La population autochtone est la population la plus rurale au Canada. Selon le recensement de 2021, 1,8 million de personnes ont déclaré être d’ascendance autochtone, et 801 045 Autochtones ont signalé vivre dans des centres urbains au Canada.

Redéfinitions de la vie
Le système de marché et d’autres éléments de la culture canadienne envahissent la plupart des communautés autochtones. Dans certains cas, le mode de vie traditionnel de subsistance est considéré comme étant inapte à fournir les nécessités de la vie. Ainsi, avec les facteurs supplémentaires comme l’augmentation de la population autochtone et la diminution du gibier dans certaines régions, les gens abandonnent la chasse, la pêche et le piégeage et ils déménagent dans les centres urbains.
Une vie semi-urbaine dans de grands villages est courante chez les Hurons-Wendats et les Haudenosaunee de l’Est, et chez les Salish de la côte, les Nuu-chah-nulth, les Kwakiutl et les Tsimshian en Colombie-Britannique. Selon le registre des Indiens de 1996, 42 % des personnes enregistrées comme ayant le statut d’Indien vivent à l’extérieur des réserves. La population des Premières Nations s’urbanise parce qu’elle est située à côté ou à l’intérieur des centres urbains.
Selon l’Enquête auprès des peuples autochtones de 1991, le pourcentage d’adultes qui ont déclaré avoir changé de communauté au moins une fois au cours de leur vie est de 22 % en Ontario, 21 % en Colombie-Britannique, 14 % dans les Prairies, 9 % au Québec, 8 % dans les Maritimes et 2 % dans le Nord. Ainsi, le taux de migration hors des réserves est élevé en Ontario et en Colombie-Britannique, modéré dans les Prairies et faible au Québec, dans les Maritimes et dans le Nord. Les taux élevés de migration proviennent des Premières Nations qui sont en plus petits nombres, qui ont une tradition de travail à l’extérieur des réserves, qui ont des possibilités d’emplois limités à l’intérieur des réserves, des niveaux d’éducation plus élevés et des écoles plus intégrées.
Analyse de la migration autochtone
Les données précises sur la migration des zones rurales vers les zones urbaines concernant la population autochtone sont généralement insuffisantes, et la plupart des informations disponibles au sujet de leurs habitudes de déplacement sont basées sur les données des recensements. Dans une analyse du recensement de 1986 sur la migration autochtone, on découvre que les personnes ayant le statut d’Indien et ayant vécu à l’extérieur des réserves sont plus enclines à changer de communauté que les populations autochtones qui vivent sur les réserves. Les Premières Nations et les Métis ont des taux plus élevés de migration hors réserves.
Selon l’Enquête auprès des peuples autochtones de 1991, la proportion d’adultes ayant déménagé à un moment donné au cours de leur vie, mais pas au cours des 12 derniers mois, est de 61 % chez les membres des Premières Nations vivant actuellement sur une réserve, à l’extérieur d’une réserve ou dans des communautés; cette proportion est de 69 % chez les Métis. Parmi ceux qui ont déjà déménagé, 41 % des membres des Premières Nations et 48 % des Métis déclarent avoir déménagé dans leur résidence actuelle à partir d’un autre endroit dans la même communauté, et 27 % des membres des Premières Nations et 26 % des Métis disent avoir déménagé dans leur localité actuelle en provenance d’une communauté différente à l’intérieur du Canada.
D’après la même enquête, 40 330 Indiens inscrits et 14 590 Métis déclarent avoir déménagé au moins une fois au cours des 12 derniers mois. Parmi ces personnes, 22 % d’Indiens inscrits et 17 % de Métis proviennent d’une autre communauté au Canada.
