle change encore de nom et devient l’Église mennonite du Canada, qui réunit le plus grand nombre d’adeptes au Canada. L’église centrale est située à Winnipeg, et les autres membres sont l’Église mennonite de l’est du Canada, l’Église mennonite du Manitoba, l’Église mennonite de la Saskatchewan, l’Église mennonite de l’Alberta et l’Église mennonite de la Colombie-Britannique. Les congrégations s’organisent en conférences provinciales et nationales; cependant, chaque congrégation est autonome au sein de la conférence en ce qui concerne les politiques.

Beaucoup d’organisations mennonites se réorganisent pour faire face à de nouveaux enjeux tels que l’évangélisme, la fondation d’églises, la direction pastorale, la sensibilisation, aussi les problèmes sociaux, l’action sociale auprès des Autochtones, les menaces à la paix, l’ordination des femmes, les relations entre les conférences, les périodiques et l’éducation postsecondaire. La plupart des familles de congrégations sont membres de comités centraux provinciaux, nationaux et continentaux.

Service et action sociale

Les persécutions du XVIe siècle forcent les mennonites hollandais à quitter la Hollande. Ils s’installent en Pologne, en Ukraine et en Amérique du Nord. Vers 1920, ceux qui vivent dans les régions ukrainiennes de la Russie sont menacés par la Révolution communiste, et des mennonites d’Amérique du Nord leur envoient des représentants et de l’aide sous forme de vêtements et de nourriture. Les mennonites en général s’isolent de plus en plus pour former des communautés fermées préoccupées par leur survie et la conservation de leurs identités anabaptiste et mennonite.

Pendant les deux guerres mondiales, des mennonites s’installent au Paraguay, au Canada, aux États-Unis et dans beaucoup d’autres pays. Au cours du dernier siècle, leurs services s’élargissent, évoluant de l’aide humanitaire à la formation du Comité central mennonite (CCM). Né lors du sauvetage des mennonites d’Ukraine, le CCM devient une occasion d’action sociale par l’intermédiaire du travail missionnaire et du service social. De nos jours, le CCM offre aussi des services d’aide à l’émigration et à l’immigration, à l’agriculture, des services de soutien en santé mentale, d’orientation professionnelle, de secours en cas de catastrophe, etc. Il est devenu une agence mondiale de services sociaux dans plus de 60 pays, qui sert non seulement les mennonites, mais aussi des gens d’autres groupes religieux.

En 1950, la Mennonite Service Organization est créée en réponse aux tornades qui frappent l’Oklahoma et aux inondations au Manitoba. Aujourd’hui, sous le nom de « Mennonite Disaster Services » (MDS), en plus de fournir de l’aide en cas de catastrophe, l’organisme s’occupe de projets communautaires comme la construction de logements abordables. Le CCM, de son côté, offre son aide à l’échelle internationale, tandis que le MDS est actif au Canada et aux États-Unis.

Le maintien de la paix est un aspect central de la vie des mennonites. Chaque année, la communauté célèbre le « Dimanche de la paix », comme corollaire au jour du Souvenir. Le CCM promeut également l’objection au militarisme par le truchement de pétitions et de publications, encourage les jeunes à refuser la carrière militaire et met sur pied un site Internet nommé « O Canada: armed and ready », qui comprend la section « Who would Jesus bomb? ».

Éducation

En tant que groupe religieux qui met l’accent sur la séparation d’avec le monde et sur la non-conformité sociale, les mennonites résistent souvent à l’influence des écoles publiques gérées par l’État. Outre leurs propres nombreuses écoles élémentaires, les mennonites canadiens gèrent leurs écoles secondaires privées, des collèges et un centre théologique universitaire. Les étudiants désireux de poursuivre une formation pastorale peuvent s’inscrire au Mennonite Brethren Biblical Seminary Canada, qui offre parmi ses différents diplômes la maîtrise en divinité.

L’Université mennonite canadienne (UMC) comprend trois collèges situés à Winnipeg : le Mennonite Brethren Bible College (créé en 1944), le Canadian Mennonite Bible College (créé en 1947) et le Menno Simons College (créé en 1989), qui tient ses activités sur le campus de l’Université de Winnipeg. L’UMC décerne des diplômes depuis 1998. Par l’entremise de l’Université de Waterloo, en Ontario, le Conrad Grebel University College offre des études de premier et de deuxième cycles en foi mennonite, et établit le Centre for the Study of Religion and Peace en 2010.

Parmi les périodiques canadiens mennonites, nommons les périodiques de langue allemande, tels que Die Mennonite Rundschau (publié de 1880 à 2007), Der Bote (publié de 1924 à 2008), Die Mennonitische Post, et ceux de langue anglaise : Mennonite Brethren Herald et Canadian Mennonite. Deux revues érudites sont aussi publiées : Journal of Mennonite Studies et Conrad Grebel Review.

Musique

Les mennonites du Canada sont réputés pour leurs chorales (voir Musique des mennonites). La seule musique permise au sein des communautés traditionnelles (amish, Vieille Colonie et Vieil Ordre) est le chant congrégationnel à l’unisson sans instruments. Dans la plupart des autres congrégations mennonites, le chant se fait en harmonie à quatre voix, parfois accompagné d’un orgue ou d’un piano, et souvent dirigé par un chef de chorale. De nombreux festivals de musique mennonite (ou Sängerfeste), comme des événements annuels sur la côte ouest, ont lieu partout au Canada.