Je suis allée à l’hôpital Westminster à Londres pour faire mes études d’infirmière et à cette époque on obtenait son diplôme après trois ans d’études et ensuite on était intégrées au personnel et on travaillait là pendant un an, il fallait donc quatre ans avant d’être reconnue en tant qu’infirmière de l’hôpital à part entière. Je me suis engagée dans l’armée [britannique] juste après ça.
Bon, j’étais un peu surprise qu’on m’envoie à Kure au Japon pour ma première affectation, parce que je n’y avais jamais vraiment réfléchi. Quand j’ai décidé de m’engager dans l’armée, je n’ai pas pensé plus avant. Quand j’ai reçu ma première affectation, c’était à un poste outre-mer. Ça a été une grosse surprise cette affectation au Japon en fait. Et ensuite, on vous envoyait en Corée pour une période de deux mois, et la vie là-bas était extrêmement primitive, alors ils ne nous laissaient jamais plus de deux mois sur place.
On portait des pantalons quand on est parties en Corée et c’était la première fois parce que ce n’est pas quelque chose qu’on nous fournissait quand on s’engageait dans l’armée en Angleterre. Alors on portait des pantalons de combat et un haut de combat et un casque en fer. Je me souviens du casque et juste un sac en toile pour mettre nos affaires. Et on a fait le voyage dans un avion qui n’avait que des strapontins le long des parois et il y avait du matériel au milieu. Alors c’était assez primitif. Et on nous a récupérées à l’aéroport et conduites en jeep jusqu’à l’hôpital.
L’hôpital se trouvait dans une ancienne école, alors il ne disposait pas des mêmes installations qu’un hôpital normal. Et on habitait dans la maison qui était sans doute là où le personnel logeait, je pense. Mais l’hôpital en lui-même était simplement une vieille école avec des salles de classe qu’on avait transformées en salles communes.
On avait l’habitude d’aller travailler à l’hôpital coréen pendant nos jours de congé parce qu’ils manquaient d’infirmières. Et en fait pour une raison indéterminée ils avaient perdu toute une promotion d’infirmières à cause de la guerre. Mais je ne sais pas trop ce qui leur était arrivé. Donc ils manquaient vraiment de personnel et on allait travailler à l’hôpital pendant nos jours de congé. Et c’était ça la relation qu’on avait avec eux. Évidemment, on ne parlait pas un mot de leur langue. Ça ne vous empêchait pas de pouvoir quand même laver les gens, ni de soigner leurs blessures. Vous pouviez leur apporter un peu de réconfort tout simplement avec un sourire. Vous n’avez pas besoin de connaître leur langue pour ça. Tant que vous souriez et vous montrez compatissant, vous pouvez soigner les gens.
Je pense que mon souvenir le plus fort ce sont les brûlures atroces et le fait de devoir m’occuper des dégâts énormes qu’elles causaient. Et elles étaient soignées – elles n’étaient pas recouvertes de pansements, alors elles étaient horribles à regarder. Vous savez, quand ils étaient brûlés jusqu’à l’os et que les os étaient carbonisés et qu’ils ressortaient de la plaie. Alors c’était vraiment atroce à regarder et à soigner comme toutes les brûlures. Mais je n’avais jamais vu ça à l’hôpital pendant que je faisais mes études à Londres. Et les brûlures, c’est ce dont je me souviens le plus.