Les Inuits sont plus isolés des grands centres urbains que les Premières Nations et les Métis. Ils continuent de pratiquer un mode de vie axé sur la subsistance. Il n’est donc pas surprenant qu’ils soient moins attirés par la ville. Selon l’Enquête auprès des peuples autochtones de 1991, 3445 Inuits adultes déclarent avoir déménagé au cours des 12 derniers mois précédant l’enquête. Parmi ceux-là, 29 % déménagent dans un quartier différent, mais toujours dans la même communauté, et seulement 11 % déménagent dans une communauté différente au Canada.
Taux de croissance hors des réserves
La mise en œuvre du projet de loi C-31 en 1985 contribue au taux de croissance élevé de la population hors réserve depuis 1985, étant donné que de nombreux Autochtones résidant à l’extérieur des réserves et ayant donc perdu leur statut d’Indien peuvent réclamer leur ascendance. En 1985, près de 76 000 femmes, et leurs enfants, ayant perdu leur statut d’Indien à la suite de leur mariage sont admissibles au rétablissement de leurs droits en vertu des dispositions du projet de loi C-31. Par conséquent, plus de 100 000 personnes sont ajoutées à la population d’Indiens inscrits. D’après le Registre des Indiens de 1996, la population vivant à l’extérieur des réserves passe de 147 424 personnes à 256 505 personnes entre 1987 et 1996.
L’expansion des services médicaux, d’éducation, de logement et de gestion d’entreprise sur les réserves soutient le désir de maintenir au moins une résidence nominale sur une réserve. Un bon nombre de ces personnes tentent également d’être acceptées par leurs Premières Nations et de rétablir leur résidence sur les réserves. Selon l’Enquête auprès des peuples autochtones de 1991, le nombre d’Autochtones adultes ayant déjà changé de lieu de résidence au cours de leur vie passe de 40 020 entre 1981 et 1985 à 140 300 entre 1986 et 1990. Il est probable qu’une proportion importante des personnes représentées durant cette dernière période ait participé à la migration de retour vers une réserve.
En quittant la réserve, les Autochtones quittent la juridiction où les services sont principalement financés par Service aux Autochtones Canada, et ils entrent dans la juridiction de dizaines d’autres organismes fédéraux et provinciaux (voir aussi Ministères fédéraux des Affaires autochtones et du Nord). Par conséquent, les Autochtones qui migrent vers les zones urbaines doivent compter sur les gouvernements municipaux et provinciaux pour les services publics. Selon la Commission royale sur les peuples autochtones (1996), en 1991 le gouvernement fédéral verse aux gouvernements provinciaux plus de 70 milliards de dollars pour financer des programmes pour les Autochtones dans les domaines de l’éducation postsecondaire, de la santé et du Régime d’assistance publique du Canada. Le Secrétaire d’État, en particulier, finance des programmes autochtones hors réserves, en fournissant plusieurs millions de dollars par année pour soutenir les associations politiques autochtones, les Centres d’amitié autochtones à travers le pays, les associations de femmes et les associations sociales et culturelles. Les centres autochtones urbains remplissent d’importantes fonctions sociales et contribuent à intégrer les divers services sociaux offerts aux Autochtones dans les villes. La ville de Winnipeg compte le plus grand nombre d’Autochtones vivant en région urbaine, et le recensement de 2021 indique que plus de 102 000 Autochtones vivent dans la ville.
Le Rapport de la Table ronde nationale sur les préoccupations des populations urbaines autochtones (1993) se concentre sur les préoccupations et les enjeux auxquels font face les Autochtones qui migrent en région urbaine. Dans ses recommandations, il cite les domaines clés qui pourraient répondre à certaines des préoccupations de la population autochtone des villes : l’éducation, la toxicomanie, l’invalidité, le sida, l’itinérance, la protection de l’enfance, les services sociaux, les soins de santé, l’emploi et le logement, la sensibilisation culturelle, l’isolement culturel, et les jeunes dans la rue (voir Éducation des Autochtones au Canada; Santé des Autochtones au Canada; Condition sociale des Autochtones au Canada). Le rapport souligne également que les services culturellement appropriés devraient être adaptés aux modes de vie et aux coutumes des personnes autochtones et des communautés.
Institutions autochtones urbaines
Le développement des institutions autochtones urbaines (le Québec a un modèle urbain unique, plus assimilateur) peut généralement être établi en quatre catégories : les services sociaux offerts par la communauté majoritaire; les réseaux populaires d’amis et de parents axés sur la famille où les Autochtones fournissent eux-mêmes des services sociaux, comme l’assistance juridique, l’aide aux toxicomanes et le travail social selon les besoins; l’élaboration d’associations bénévoles éducatives, politiques, récréatives, artistiques et religieuses; et le développement de services académiques et professionnels mis sur pied par les Autochtones. Plus important encore, la créativité culturelle peut être observée dans le nouveau genre de société autochtone qui se développe dans les villes canadiennes.
La mobilité caractérise plus souvent les femmes autochtones que les hommes, et elle se remarque plus dans les petites communautés nordiques. Les femmes autochtones plus jeunes sont plus nombreuses à migrer vers les centres urbains que ne le sont les hommes. Elles ont tendance à poursuivre davantage leurs études et à accepter des emplois moins rémunérés, mais plus réguliers que les hommes, et elles représentent 54 % des migrants autochtones urbains à l’échelle nationale. Une étude menée en 1978 par la Ontario Native Women’s Association auprès de 1094 femmes autochtones ne révèle que de légères différences entre les activités et les attitudes des femmes vivant sur les réserves et celles qui habitent à l’extérieur de celles-ci. La plupart des Autochtones hors réserve vivent dans des villages ou des villes plus petites, et continuent d’entretenir des liens proches avec les parents et amis qui vivent sur les réserves (voir Questions relatives aux femmes autochtones du Canada).
Adaptations
Des études menées partout au pays indiquent que la pénurie de logements, la croissance de la population et le manque d’emploi dans les réserves sont les raisons les plus courantes pour lesquelles les Autochtones migrent vers les régions urbaines lorsqu’ils sont jeunes. Les adaptations urbaines réussies sont liées à plusieurs facteurs : les antécédents culturels des diverses personnes selon l’évolution traditionnelle de leur héritage social autochtone; des éléments historiques comme la durée et l’intensité des contacts avec les non-autochtones; la proximité de leurs communautés par rapport aux centres urbains; la qualité de la réceptivité locale comme l’étendue des préjugés et de la discrimination anti-autochtones; et le degré d’implication des institutions autochtones urbaines dans la ville où ils s’installent.
Un classement régional des adaptations réussies commence en première place avec le Québec, où peu d’Autochtones quittent les réserves, mais où ceux qui le font sont relativement bien accueillis lorsqu’ils déménagent; viennent ensuite le sud de l’Ontario, le sud de l’Alberta et Vancouver; ils sont suivis de la Colombie-Britannique, du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et des Maritimes; et finalement le nord de l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et le nord de l’Ontario, qui présentent les adaptations urbaines les plus médiocres en raison d’un racisme répandu, d’une faible proximité urbaine et du nombre relativement limité d’institutions de groupes autochtones.
L’urbanisation dans l’Arctique, de la Sibérie au Groenland, est un processus de concentration de centaines de petits groupes de chasseurs autochtones semi-nomades dans des dizaines de villages permanents et dans quelques grandes communautés comme Inuvik et Iqaluit. Étant donné que les Inuits et les autres membres de la population doivent vivre en coopération dans les mêmes communautés, les gens apprennent à se connaitre et il y existe moins de préjugés et de discrimination que dans la partie nord des Prairies, où les membres des Premières Nations et les Métis ont tendance à vivre sur les réserves ou dans d’autres communautés séparées de la population non autochtone. Dans l’Arctique, où le taux de rotation des travailleurs est élevé dans des conditions de villes-champignons, des problèmes sociaux ont tendance à se développer au sein de ces grandes villes, comme à Tuktoyaktuk, la base d’exploration pétrolière dans la mer de Beaufort.